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Billet de blog 22 septembre 2023

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Chut ! Ce sont les sénatoriales dimanche...

Voilà, tout est dans le titre. Vous êtes abreuvés de rugby et de visite royale, de vente à perte des carburants et de l'éternel (et dramatique) retour du glyphosate... Mais il est un sujet qui ne franchit pas la barrière médiatique: ce sont les élections sénatoriales, qui ont lieu dimanche dans l'indifférence générale, du moins avant les résultats. Et on nous refait le coup à chaque fois.

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Nous savons tous ce que le roi d'Angleterre, Charles III, va manger et boire à midi, et même comment il conviendrait de le saluer si nous avions l'immense honneur de le rencontrer, mais qui est au courant du scrutin qui va renouveler dans trois jours la moitié de la chambre haute ?

Ce silence, respecté par toute la presse et par tous les médias audio-visuels, ou presque, interroge.

Pourquoi nous, citoyens, ne saurions-nous rien des enjeux de cette élection ?

Je sais que ce n'est pas une élection à suffrage direct et que le citoyen "moyen" ne vote pas. Ce sont donc les grands électeurs qui votent. Mais qui sont les grands électeurs ?

En fait ils sont 87000 et sont des élus (conseillers municipaux, conseillers généraux, parlementaires). Étant donné le nombre de communes et le panachage de ces grands électeurs, les grands électeurs sont, à 95%, des conseillers municipaux.

Je répète : à 95% des conseillers municipaux...

La proportion de conseillers votants est différente suivant la taille des communes :

-Pour les communes de moins de 9000 habitants tous les conseillers municipaux ne votent pas

-Pour les communes de 9000 à 30000 habitants tous les conseillers municipaux sont de grands électeurs

-Au-dessus de 30000 habitants des délégués supplémentaires sont désignés.

Malgré cette distribution différentiée des grands électeurs qui essaie de rattraper les choses, les communes rurales sont sur-représentées dans le corps électoral. Comme le précise l'article de Public Sénat d'où je tire ces informations (ici : "Sénatoriales: qui sont les 160000 grands électeurs qui élisent les sénateurs?") «les villes de moins de 10 000 habitants, qui représentent 50,3 % de la population, comptent 69 % des délégués sénatoriaux »  et cela favorise le vote droitier des grands électeurs.

Comme, à mon avis, le silence absolu sur ces élections favorise la reconduction automatique des caciques déjà en place.

Pourquoi ce silence serait-il favorable à la droite et au pouvoir en place ? Entre autre parce que, selon moi, les français mécontents qui voudraient convaincre leurs conseillers municipaux de changer de direction de vote n'ont aucune information sur leur possible marge de manœuvre... en effet ils ne savent même pas qu'il y a une élection... Donc ce suffrage se passe pratiquement en-dehors de l'espace public, ce qui rend le rend peu évolutif.

Cette élection, quand on en parle autour de soi, recueille une interrogation teintée d'ennui « Ah oui ? C'est dimanche ? De toute façon on ne vote pas... ».

Si, « On » vote, mais dans une ambiance feutrée où le bon peuple n'est pas convié... à part que ce sont ses représentants qui mettent leur bulletin dans l'urne et qui vont déterminer si la chambre haute sera un peu plus à gauche, ou pas.

A ce titre, le renouvellement par moitié n'aide pas à la lisibilité (cette année, ce sont les département de la deuxième partie de la liste des départements qui renouvellent leurs sénateurs).

Pour ce qu'il en est des équilibres politiques de cette élection-ci, j'avais lu que la La France Insoumise allait présenter un candidat LFI par siège. Apparemment il n'y a pas eu de possibilité de présenter un candidat unique NUPES à chaque fois, d'où le départ en ordre dispersé, ce qui semble péjoratif pour le futur résultat de la gauche aux sénatoriales. Voir l'article de Public-Sénat ici (Élections sénatoriales 2023: pourquoi LFI présente des candidats partout au dernier moment).

Mais tout n'est pas perdu: je pense que certains peuvent encore appeler leurs conseillers municipaux, surtout dans les petites villes, et tenter de les convaincre de bien voter dimanche... La voix d'un conseiller municipal, donc grand électeur, de Trifouillis-les oies a autant de poids que celle d'un grand électeur d'une grande ville: toutes les voix comptent.

Et que l'on ne me dise pas que le vote, ou le Sénat, ne sert à rien : d'abord pour cette élection le vote est obligatoire, la question est donc bien celle de pour qui les grands électeurs vont voter. Mais, surtout, cela me désespère de constater que les tenants de l'abstention ne réalisent pas à quel point leur choix donne le pouvoir à ceux dont les partisans courent vers l'isoloir, et pas toujours pour de bonnes raisons. Et enfin le Sénat a un rôle, qui peut être discuté, certes, mais qui existe.

Un Sénat à gauche, avec une chambre où la macronie n'a pas la majorité absolue, cela changerait la donne.

On peut rêver...

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