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Tribune 30 avril 2023

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Vente d'Editis : « il faut raviver le combat collectif contre la concentration des médias et de l'édition »

[REDIFFUSION] « Le poison de la concentration des médias, la croisade culturelle de milliardaires contre les libertés collectives, continueront d’infuser lentement ici et là. Le terreau médiatique est devenu si fertile pour la pousse de l’extrême droite et de la censure. » Alors que se précise l'hypothèse de la vente d'Editis au milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, dessinant un paysage éditorial constitué de deux mastodontes avec le groupe Bolloré, un ensemble d'élu·es Nupes s'inquiète de l'absence de mécanismes de protection contre les phénomènes de concentration.

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Le dossier Bolloré agite le monde de l’édition depuis le début de l’année 2022. En se lançant dans une acquisition de Hachette-livre, une opération conditionnée par l’Union européenne à sa séparation préalable du groupe Editis, le milliardaire a semé le doute et l’incertitude au sein des deux maisons. Cette manœuvre, confuse et trouble depuis plusieurs mois, aura eu le temps de miner un peu davantage un paysage éditorial déjà très fragile.

Après le spectre d’une cession du groupe Editis à un consortium de trois hommes d'affaires - des parlementaires de la NUPES avaient écrit à la ministre de la Culture pour s’en inquiéter -, l’hypothèse de sa vente au milliardaire tchèque Daniel Kretinsky est aujourd’hui la plus probable. Si l’édition sortira immanquablement groggy de cette opération, le phénomène de concentration dans les médias se révèle lui dans une santé éclatante.

Daniel Kretinsky doit encore surmonter l’opposition feutrée de la Commission européenne à ses détentions cumulées de maisons d’édition et de médias. Actionnaire des journaux « Le Monde » et « Libération », propriétaire des magazines « Marianne », « Elle », « Télé 7 jours », premier actionnaire depuis peu du distributeur Fnac-Darty, Daniel Kretinsky fait une percée ces dernières années dans le grand Monopoly des médias.

Cette offensive explique aussi les craintes, tout à fait légitimes, des salariés du groupe Editis. C’est pourquoi leurs syndicats demandent à être reçus prochainement par le repreneur probable. Garanties quant à la préservation des emplois, au maintien de l’unité « édition-diffusion-distribution » du groupe, à une indépendance éditoriale très malmenée ces dernières années (on ne compte plus les complaisances de la direction à l’égard de l’extrême-droite)... Les sujets d’inquiétude sont nombreux.

Côté Hachette-livre, s’ouvre pour les salariés une période orageuse. Incertitude sur la politique de l’emploi, sur le devenir de l’identité du groupe, sur l’autonomie des maisons qui le composent, sur le projet éditorial et industriel d’un Vincent Bolloré dont on connait l’appétit politique. Si l’option Kretinsky est confirmée et remet Editis d’aplomb, la manœuvre de dislocation de l’édition par Vincent Bolloré aboutira – au mieux – à reconstituer une dynamique de mastodontes.

Les deux groupes concentrent plus de la moitié du Chiffre d’affaires de l’édition, l’industrie culturelle vit au rythme de leurs coups tandis que se trouvent relégués au second plan la création, l’édition petite ou moyenne et indépendante, les négociations commerciales - en particulier avec les libraires -, le devenir des contrats-auteur et celui des données détenues jusque-là par Editis mais susceptibles de transfert vers les bases de Hachette-livre par le biais de la transaction.

La seule, donc, à sortir la tête haute de cette opération viciée dès le départ, celle par qui le malheur arrive et arrivera encore à terme, c’est la concentration des médias. Nous aurions tort d’applaudir ou d’ébaucher un soupir rassuré une fois Hachette-livre acquis et Editis vendu. Le poison de la concentration des médias, la croisade culturelle de milliardaires contre les libertés collectives, continueront d’infuser lentement ici et là. Le terreau médiatique est devenu si fertile pour la pousse de l’extrême droite et de la censure. En pâtiront forcément l’indépendance, la liberté de création et d’information, la vitalité culturelle, la culture elle-même.

C’est dire l’urgence de mécanismes de protection contre les phénomènes de concentrations dans l’édition, dans la culture, dans l’ensemble de notre l’économie. La gauche n’est pas sans proposition sur ce sujet, loin de là. Lors de la dernière campagne présidentielle ou à l’occasion de travaux parlementaires, la NUPES a avancé des idées qui doivent être reprises, retravaillées, en lien avec tous les acteurs (syndicats, salariés, intervenants) des secteurs de l’édition et de la culture.

Alors que le peuple français fournit en ce moment, dans la bataille sur la contre-réforme des retraites, la preuve de sa capacité de mobilisation, nous appelons à ce que la nécessaire sauvegarde de la création et de l’indépendance ravive ce combat collectif contre la concentration des médias.

Signataires :

Ségolène Amiot (députée La France Insoumise-NUPES),
Manon Aubry (eurodéputée La France Insoumise),
Clémentine Autain (députée La France Insoumise-NUPES),
Manuel Bompard (député La France Insoumise-NUPES),
Mickaël Bouloux (député Socialistes et apparentés - NUPES),
Soumya Bourouaha (députée Gauche démocrate et républicaine – NUPES ),
Leïla Chaibi (eurodéputée La France Insoumise),
Sophia Chikirou (députée La France Insoumise-NUPES),
Hadrien Clouet (député La France Insoumise-NUPES),
Éric Coquerel (député La France Insoumise-NUPES),
Alexis Corbière (député La France Insoumise-NUPES),
Jean-François Coulomme (député La France Insoumise-NUPES),
David Cormand (député européen écologiste),
Hendrik Davi (député La France Insoumise-NUPES),
Iñaki Echaniz (député Socialistes et apparentés - NUPES),
Elsa Faucillon (députée Gauche démocrate et républicaine – NUPES),
Emmanuel Fernandes (député La France Insoumise-NUPES),
Sylvie Ferrer (députée La France Insoumise-NUPES),
Perceval Gaillard (député La France Insoumise-NUPES),
Claude Gruffat (député européen écologiste),
Mathilde Hignet (députée La France Insoumise-NUPES),
Fatiha Keloua Hachi (députée Socialistes et apparentés - NUPES),
Andy Kerbrat (député La France Insoumise- NUPES),
Bastien Lachaud (député La France Insoumise-NUPES),
Michel Larive (ancien député La France Insoumise)
Charlotte Leduc (députée La France Insoumise-NUPES),
Sarah Legrain (députée La France Insoumise-NUPES),
Murielle Lepvraud (députée La France Insoumise-NUPES),
Benjamin Lucas (député Écologiste - NUPES),
Élisa Martin (députée La France Insoumise-NUPES),
Frédéric Mathieu (député La France Insoumise-NUPES),
Marina Mesure (eurodéputée La France Insoumise),
Philippe Naillet (député Socialistes et apparentés - NUPES),
Younous Omarjee (eurodéputé La France Insoumise),
François Piquemal (député La France Insoumise-NUPES),
Thomas Portes (député La France Insoumise-NUPES),
Adrien Quatennens (député La France Insoumise-NUPES),
Jean-Claude Raux (député Écologiste - NUPES),
Aurélien Saintoul (député La France Insoumise-NUPES),
Michel Sala (député La France Insoumise-NUPES),
Eva Sas (députée Écologiste - NUPES),
Ersilia Soudais (députée La France Insoumise- NUPES),
Sophie Taillé-Polian (députée Écologiste - NUPES),
Andrée Taurinya (députée La France Insoumise-NUPES),
Matthias TAVEL (député La France Insoumise-NUPES),
Aurélie Trouvé (députée La France Insoumise-NUPES),
Paul Vannier (député La France Insoumise-NUPES),
Léo Walter (député La France Insoumise-NUPES)