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L'exécutif laisse la situation sociale s'embraser sans écouter le peuple qui se fâche? Pourquoi?
Comme cela a dû être grisant de déclarer la guerre au Covid et de gouverner la France sans beaucoup de contre-pouvoirs ! Le Parlement réduit au silence, les oppositions inaudibles et les citoyens interdits de circulation et de rassemblement. Et un président, auto-déclaré général en chef, ignorant toutes les instances censées éclairer les choix du gouvernement pendant une crise sanitaire et décidant seul des personnes qui seraient légitimes pour le conseiller.
On n'a peut-être pas bien évalué les conséquences de cette situation sur la façon de gouverner de notre président, à l'époque déjà jupitérien.
En effet, pour son pouvoir, la survenue de l'épidémie a eu des conséquences favorables, notamment en coupant court aux manifestations des gilets jaunes qui, malgré la dévalorisation que ces derniers subissaient, et la violence dont on les accusait alors qu'une grande partie d'entre eux en a été victime, continuaient à se battre pour se faire entendre.
L'état d'urgence, annulant les contre-pouvoirs institutionnels, a donné à ce jeune président sans beaucoup d'expérience politique, un pouvoir extraordinaire, notamment celui de nous enfermer chez nous, ou de nous empêcher de travailler, ou de nous forcer à nous vacciner... Bref, il n'avait plus besoin de tenir compte de certains des freins que notre histoire démocratique et républicaine a imposés à l’exécutif pour éviter qu'il abuse de son pouvoir et porte atteinte à nos droits fondamentaux.
Ainsi, passer d'une situation sociale explosive à un gouvernement d'état d'urgence peu démocratique a pu apporter quelque satisfaction à celui qui théorisait depuis longtemps que les français étaient nostalgiques de leur roi.
Cependant les français aimaient tellement leur roi qu'ils ont fini par lui couper la tête...
Mais notre roi élu, tout à son hubris, a probablement oublié la tentation régicide qui se cache au fond de notre conscience citoyenne (malgré une apparence de soumission librement consentie...) et qui peut se réveiller à chaque instant.
Je fais l'hypothèse que, peut-être, notre président aurait bien envie de revivre l'aventure de l'état d'urgence. On se souvient que la fin de ce dernier avait été accompagnée de l'inscription dans la loi de dispositions qui en étaient issues. Alors j'imagine comme ce peut être attirant de penser avoir en main un outil qui va faire taire les oppositions actives à son projet et à sa puissance et augmenter encore cette dernière.Transformer un échec en réussite, c'est s'assurer de réussir à tous les coups, quoi qu'il en coûte... aux autres.
En effet, outre faire taire la révolution qui vient, l'état d'urgence, pourrait-il peut-être penser, augmenterait encore la présidentialisme du régime. C'est vertigineux, non ? Et l'état de crise que l'auto-proclamé Jupiter aurait à gérer nous mettrait encore plus dans la main des marchés financiers, puisque la crise économique qui s'ensuivrait nécessiterait une aide de leur part, avec contre-parties (cf la Grèce).
C'est de la politique-fiction ? Peut-être... ou peut-être pas. Quelques commentateurs soulignent la tranquillité de celui qui gouverne notre pays alors que celui-ci se soulève. Cela interroge.
Je vois, dans l'actualité récente, des éléments qui vont dans le sens de mon hypothèse : l'usage du 49.3 dont on savait qu'il allait mettre le feu aux poudres (nombre d'acteurs politiques ayant averti le président) et, avant cela, le refus de parler avec les syndicats, l'usage outré de détails constitutionnels pour faire passer une réforme sans accord parlementaire, l'envoi de forces de polices afin de, soi-disant, disperser les manifestants alors que, en fait, elles leur foncent dessus avec des armes, etc.
Quand à l'interview du président et à son refus de discuter de la réforme et des options permettant de tenir compte de l'opposition absolue des citoyens et des corps intermédiaires (non promulgation, référendum...) comment peut-on l'interpréter autrement que comme une totale indifférence au risque d'embrasement des mécontentements ?
A moins, donc, que ce ne soit ce qu'il souhaite et que ce que l'on observe fasse partie de son « projeeet »! On peut noter que l'équipe ministérielle ne cesse d'apporter, depuis quelques jours, de l'huile sur le feu, niant les violences policières et la politique de répression des manifestations spontanées. Quand un affrontement a lieu et qu'il y a des blessés chez les manifestants, aucun de ces responsables ne prononce un seul mot de compassion pour les victimes, les manifestants et les opposants de gauche étant toujours qualifiés d'"extrêmement violents", même à l'Assemblée, tandis que les forces de l'ordre ont toujours droit à leur couplet laudatif. Quant aux responsabilités de cette violence, elles sont toujours renvoyées à la NUPES ou à LFI, qui ne l'ont jamais prônée. Là aussi, c'est trop pratique d'accuser son adversaire de ses erreurs.
Le monde entier observe ce qui se passe en France : le capitalisme mondialisé scrute la situation pour voir si le peuple cède et accepte la fin définitive de notre état social, tandis que les citoyens du monde, eux, espèrent que nous allons tenir et leur permettre de socialiser davantage leurs propres régimes.
Le monde entier observe, mais nous, « Macron, on te voit ».
Je rajoute que si, vraiment, la radicalisation de l'exécutif avait d'autres buts que la prétendue résignation souhaitée des citoyens, ce serait jouer là un jeu extrêmement dangereux. En effet, qui peut dire jusqu'où va aller la colère d'un peuple ?
J'espère donc me tromper, et que notre président va revenir à plus de raison et écouter le peuple en refusant de promulguer la loi controversée de recul d'âge de la retraite. B.Netanyahou vient de reculer en Israël devant l'opposition de son peuple à une loi portant atteinte à la démocratie. Si un dirigeant gouvernant plus à droite que jamais dans son pays recule devant la pression de la rue, qu'est-ce qui empêcherait celui qui dirige la France actuellement de le faire?
PS: j'avais déjà publié ce texte que j'ai légèrement remanié et amputé d'une partie que je traiterai plus tard. Je présente mes excuses au commentateur de ma précédente version (Patrick Rodel).