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Tribune 5 juin 2023

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Sortir du silence : lancer l’alerte pour le climat

Face à l'amplification de la crise climatique, un collectif d'avocat·es, de juristes, de militants associatifs lancent l’ONG Climate Whistleblowers. Objectif : protéger les lanceurs d'alerte, ces « sentinelles du climat » qui mettent leur sécurité en jeu en témoignant ou en rendant publiques des données sensibles.

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La crise climatique s'accentue de jour en jour. Malgré la mobilisation grandissante dans le monde entier, les émissions de gaz à effet de serre atteignent des records. Changement climatique, pollution, extinctions de masse s’intensifient et entraînent instabilité, exodes et conflits. Selon le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, nous sommes sur « l'autoroute vers l'enfer climatique ».

Notre système de gouvernance atteint ses limites. Les décideurs politiques et économiques sont impuissants, sinon complices, face à l’ampleur d’une crise dont ils ont parfaitement conscience. Pourtant, l’espoir est là. Manifestations, désobéissance civile, actions en justice, beaucoup agissent pour renverser le statu quo.

Seulement, trop de décisions essentielles pour l’avenir de l’humanité sont prises sans contrôle citoyen, sans transparence, à huis clos. Cette opacité organisée contribue à préserver l’impunité des responsables. La crise climatique est donc aussi une crise de la transparence.

Imaginez un monde où toute personne ayant accès à des informations d'intérêt général, et essentielles pour la préservation de l’environnement, peut les révéler sereinement, tout en étant soutenue. Greenwashing, comptabilité carbone, avantages fiscaux, études d’impact… Imaginez un monde où consommateurs, citoyens, responsables politiques, juges, tous, ont accès à ces informations qui leur sont trop souvent cachées et qui pourtant obligeraient les responsables de la crise climatique à rendre des comptes.

Les lanceurs d’alerte sont essentiels au mouvement climat. En apportant des preuves précises et substantielles, et des témoignages puissants, ils peuvent avoir un impact direct en suscitant le débat public, en alimentant des procédures judiciaires et en inspirant d'autres à agir à leur tour.

Souvent, les lanceurs d’alerte sont l’illustration d’un changement progressif de paradigme. En publiant des informations précises, et parfois des preuves, ils peuvent déclencher des séismes dans l’opinion publique, comme l’ont montré Edward Snowden sur la surveillance de masse ou Antoine Deltour sur l’optimisation fiscale.

La récente directive européenne visant à améliorer leur protection, ou la loi Waserman en France, témoignent de la reconnaissance par le législateur du rôle qu’ils ont à jouer dans nos sociétés modernes face à des pouvoirs économiques et politiques toujours plus enclins à cloisonner les processus de prise de décisions.

À l’heure où l’humanité est sur un chemin de crête, ces progrès législatifs doivent aider ceux qui, en première ligne, révèlent des informations sensibles et capitales pour notre planète, souvent cachées au nom du profit.

Banquier dénonçant un projet de financement des énergies fossiles, employée dénonçant des pratiques de greenwashing, ingénieure révélant les coulisses d'une déforestation massive... Nombreux sont ceux qui peuvent se transformer en gardiens du climat. Nombreux sont ceux qui peuvent sortir de la dissonance cognitive qui pousse à fermer les yeux au nom d’une stabilité professionnelle.

Révéler ces abus est un chemin long, dangereux et risqué. Ces lanceurs d’alerte menacent des intérêts puissants et opaques. Parce qu’ils s’exposent à des risques pour leur propre sécurité et celle de leurs proches, ces défenseurs de l’intérêt général ont besoin de soutien et de protection contre les représailles, non seulement de la part des autorités, mais aussi de la part des personnes à qui ils délivrent leurs données sensibles.

C’est dans cet objectif que l’ONG Climate Whistleblowers (CW) a été créée cette semaine.

CW agit en bouclier pour ces sentinelles du climat. Avocats, journalistes, activistes : en tant que fondateurs de CW, nous mettons notre expérience au profit des lanceurs d’alerte climatiques pour les protéger et permettre à leurs révélations d’avoir un impact significatif.

Un seul lanceur d’alerte peut être au départ d’un élan plus grand, il peut agir en catalyseur d’actions collectives et massives face à l’opacité organisée pour maintenir le statu quo. Le lancement d’alerte peut donner sa voix à la Terre.

Fadel Barro, journaliste et fondateur du mouvement citoyen sénégalais « Y'en a Marre »

Gabriel Bourdon-Fattal, avocat, directeur des programmes, PPLAAF

Jean-Philippe Foegle, juriste et chercheur, ancien coordinateur de la Maison des Lanceurs d'Alerte

Clara Gonzales, juriste Greenpeace France

Simon Ilse, conseiller sécurité connectée globale, Heinrich Böll Stiftung

Cécile Marchand, chargée d'enquête énergies fossiles, ARIA

Anna Myers, directrice exécutive, Whistleblowing International Network (WIN)

Henri Thulliez, avocat, directeur exécutif, Plateforme de Protection des Lanceurs d’Alerte en Afrique (PPLAAF)