Nous débattons de nos désaccords avec le NPA et ses succédanées, c’est la Démocratie. Mais informée des menaces répressives qui sont brandies contre le NPA pour ses prises de positions sur le conflit au Moyen-Orient, la Fédération nationale de la Libre Pensée condamne fermement ces menées liberticides gouvernementales et participera, sur son propre plan, au combat de solidarité envers le NPA.
C’est ce qui nous distingue aussi grandement de celui-ci. Au nom des désaccords avec la Libre Pensée sur la place de la religion, celui-ci refuse obstinément de soutenir la Libre Pensée contre les agressions qu’elle a subies de la part de l’extrême-droite et des catholiques intégristes. Nous sommes en désaccord avec le NPA, mais nous ne mélangeons pas tout : la solidarité contre la répression est un principe intangible que la Libre Pensée entend respecter par-dessus tout.
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On m’a demandé plusieurs fois, souvent avec étonnement, pourquoi le NPA et sa nébuleuse multiforme n’avaient pas pris position en défense de la Libre Pensée lors des agressions qu’elle a subies de la part de l’extrême-droite et des catholiques intégristes, malgré deux demandes explicites de la Libre Pensée.
Le NPA où les NPA (on ne sait plus trop bien) et sa nébuleuse (si certains dont nous allons parler ici ont pu, plus ou moins, s’en éloigner pour diverses raisons, ils ont gardé, selon nous, la matrice d’origine. Le NPA en est resté pour eux la Maison–Mère et il peut y avoir plusieurs demeures dans la Maison du Père – Évangile de Jean, 14-2) ne cessent de se proclamer « antifasciste » à tout propos et appelant sans cesse à la lutte contre l’extrême-droite et il semble donc étonnant de constater ce curieux silence. Nous allons essayer d’expliquer à notre avis quelles en sont les raisons.

Dès l’émergence de ce courant politique, il a repris les thèses du stalinisme sur la « main tendue aux catholiques » de Maurice Thorez – qu’il a étendu à l’ensemble des autres religions - considérant que la question religieuse divisant les travailleurs, il fallait éviter de mener un combat pour l’athéisme, le matérialisme, le rationalisme.
Sans le dire explicitement, ce courant politique reprenait les thèses d’Emile Vandervelde, socialiste belge qui allait faire rompre le Parti socialiste avec la Libre Pensée, l’expulsant de ses locaux qui hébergeaient les Libres Penseurs depuis des lustres. Ceci au nom de l’affirmation : « La religion est une affaire privée ». Cette thèse de tout temps de tous les révisionnistes de tous poils a été combattue par Friedrich Engels dans sa Critique des programmes de Gotha et d’Erfurt, puis à plusieurs reprises par Lénine. Le reniement de Vandervelde préparait le reniement complet de la Social-Démocratie de la IIéme Internationale qui allait se vautrer dans la Collaboration de classes et l’Union sacrée avec leurs gouvernements capitalistes respectifs dans chaque pays.
Le point de vue d’Engels et de Lénine était très clair : la religion est privée vis-à-vis de l’État, mais pas vis-à-vis du Parti qui doit être athée et promouvoir le rationalisme en toute chose, donc y compris en matière religieuse. C’est la position de la Libre Pensée : l’État doit être neutre du point de vue institutionnel et doit respecter cette neutralité laïque, les Libres Penseurs sont antireligieux du point de vue philosophique, et ils n’imposent à personne leurs conception.

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Dès 1958, c’est-à-dire à la quasi-naissance du courant politique qui a donné naissance au NPA, André Lorulot, dirigeant historique de la Libre Pensée nationale et mondiale, polémiquera publiquement contre Ernest Mandel dit Germain, dirigeant de cette tendance politique, dans la Calotte. La Libre Pensée va éditer bientôt un numéro de sa Collection Arguments « Dismas (1), le cléricalisme d‘extrême-gauche » où nous republierons cet article en deux parties avec une actualisation de notre analyse sur cette problématique de reniement et de capitulation.
Autre conception qui sous-tend la position de fait du NPA : il faut respecter les croyances, comme il est indiqué dans la Constitution gaulliste, bonapartiste et corporatiste de la Vème République. Le NPA a la même position que la droite réactionnaire anti-laïque. C’est la soumission aux religions. Or, un vrai laïque ne respecte pas les croyances qui sont justiciables de toute critique, cela s’appelle la liberté d’expression qui organise la liberté de conscience.
Par contre, un militant authentique de la laïcité défendra bec et ongles la liberté des croyants qui sont totalement libres de croire ce qu’ils veulent et de pratiquer, comme ils le souhaitent, la religion de leurs choix et les Athées et Libres Penseurs sont tout autant libres de faire de même pour leurs propres convictions. Et ce au nom du principe de Rosa Luxembourg : « La liberté est toujours la liberté de celui qui pense autrement ». Nous partageons l’aphorisme prêté à Voltaire : « je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’au bout pour que vous ayez les droit de l’exprimer »
La conception du NPA de la « défense de la laïcité » est devenue très « communautariste », car elle assimile les croyances et les croyants, contrairement à la position de Voltaire qui distingue bien les deux. La question de « l’islamophobie » est très éclairante, car le NPA mélange la religion-Islam et les Musulmans. L’Islam et les Musulmans sont ainsi transformés à nouveau en « peuple-classe » chargé de faire la Révolution, sans doute à la place du NPA.
La Libre Pensée réfute ce terme de « islamophobie » comme étant un piège et refuse de l’utiliser et de le cautionner d’une quelconque manière. Au grand dam du NPA et de ses affidés, la Libre Pensée ne signera jamais un texte, un appel, un communiqué qui emploie ce terme. Dénoncer « l’islamophobie », c’est défendre de fait l’Islam comme conception religieuse, ce n’est pas un point de vue laïque, mais communautariste et clérical.
Dans sa Déclaration de Principes (Article 2 de ces Statuts nationaux), elle indique : « Elle regarde les religions comme les pires obstacles à l’émancipation de la pensée ; elle les juge erronées dans leurs principes et néfastes dans leur action. Elle leur reproche de diviser les hommes et de les détourner de leurs buts terrestres en développant dans leur esprit la superstition et la peur de l’au-delà, de dégénérer en cléricalisme, fanatisme, impérialisme et mercantilisme, d’aider les puissances de réaction à maintenir les masses dans l’ignorance et la servitude. Dans leur prétendue adaptation aux idées de liberté, de progrès, de science, de justice sociale et de paix, la Libre Pensée dénonce une nouvelle tentative, aussi perfide qu’habile, pour rétablir leur domination sur les esprits. »
L’Islam est une religion, donc une conception philosophique qui est critiquable en soi. Il ne peut y avoir de racisme contre une conception philosophique (il suffirait d’en changer ou de devenir apostat pour ne plus subir le racisme ? C’est une plaisanterie), mais bien contre ceux qui s‘y reconnaissent et la pratiquent. C’est pourquoi, la Libre Pensée utilise le terme de « racisme antimusulmans » qui, lui, malheureusement existe bien et on en voit les effets réactionnaires, désastreux, meurtriers tous les jours.
Il est de notoriété que ce terme « d’islamophobie » émane des milieux intégristes islamiques et que c‘est un terme pour une croisade contre la laïcité et la démocratie. Le NPA en l’utilisant et surtout en voulant l’imposer participe de cela. C’est pourquoi, ses affidés comme Omar Slaouti (dont la réputation de provocateur n’est plus à faire) menace la Libre Pensée de tous les maux. Quant à Pierre Khalfa, il m’a traité récemment de « paranoïaque » (Heureusement que nous ne sommes pas dans la Russie stalinienne, j’aurai été conduit tout droit directement à l’internement en hôpital psychiatrique) pour avoir refusé de le suivre dans ses basses manœuvres dans le Comité unitaire pour la fin du racisme systémique, des violences policières pour la justice sociale et les libertés publiques pour tenter vainement d’en prendre la direction en se prenant pour quelqu’un d’autre.

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Plus étonnant encore, on peut lire, après les Marches du 23 septembre dans une première mouture d’une « tribune de presse », proposé par Pierre Khalfa ces passages : « En effet, s’attaquer à l’indépendance de l’autorité judiciaire c’est remettre en question l’État de droit et, plus largement manquer de respect à notre constitution, donc notre démocratie… Cette situation est d’autant plus inquiétante que l’institution policière paraît hors de contrôle du pouvoir politique…. c’est toute l’institution policière qui aujourd’hui remet en cause l’État de droit. »
C’est la même position que la Droite la plus réactionnaire : la Constitution de la Vème République est « NOTRE » Constitution et il faut lui marquer du respect ! Et « NOTRE » Constitution est consubstantielle à la Démocratie ! Comme soumission aux Institutions, c’est difficile de faire pire. Quant à l’affirmation que la police et les forces de l’’ordre sont hors contrôle d’Emmanuel Macron (dont le nom n’est jamais cité dans cette tribune, sans doute par respect pour les Institutions gaullistes dont le Président de la République est la clé de voûte), c’est pour le moins une tartufferie. C’est Emmanuel Macron le donneur d’ordres de la répression et des violences policières, il ne lui reste plus que cela pour tenir, avec la complaisance du Rassemblement national qui lui sert bien d’épouvantail pour se maintenir au pouvoir, pour se présenter comme un « rempart contre l’extrême-droite ». Ce qui menace l’État de Droit, c’est le gouvernement Macron/Borne, la police ne fait qu’obéir au Pouvoir Exécutif dont elle est le bras armé, pourquoi ne pas le dire et faire diversion ? Le NPA est la Grande Muette du Sérail de la Vème République.

Nous sommes véritablement dans une situation où c’est la plus élémentaire Liberté de conscience qui est remise en cause par le Gouvernement, avec la loi « Sécurité globale » et la loi « Séparatisme ». C’est la mise en application d‘une véritable Idéologie d’État qui s’applique.
Il est clair que ce genre de méthodes et tentatives, propres à toute idiosyncrasie ne peut que diviser les associations et organisations de toutes natures qui se sont regroupée pour agir. Si cela devait aboutir, cela ne pourrait qu’éloigner les associations de quartiers, de victimes de violences et d’assassinats policiers, d’immigrés qui sont extrêmement soucieux, à juste titre, de ne pas se faire manipuler et de conserver leur totale indépendance. La convergence établie, qui a eu une première expression dans la réussite des Marches du 23 septembre 2023, est historique, elle doit être renforcée, amplifiée et étendue et ne pas faire l’objet de manœuvres sordides.
La Libre Pensée est de tous les combats contre le racisme antimusulman et a toujours proclamé sa dénonciation de la haine contre les présupposés ou réels arabo-musulmans. Ce sont des concitoyens comme les autres, ils ont les mêmes droits, ils doivent être protégés et leurs libertés défendues comme tout le monde. Et ces libertés incluent la liberté du culte, la liberté de conscience, la liberté d’expression et la liberté d’association. La loi « Séparatisme » du 24 août 2021 entend détruire leurs libertés, les forcer à se séculariser, elle tend à les faire disparaître de l’espace public. Mais menacer une liberté pour quelques-uns, c’est menacer toutes les libertés pour tous. C’est inacceptable et doit être combattu avec la plus grande fermeté. Avec la loi « Séparatisme », après les Musulmans, cela sera le tour de tous ceux qui ne se reconnaissent pas dans le macronisme, agent du Capital financier, de l’exploitation et de la guerre.
Le racisme antimusulman, c’est quand le gouvernement fait décider l’interdiction de l’abaya, dont toutes les autorités religieuses disent que ce n’est pas un vêtement religieux, mais culturel. Ce n’est pas l’Islam qui est menacé, ce sont celles qui la portent : les Musulmanes. Ce racisme est directement instrumentalisé par la loi discriminatoire de 2004, produit d’une combine politicarde entre le RPR et le PS pour ne pas abroger l’Article 10 de loi d’orientation de juillet 1989 de Lionel Jospin, loi qui est la source de tous les « problèmes de laïcité » dans l’École. Cette loi a abrogé de fait les circulaires de Jean Zay de 1936/1937 qui avaient réglé le problème des signes religieux et politiques au sein de l’École publique laïque pendant plus de 60 ans.
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Une fois toutes ces explications données, revenons-en aux raisons du non-soutien du NPA et de sa nébuleuse à la défense de la Libre Pensée attaquée par l’extrême-droite et les catholiques intégristes.
Il est clair que le NPA s’inscrit dans un autre rapport avec les religions que les Libres Penseurs. Sa matrice d’origine la LCR a assuré le Service d’Ordre pour la dernière messe de l’Evêque catholique Jacques Gaillot dans la cathédrale d’Evreux, après sa mutation forcée dans un diocèse qui n’existe pas. Le NPA va même jusqu’à afficher et glorifier le pape François: L’Eglise catholique n’a donc historiquement aucune part de responsabilité dans le colonialisme et ses horreurs ?
Un sous-produit du NPA soutient les sans-papiers, très bien. Mais dans l’affaire de l’église Saint-Bernard, l’évacuation brutale des immigrés par la police n’a-t-elle pas été faite avec la complicité au moins tacite de l’Évêché, sinon à sa demande ? Pourquoi, pas un mot sur cette responsabilité ?

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Les mêmes soutiennent les immigrés sans-papiers sans dénoncer les magasins Emmaüs qui les réduisent en esclavage. Pourquoi, là-aussi, pas un mot sur la responsabilité de l’Église catholique qui a quand même quelques rapports avec Emmaüs ? La Libre Pensée les soutient aussi, mais en dénonçant la responsabilité de l’Église catholique. Une simple prise de position de l’Épiscopat catholique aurait inévitablement un effet positif pour les immigrés, c’est pourquoi elle ne dit rien et couvre de son silence (c’est une habitude chez elle à travers l’Histoire) cette exploitation honteuse. Le Vatican n’a rien fait pour défendre les Juifs persécutés par les Nazis et le Régime de Vichy, pourquoi ferait-il quelque chose pour les Musulmans exploités et réprimés ?
Le silence du NPA et de sa mouvance participe au silence de l’Église catholique et le conforte sur ces scandales. Et voilà pourquoi votre fille est muette sur les agressions subies par la Libre Pensée.
C’est pour toutes ces raisons, que le NPA et sa nébuleuse refusent d’apporter le minimum de solidarité militante à la Libre Pensée agressée. Se tairont-ils encore après cette nouvelle agression de l’extrême-droite ?
Alors le NPA : le Nouveau Pape anticapitaliste ?
Christian Eyschen, Secrétaire général de la Libre Pensée
1) Dans la mythologie chrétienne, Jésus a été crucifié a sur le Mont Golgotha en compagnie de deux larrons, celui sur sa droite était Barabbas, celui sur sa gauche était Dismas.