Depuis des années on assiste à une droitisation de la politique menée par les gouvernants successifs, de droite comme de « gauche de gouvernement ». Les avantages sociaux sont grignotés peu à peu, la réglementation du travail protège de moins en moins les travailleurs, le droit à la retraite se transforme en droit éventuel de survivre un jour à son travail, l'enseignement se divise de plus en plus en une école de base pour les pauvres et les classes populaires et un enseignement offrant de bonnes perspectives professionnelles aux enfants des riches (Parcoursup mon amour...), l’État traite de plus en plus mal les opposants et adopte une attitude indigne vis-à-vis de malheureux en danger sur les mers, etc...
Faut-il dire merci au gouvernement actuel ?
Franchement, oui. Trois fois oui ! Pourquoi ? Parce que ce que l'activisme droitier de N Sarkozy et le "bonhommisme normal" de F Hollande, qui n'a pas gouverné à gauche, n'ont pas pu faire, E Macron est en train de le réussir.
Je veux dire réveiller la conscience de gauche des citoyens, et leur sens de la justice sociale.
Il n'entend pas, Lui, du haut de son Olympe, les grognements de ceux qui sortent de leur léthargie. Il croit que, parce que cela a passé jusque-là, cela va passer encore. Qu'il continue de le croire, franchement, cela me ravit. En cela, nous sommes aidés par le fait que ce Président-là n'a jamais eu de mandat électif avant de gouverner la France (ce qui aurait pu mettre la puce à l'oreille de ceux qui ont voté pour ses députés aux législatives : donner le pouvoir absolu à un débutant c'est, au minimum, une erreur, au pire, une faute grave). Donc, cette « naïveté » vis-à-vis de l'exercice du pouvoir, est niée par E Macron parce qu'il a réussi la plupart des choses qu'il a entreprises en usant de ses deux atouts majeurs : sa capacité de séduction (en surface) et une certaine indifférence à autrui (en profondeur). Voire une absence de scrupules ou, en tout cas, d'autocritique.
Gouverner, c'est avancer avec un projet, en tenant compte de nombreux facteurs, dont le moindre n'est pas l'accord de ses administrés. E Macron a un projet, qui est celui de la finance internationale, même s'il ne le dit pas. Mais notre Président débutant sait convaincre : il n'y a qu'à voir comment N Hulot, qui n'est pas un débutant, lui, craignait d'annoncer sa démission à son Président, de peur de se laisser convaincre d'y renoncer (!). C'est probablement ce talent de persuasion qui a apporté à ce dernier l'avancée professionnelle fulgurante qu'on lui connaît, notamment à la banque Rothschild. Certains (cf la négociation sur le rachat du Monde) avouent même s'être laissés prendre à cette séduction.
Ainsi, E Macron, ayant convaincu les citoyens de voter pour un projet tellement creux que tout-le-monde, ou presque, y trouvait ce qu'il attendait, est certain d'avoir trouvé la martingale gagnante. La question de l'impact réel et affectif sur ses administrés de ses actions ne semble se poser pour lui que dans la mesure où cela risquerait de freiner sa marche en avant. Il n'a jamais eu à tenir compte de l'avis de personnes qui ont voté pour lui : il ne sait pas que c'est la condition indispensable de l'exercice du pouvoir, même en régime tyrannique où c'est la peur qui remplace la satisfaction pour consentir à l'exercice du pouvoir du chef...
Donc, comme on le dit d'ailleurs dans les milieux du management politique, sachant qu'il est efficace de présenter des mesures nuisibles au peuple, pour après reculer sur des broutilles, ce qui permet de faire passer l'essentiel des mesures impopulaires, notre Président continue sur cette lancée. D'où le « Je ne changerai pas de cap ». D'autant plus que les mêmes experts en comm' politique énoncent aussi qu'il faut que chaque réforme soit suivie très vite d'une autre, afin que les oppositions n'aient pas le temps de se mobiliser (cela se constate aisément si l'on suit le calendrier du "maître des horloges").
Oui mais voilà, un peuple, ce n'est pas un groupe de salariés. Les salariés ont peur de perdre leur emploi, surtout avec le spectre du chômage savamment entretenu. Les citoyens, individuellement, en ont peur aussi, comme ils ont peur du terrorisme et de la guerre civile, et la peur a joué dans l'inhibition globale et la passivité des citoyens depuis des années. Mais ils ont peur aussi des conséquences des décisions du gouvernement. Et ce n'est pas une peur fantasmée, une angoisse sans objet, c'est une peur réelle, basée sur des constatations précises : la perte de leur pouvoir d'achat pour les retraités, la diminution des prestations sociales pour ceux qui en survivent, l'impossibilité d'essayer de réussir dans la filière de leur choix pour les bacheliers (et pourtant, combien d'élèves ont fait des études supérieures brillantes après des études secondaires médiocres?), la catastrophe annoncée du prélèvement à la source (alors qu'il suffisait de rendre obligatoire la mensualisation...)...
On peut mentir longtemps à peu de personnes, ou pas longtemps à un grand nombre de personnes, mais pas longtemps à un grand nombre de personnes. Les cadeaux du gouvernement vont aux entreprises et aux actionnaires, et ce sont les citoyens les plus en difficulté qui vont trinquer. Le roi est nu : il est d'une droite réactionnaire qui valorise les "premiers de cordée" et considère comme des perdants tous les autres, ceux qui ne sont rien : des vaches à lait croisées de moutons, ou de pigeons... Et cela se voit de plus en plus.
Donc, qu'il continue, ce Chef de l’État qui gouverne dans une collusion quasi-totale entre l’exécutif et le législatif, qu'il continue à bafouer la démocratie à laquelle, nous français, nous sommes si attachés ; et que, sous ses sourires, il laisse apparaître la brutalité dont il est capable et son autoritarisme, son goût pour une conception verticale du pouvoir.
Je sens que les citoyens se réveillent, que le peuple s'ébroue, il se sent encore un peu sonné, ayant du mal à admettre qu'il s'est fait avoir et a mis une équipe au pouvoir qui fait du sous-Trump, l'exagération verbale en moins, la distorsion entre les discours et les actes en plus.
Après, je fais confiance à mes compatriotes. Ils sauront, je crois, remercier qui de droit.
Comment vont-ils s'y prendre ? L'histoire nous le dira.
Alors, merci, finalement, au gouvernement !