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Tout commence dans le décor sobre et épuré du cabinet d’un éminent psychiatre de Los-Angeles. En tête à tête, un couple discute de son avenir. Lui, c’est le docteur Roy Flemming (imperturbable Pierre Azéma). Elle, c’est sa toute nouvelle maîtresse (Karine Belly), une comédienne fragile et naïve. Tous deux se préparent à l’irréparable : l’assassinat de l’épouse gênante. Point par point, ils déroulent un plan machiavélique qui devrait permettre le crime parfait.
Si tout se déroule sans accroc majeur, c’est oublier la ténacité de l’inspecteur en charge de l’affaire : le fameux inspecteur Columbo (extraordinaire Martin Lamotte). La vue basse, l’imper usé, ce dernier semble totalement à côté de ses pompes. Et pourtant, véritable fouineur, il explore toutes les pistes, il exploite les moindres indices. Malgré son air naïf, il scrute chaque réaction, il instille le doute, il cherche la faille, le petit détail qui permettra de confondre l’assassin. Irritant, il use et abuse de ses irruptions répétitives et intempestives. Avec malice et ingéniosité, il joue de son apparente balourdise pour resserrer, à chaque intervention, la pression sur le coupable, le forçant à commettre l’erreur fatidique, le faux pas qui le perdra.
En décidant d’adapter au théâtre cette série policière « culte », Didier Caron a pris le parti de puiser dans les origines mêmes de Columbo. En effet, il s’est intéressé à la pièce qui a servi de base au premier épisode de cette saga télévisuelle comptant plus de 69 épisodes répartis en 18 saisons. Loin de vouloir réinventer le mythe, il s’est attaché, avec une précision de métronome, à redonner vie au fameux inspecteur jusque dans les moindres détails. Ainsi, tout y est évoqué : sa femme, son chien vieillissant, son cigare au bec et son antique et décatie Peugeot 403. Le rythme est lent, il est vrai, mais si proche à celui de la série, il permet ainsi d’installer les personnages, de dérouler les fils de l’intrigue et de mettre en place le piège infernal qui permettra l’arrestation du meurtrier.
Tout la magie de cette pièce est là, dans cette fidélité à l’œuvre originelle. Tout est fait pour nous plonger dans nos souvenirs, dans une sorte d’atmosphère nostalgique et intemporelle, dans une époque révolue où l’on prenait le temps d’écouter la rhétorique fantasque (et un brin tirée par les cheveux !…) de ce lieutenant, fin limier à l’apparence déconcertante. Martin Lamotte ne s’y trompe pas. Il est Columbo, non point dans l’imitation, mais bien dans l’attitude, dans la façon d’être et de faire. Avec beaucoup d’ingéniosité, il a su réinventer le personnage sans en dénaturer les caractéristiques principales. Face à lui, Pierre Azéma impose sa haute et imposante stature. Jouant de son charme, de ses yeux bleus profonds et de sa voix chaude, il dissimule à merveille la froideur calculatrice de l’individu qu’il incarne. Ainsi, le duo « policier – assassin » fonctionne à merveille… Un beau moment en perspective pour les nostalgiques de la série !
Olivier Frégaville-Gratian d'Amore pour l'Œil d'Olivier.
Columbo, meurtre sous prescription de William Link et de Richard Levinson. Théâtre Michel. jusqu’au 26 février 2017, du mardi au samedi à 21h00, le samedi à 17h00 et le dimanche 16h30.