Les invités de Mediapart (avatar)

Les invités de Mediapart

Dans cet espace, retrouvez les tribunes collectives sélectionnées par la rédaction du Club de Mediapart.

1363 Billets

15 Éditions

Tribune 11 mars 2025

Les invités de Mediapart (avatar)

Les invités de Mediapart

Dans cet espace, retrouvez les tribunes collectives sélectionnées par la rédaction du Club de Mediapart.

Climat : pourquoi les banques et assureurs français doivent agir face à Trump

Inquiètes face à l’arrivée de Donald Trump au pouvoir et au développement du gaz naturel liquéfié (GNL) américain, plusieurs ONG interpellent les banques et assureurs français pour leur demander de « ne plus soutenir les projets de GNL, à l’impact dévastateur pour le climat, l’environnement et les droits humains. »

Les invités de Mediapart (avatar)

Les invités de Mediapart

Dans cet espace, retrouvez les tribunes collectives sélectionnées par la rédaction du Club de Mediapart.

Il ne lui aura fallu que quelques heures. À peine arrivé au pouvoir, et alors que les feux ravageaient Los Angeles, Donald Trump annonçait deux décisions lourdes de conséquences pour le climat : la sortie des États-Unis de l’Accord de Paris et la fin du moratoire de l’administration Biden sur la construction de nouveaux terminaux d’exportation de gaz liquéfié. Un mois plus tard, mi-février, un premier projet de terminal d’exportation en Louisiane recevait déjà son feu vert.

Pourtant, quelques semaines auparavant, et de manière inédite, le Département de l’Énergie américain mettait en garde contre l’impact du GNL sur le climat et l’environnement dans une étude. La secrétaire d’État à l’Énergie de l’époque révélait notamment que les plus grandes installations d’exportation de GNL aux États-Unis contribueraient à émettre chaque année à elles seules plus de gaz à effet de serre que 141 pays séparément en 2023 - sans compter la pollution et les conséquences sur la santé des communautés affectées. En effet, le GNL américain est issu en majorité du gaz de schiste, entraînant ainsi le développement de nouveaux champs dont l’impact sur le climat ne pourra pas être compensé par les technologies de capture et stockage du carbone.

Ces chiffres sont d’autant plus inquiétants que le secteur continue de se développer. Rien qu’aux États-Unis, 20 projets de terminaux d’exportation de GNL sont prévus d’ici 2030 - cela représente près d’un tiers des nouveaux projets prévus dans le monde. Ces projets américains contribueraient à émettre 4 gigatonnes de gaz à effet de serre en 5 ans, soit un tiers des émissions annuelles des centrales à charbon en activité dans le monde, selon l’ONG Reclaim Finance. Et l’expansion du secteur continue alors que les capacités actuelles d’exportation de GNL sont suffisantes pour répondre à la demande écrit l’Agence internationale de l’énergie.

Illustration 1
© Photo: Gordon Leggett / Wikimedia Commons / CC BY-SA 4.0

La question est donc la suivante : les projets de GNL vont-ils continuer à voir le jour grâce au soutien des banques et assureurs français ? Car jusqu’à présent, les institutions financières françaises ont répondu présent pour développer le GNL aux États-Unis et dans le monde, fermant les yeux sur ses impacts, et restant sourdes aux alertes des ONG.

À rebours de leurs engagements climatiques, les quatre plus grandes banques françaises, Banque Populaire Caisse d’Epargne (BPCE), Société Générale, Crédit Agricole, et BNP Paribas, ont ainsi injecté 14 milliards de dollars en faveur de l’expansion du GNL entre 2021 et 2023. Ces chiffres les propulsent dans le top 30 des plus grands soutiens au développement du GNL dans le monde. Du côté des assureurs, malgré l’opacité des contrats, les recherches menées par les ONG ont permis de révéler que les assureurs AXA et SCOR assurent au moins 5 terminaux aux États-Unis.

Ces soutiens se poursuivent, comme en témoignent les nombreux exemples récents. En janvier, le groupe BPCE participait à l’introduction en bourse de l’entreprise développant le plus de nouvelles capacités de GNL au monde, l’américain Venture Global. En février, grâce à des certificats obtenus par plusieurs ONG, on apprenait que l’assureur AXA et le réassureur SCOR assurent le terminal Calcasieu Pass de Venture Global, situé en Louisiane. Ce projet avait été financé quelques années auparavant par le groupe BPCE et Crédit Agricole, malgré des impacts dévastateurs sur les communautés locales, comme la pollution excessive du site et la diminution drastique des revenus liés à la pêche, dont dépendent les habitants.

Avec l’arrivée de Trump au pouvoir et l’essor sans limite du GNL qui s’annonce au niveau mondial, les institutions financières françaises doivent refuser de faire le jeu d’une administration américaine qui s’attaque déjà frontalement à la science et à l’action climatique. Les banques et les assureurs doivent enfin adopter des politiques d’exclusion solides sur l’expansion du GNL, et respecter leurs engagements pour la neutralité carbone et la limitation du réchauffement à 1,5°C. Cela signifie de dire non aux opportunités commerciales permettant le développement du gaz liquéfié qui pourraient se présenter, notamment aux États-Unis.

Signataires :

Lucie Pinson, directrice de l’ONG Reclaim Finance

Marie Cohuet et Laura Thieblemont, co-présidentes des Amis de la Terre France

Morgane Creach, directrice générale du Réseau Action Climat - France

Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire A Tous

Jean-François Julliard, Directeur Général de Greenpeace France.

Gaëlle Nourry-Gardien,Porte-parole d’Action non-violente COP21

Zoé Pélegry, Porte-parole d’Alternatiba

Louis Deusy, au nom du collectif Pour un réveil écologique

Extinction Rebellion - Carnage Total

Anaïs Gervais pour le collectif StopTotal