Nous sommes un collectif francophone de sages-femmes, doulas, professionnel·les et militant·es de la naissance. Notre métier est un travail pour la vie, pour le respect et la dignité, il nous est donc impossible d’ignorer le massacre actuellement en cours en Palestine et plus particulièrement à Gaza.
Notre métier et notre lutte pour la justice reproductive nous forcent à regarder les conditions désastreuses dans lesquelles les nourrissons, les enfants et les personnes qui accouchent survivent Nous voyons les conséquences immédiates du siège et des bombardements incessants sur le système de santé à Gaza. Nous pensons aussi aux conséquences sur les générations à venir, sur les conditions de vie matérielles mais aussi à l’impact en termes de trauma intergénérationnel.
La justice reproductive, c’est le droit d’être enfant et de grandir en ayant foi en l’humanité, sans être exposé·e à la menace très réelle de voir sa famille exterminée. C’est le droit d’accoucher dans un hôpital avec de l’eau, de l’électricité, un accueil humanisé, sans risquer d’être enseveli·e sous les bombes. C’est pouvoir vivre sa culture et sa religion en communauté, dans la joie, sans être victime d’apartheid et de violences continues. C’est tout ce qu'Israël refuse au peuple palestinien.
Depuis le 7 octobre 2023 à Gaza, les conditions d’accouchement déjà difficiles dû au contexte d’apartheid sont rendues complètement infernales. Près de 200 accouchements ont lieu chaque jour. Lorsque l’accès à des hôpitaux était encore possible (ils sont maintenant tous détruits), les opérations nécessaires pour sauver la vie des personnes accouchantes comme celles des nourrissons avaient lieu sans anesthésie, sans électricité et évidemment sans environnement stérile. Les Nations Unies ont signalé des cas de césariennes effectuées à vif (sans anesthésie), et des sages-femmes sur place racontent devoir effectuer des révisions utérines à main nues.
Désormais, les accouchements ont lieu dans les camps de réfugié·es, dans la rue, au milieu des décombres. Le personnel soignant qui n’a pas été tué ou qui n’a pas fuit fait ce qu’il peut. Cependant, en raison de l’atroce réalité du terrain, le risque de mort en couche et dans les suites est énorme. Et même si certaines personnes survivent à ces terribles conditions, lutter pour sa vie et celle de son nouveau-né en post-partum immédiat est extrêmement difficile. Certains parents doivent préparer leurs biberons avec de l’eau contaminée car c’est la seule eau disponible. La population assiégée (ce qui constitue un crime de guerre) est affamée et il est impossible de produire du lait pour allaiter dans ces conditions de famine. Les fausses couches ont augmenté de 300% à Gaza à cause du stress, du manque de repos et de la faim.
L’article II de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide des Nations Unies caractérise les mesures pour entraver les naissances au sein d’un groupe ethnique comme constitutif du crime de génocide. Dans cette situation, la volonté génocidaire d’Israël ne pourrait pas être plus claire. Ce point spécifique a d’ailleurs fait l’objet d’un plaidoyer d’Adila Hassim, avocate sud-africaine, lors du procès pour génocide entre l’Afrique du Sud et Israël à La Haye ce 11 janvier 2024. Ce procès a été gagné par l’Afrique du Sud et Israël doit “faire tout en son pouvoir pour empêcher un génocide”, tout comme nous.
Nous n’oublions pas les plus de 10 000 enfants mort·es sous les bombes, mort·es de leurs blessures, mort·es de la famine, et les dizaines de milliers d’autres qui sont blessé·es, amputé·es, devenus orphelin·es. Nous n’oublions pas l’image d’un enfant de 10 ans obligé de ramasser dans un sac les restes carbonisés d’un membre de sa famille. Nous n’oublions pas les cinq bébés prématurés qui ont dûs être abandonnés à leur sort à l’hôpital al-Nasr, et qui ont été retrouvés en décomposition quelques jours plus tard.
Nous n’oublions surtout pas le silence assourdissant dans le monde de la natalité en France. Le 19 décembre, le collectif Blouses Blanches pour Gaza a appelé le Conseil National de l’Ordre des Sages-femmes à prendre position sur le génocide en cours à Gaza : “Nous souhaitons que le Conseil de l’ordre des sages-femmes, institution garante de notre déontologie, exprime officiellement sa solidarité avec le peuple palestinien ; soutienne activement l’action de soin de la communauté médicale gazaouie et enfin appelle à un cessez-le-feu immédiat et à la levée du blocus sur Gaza ; comme il a su le faire après l’invasion de l’Ukraine par les forces russes. “
Cette lettre est restée sans réponse.
Sages-femmes, professionnel·les de la naissance, souvenons-nous des raisons pour lesquelles nous faisons ce métier. Notre métier est la défense de la vie. Nous avons le devoir de soigner chaque personne, quelle que soit son origine, son âge, son orientation sexuelle, sa religion ou son identité de genre. Nous savons que les conditions dans lesquelles on fait naître les bébés sont déterminantes lorsque l’on veut créer une société en paix et égalitaire. Alors que l’on regarde le peuple palestinien être victime de génocide, c’est notre légitimité à nous revendiquer comme une société démocratique, mais aussi notre humanité entière qui est en jeu.
Nous appelons à :
- Un cessez-le-feu immédiat et permanent
- La libération de la Palestine
- La responsabilisation de l’Etat français dans l’armement du Tsahal, l’armée israélienne
- La prise de position du CNOSF, du CNGOF, et des autres syndicats de médecins, comme ils l’ont fait lors de l’invasion Russe en Ukraine
- La prise de position des associations et écoles et associations de doulas françaises comme DDF, IFDF, Galanthis, Envol et Matrescence, etc restées complètement silencieuses depuis le début du massacre
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Signataires :
Aïcha Latreche, sage-femme
Aïda Souissi
Aïssa Juliette, doula
Akim Aouidj
Alina Zaheer, sage-femme
Aline Baugé, doula
Alys Edouard, sage-femme
Andrés Gualutona Suarez, sage-femme
Anziza Abdourahamane
Assetou Fofana, sage-femme
Bahia Mansouri, sage-femme
Bouchra Chaïb, sage-femme
Carole Hervé, consultante en lactation IBCLC
Catherine Dupré
Cécile Venance, doula
Charline Diouf, sophrologue
Charline Marinier, sage-femme
Celia Sinegre, doula
Clée, doula
Clotilde Bourhis, psychologue pour enfants
Collectif doulas radicales
Diarietou Camara, sage-femme
Dounia Kendil
Emmanuelle Trichard, doula
Erica Rivolier, doula
Eva-Luna Tholance, doula
Fa Leslie, usagère
Fanny, doula
Fanny Champigny, sage-femme
Farida Ait Kaci, aide soignante
Fatima Hammoudi, étudiante sage-femme
Gabrielle Artus, étudiante sage-femme
Hanane Bouarour, sage-femme
Habiba Zaid, sage-femme
Hoda Djelloul, sage-femme
Imane Kha
Ines Zeghidi, sage-femme
Islah Chouh, sage-femme
Isabelle Koenig, sage-femme
Isabelle Monnier, doula
Justine Jeandel, sage-femme
Joanna Lisch, sage-femme
Johanne Voahangy, sage-femme
Julie Roudier, doula
Kadiatou Coulibaly, sage-femme
Kamilia Azzi, sage-femme
Karine Langlois Laseva, sage-femme
Katy Refuveille, doula
Khaïra Bodhiana, sage-femme
Kristelle Cardeur, business coach et doula
Laetitia Conort, doula
Laëtitia Sepulveda, sage-femme
Latifa Basrire, sage-femme
Laszlo Morales, doula
Linda Arabat, étudiante sage-femme
Lindha Kouangou, sage-femme
Lollia Mirianne, auxiliaire de puériculture
Lucie Allo, doula
Lucie Bonato, doula
Maeva Morin, professeure de yoga et doula
Madjiada Achour
Mariem Asila, sage-femme
Marawa, sage-femme
Marion Calmel, doula
Maryam Mahjoub, sage-femme
Mathilde Larrousi, doula
Mat Sabah, sage-femme
Meriem Bouchemoua, sage-femme
Nadia Sahal, sage-femme
Nadia Samir
Nakiya Taheraly, sage-femme
Nora Ben
Noa Landret, doula
Raja Ouahbi, sage-femme
Rime Betteka, sage-femme
Sabrina, juriste et doula
Samira Oudaoud Gassama, sage-femme
Samra Seddik, sage-femme
Sarah Koehler, doula
Sarah Thouvenot, doula
Sharmila Naudou, sage-femme
Sofia Hadj-Azzam
Sourouwa Seydi, infirmier
Thanina Fellah, sage-femme
Touati Mariem, sage-femme
Umm Leya, doula
Vero Allaite, doula
Virginie Gossez, sage-femme
Yael Flauder, formatrice
Yasmine Louati, sage-femme
Zina Tioura, sage-femme
Zineb Behouh, sage-femme
Zoë Salmon, doula