Nous nous réjouissons de la relaxe générale prononcée aujourd’hui par la 17ème chambre du tribunal correctionnel suite au procès que nous a intenté Christophe Girard pour diffamation et/ou injures publiques. « Ces propos ne dépassent pas les limites de la liberté d’expression dans le cadre d’une polémique politique », a décidé la justice. C’est une victoire dans la lutte féministe et contre la pédocriminalité.
Les militant.e.s se félicitent du moment judiciaire, politique et militant qu’ont été ces deux jours de procès, en présence d’un public très nombreux. Il a notamment permis d’exposer devant la Justice le système Matzneff, qui n’a pu prospérer dans l'impunité que grâce à l’appui de personnalités du monde culturel et politique.
Lors de l’audience, Christophe Girard et son avocate ont remporté haut la main le traditionnel bingo antiféministe, demandant que cessent l’« hystérisation du débat » et le « lynchage », alléguant que nous aurions cherché à obtenir son « scalp », dénonçant une période de « cancel culture » ou la « justice des réseaux sociaux », et évoquant même la « terreur » féministe.
Le contenu du délibéré fera date, le tribunal reprenant à son compte nos analyses féministes sur plusieurs points :
#Metoo et la libération de la parole sont d’intérêt général : le tribunal souligne que les accusé·es se sont saisi·es d’“un sujet d’intérêt général” “justifiant (leur) mobilisation”, dans un contexte d’“interrogations et attentes des citoyens et citoyennes sur la façon dont la société, et plus particulièrement les pouvoirs publics, doivent désormais réagir face aux personnes mises en cause pour des faits de violence sexuelles et face aux personnes de leur entourage s’étant montré complaisantes ou indifférentes à leur égard.”
La culture du viol est reconnue comme “une notion universitaire et militante, passée dans le langage courant”. L’emploi de l’expression “Adjoint à la culture du viol” relève d’un jeu de mot admissible dans le cadre d’une mobilisation politique.
Deux des prévenues, Alice Coffin et Raphaëlle Rémy-Leleu sont des élues du Conseil de Paris. Une enceinte politique qui porte une lourde responsabilité sur l’impunité dont a bénéficié Christophe Girard pendant des années, avant leur élection à l’été 2020. Le Conseil de Paris avait notamment affiché une quasi-totale solidarité envers Christophe Girard. Nombre des propos tenus dans la presse par des Conseiller·es de Paris en soutien à Christophe Girard, et contre les deux élues féministes, ont contribué à encourager l’ex-adjoint à la Culture à intenter ce procès. L’ensemble des prévenu·es estime que des excuses serait un minima, une nécessaire prise de responsabilité de la part des politiques parisiens et parisiennes.
Les déclarations et témoignages des deux jours de procès ont particulièrement insisté sur le caractère intimidant et menaçant de l’action intentée par Christophe Girard. Elle s’inscrit dans une tendance lourde de procédures bâillons intentées contre des actions militantes d’intérêt général pour la société.
Les militant.es déplorent que la justice n’ait pas eu le courage de condamner d’une part Christophe Girard pour procédure abusive, et d’autre part, n’aient pas jugé bon de leur délivrer des dommages et intérêts.
Concrètement, ce sont des milliers d’euros qui ont été payés à titre personnel par les militantes. Encore une fois, ce sont aux féministes de payer de leur poche, leur vie, leur énergie, pour pallier les dysfonctionnements de la société.
Malgré la relaxe totale, la décision du tribunal suscite donc colère et indignation. Il aurait été souhaitable que la justice envoie un signal beaucoup plus clair pour dissuader ceux qui pensent pouvoir étouffer la parole féministe à coups de procédures bâillons. Nous appelons de nos vœux une proposition de loi et une action politique.
Signataires :
Alix Béranger,
Coline Clavaud-Mégevand,
Alice Coffin,
Morgan Jasienski,
Céline Piques
Raphaëlle Rémy-Leleu