Albert Einstein avait raison : il y a deux choses qui donnent une idée de l’Infini, l’Univers et la bêtise humaine. Et pour l’Univers, il ajoutait qu’il n’en était pas sûr. Mais pour la bêtise humaine, l’extrême-droite en émoi lui a donné incontestablement raison.
Que voulait la Libre Pensée dans cette affaire ?
Faire respecter l’article 28 de la loi du 9 décembre 1905 de Séparation des Eglises et de l’Etat qui prohibe, à partir du 1er janvier 1906 toute installation de symboles religieux de toute nature sur des emplacements publics.
La Libre Pensée, répétons-le aux Bas du Front des mal-comprenants, ne voulait pas la destruction de la statue concernée, mais son déplacement vers un emplacement privé. Déboulonner pour déplacer ne veut pas dire détruire. Il n’a jamais été question que l’on ne la voit plus, mais que ceux qui voulaient tomber en dévotion devant elle puisse la voir ailleurs que sur un emplacement public.
Il faut rappeler que l'intervention de la Libre Pensée n'est rendu nécessaire que par une carence de l'Etat : les préfets ferment les yeux devant les infractions à la loi. Notons que ceux qui ne cessent de hurler « L’Ordre ! L’Ordre ! » contre les présupposés « musulmans », qui ne respecteraient pas les lois, s’empressent de les bafouer quand il s’agit du cléricalisme catholique. Histoire sans doute de moderniser la Parabole de la paille et de la poutre !
Qu’a obtenu la Libre Pensée dans cette affaire ?
La statue sera déplacée (la distance n’a aucun rôle à jouer dans cette affaire) d’un emplacement public vers un emplacement privé et peu importe qu’on la voie ou pas. Tel n’était pas l’objet de la requête de la Libre Pensée.
C’est donc une victoire totale des Libres Penseurs qui ont agi dans cette affaire. Et une déroute complète des cléricaux d’extrême-droite.
On comprend bien que devant cette fessée juridique, la Réaction s’étrangle de rage et essaie de camoufler les choses en changeant l’or en vil métal. Dura lex, Sed lex : la Libre Pensée a fait respecter la laïcité. Rappelons que la non-visibilité de la statue n’a jamais été la revendication des Libres Penseurs, nous ne sommes pas des iconoclastes destructeurs.
La preuve en est que la majorité des statues et emblèmes religieux de ce pays date d’avant la promulgation de la loi de 1905 et que jamais la Libre Pensée n’a revendiqué leurs déplacements ou même leurs destructions, de la même manière qu’elle ne s’est jamais opposée à leur réfection à l’identique en cas de problème.
Le Maire concerné a déclaré dans un accès visible d’eau bénite (dont l’abus nuit gravement à la santé mentale, il devait revenir de pèlerinage) que « La République est laïque, la France est chrétienne ». Il devrait consulter, au moins, les ouvrages historiques sérieux. Mais de quel Christianisme parle-t-il du haut de son ignorance : Monophysisme, trinitaire, antitrinitaire, arianisme, gnosticisme, dualisme ? Puisqu’il évoque les « racines chrétiennes », il faudrait qu’il nous dise lesquelles précisément. On a bien l’impression que pour lui, tout cela c’est de l’Hébreu et qu’il y perd son Latin.
Depuis Maurice Barrés à la fin du XIXe Siècle (avant on ne s’en était sans doute pas aperçu), l’extrême-droite parle de « racines chrétiennes ». Les papes n’ont fait que suivre après. On sait qu’avec des racines bien plantées dans la terre, on ne va nulle part, on reste chez soi. Et la France, melting-pot des peuples n’aurait jamais existé avec une conception pareille. C’est sans doute cela l’ouverture d’esprit à l’autre chez les intégristes catholiques.
Les véritables origines (et non pas « racines ») de la France sont celto-gréco-latines et non « judéo-chrétiennes ». Le Judéo-Christianisme n’existe pas et n’a jamais existé, contrairement aux volontés de cerveaux visiblement dérangés : le Judaïsme a été écrasé par le Christianisme dans un fleuve de sang et d ‘oppression.
Pour se détendre après un tel effort intellectuel, il devrait lire « Le Pape des escargots » d’Henri Vincenot (pas vraiment un progressiste révolutionnaire anticlérical, on le rassure) qui montre à l’évidence que le Christianisme n’a jamais été qu’un vernis superficiel sur le paganisme profond de la France issue des Gaulois, comme l’enseignaient naguère les manuels scolaires. Le vernis n’a jamais été le bois.
Il n’en demeure pas moins que le Maire, qui a confondu ses opinions personnelles avec la défense de l’intérêt général de ses administrés, devra répondre, tôt ou tard, de l’utilisation abusive des fonds publics pour une cause illégale. Là aussi : Dura lex, Sed lex.
Quelle conclusion en tirer ? Une seule : la véracité des propos de l’extrême-droite et des cléricaux est à la réalité la même chose que la vaseline est au suppositoire : un moyen pour faire passer un moment douloureux.
Christian Eyschen.