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Billet de blog 5 février 2017

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31, le « Musical » à rebours plein de tendresse et de folie

Certaines amitiés sont pour la vie. Elles traversent les frontières, le temps et les désaccords. Elles transcendent les sentiments et les liens entre les êtres. Mais comment naissent-elles ? C’est tout le sujet de cette très jolie et très amusante comédie (musicale) mise en scène avec beaucoup de finesse et de retenue par Virginie Lemoine. Actuellement, reprise au studio des Champs-elysées.

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Illustration 1
31, mise en scène par Virginie Lemoine vous réchauffe le cœur en ces frimais hivernaux au Studio des Champs-Elysées. © Anthony Klein

Dans un décor simple et modulable, imaginé par Grégoire Lemoine, où le rouge et le blanc dominent, 4 amis, deux femmes, deux hommes, se préparent à fêter le réveillon du 31 décembre 1999. On est à quelques heures du fameux bug de l’an 2000. L’ambiance est électrique. Des tensions sous jacentes apparaissent par piques. Amis depuis des années, ils se connaissent trop bien. Ils savent toucher là où ça fait mal, mais aussi apporter le baume humain nécessaire, qui guérit les blessures. Comme dans le jeu du chat et de la souris, le quatuor se cherche, se trouve, s’étreint, s’excite et se blesse. Les répliques s’enchaînent avec frénésie. Elles font mouche. Parfois, elles soulagent et font rire. Parfois elles titillent et agacent. Malgré tout, entre ces quatre êtres, un amour profond, sincère, indéfinissable, rayonne et unie. Minuit approche, l’heure des règlements de compte a sonné. Une dispute éclate, violente. Elle pourrait remettre en cause 20 ans d’amitié.

Afin de nous aider à comprendre ce qui se trame sous nos yeux, Gaétan Borg et Stéphane Laporte ont l’idée ingénieuse d’une narration à rebours et de remontrer le fil du temps. Ainsi, année après année, on revit leurs retrouvailles annuelles pour ce réveillon qui n’en est pas un, jusqu’à celui de 1979 qui lia leur destin. Emaillée de quelques moments de vie, qui permettent de mieux appréhender les rapports humains qui unissent ces quatre êtres, l’écriture vive et touchante des deux auteurs nous embarque dans une enquête délirante au cœur d’une relation humaine où les liens sont plus forts que ceux du sang. S’attachant sur chacun des quatre personnages, ils mêlent avec virtuosité émotion et humour. Les chansons, qui égrènent le spectacle, mises en musique par l’excellent Stéphane Corbin, donnent à l’ensemble une jolie tonalité pleine de couleurs, de joie et de tendresse. Si certaines sont des créations, d’autres sont issues du très bel album du collectif des Funambules contre l’homophobie. Ce dernier présent sur scène, installé devant un piano à queue, nous envoûte avec son doigté virtuose.

Soulignant la force d’une amitié indéfectible faite d’amour et de truculence, la sobre et élégante mise en scène de Virginie Lemoine met en lumière l’humanité des sentiments et la vibrance de cette histoire de cœurs purs. En nous plongeant dans un monde perdu, la comédienne rappelle à nos bons souvenirs des objets depuis longtemps disparus qui ont fait les beaux jours de nos adolescences de jeunes quarantenaires, comme le minitel. Elle s’appuie aussi sur quatre comédiens particulièrement en verve qui se glisse avec beaucoup de tendresse dans la peau de leur personnage. Valérie Zaccomer en mère poule hystérique, amuse et touche. Exubérante, elle séduit par sa fougue. Carole Deffit, petite sœur « vénére » en guerre contre le monde, éblouit par sa vitalité. Alexandre Faitrouni, le cadet sensible, fascine par son enthousiasme débordant, son jeu clownesque touchant et la profondeur de ses émotions. Quant au ténébreux Fabian Richard, il charme pas sa présence lumineuse. Incapable d’exprimer ses sentiments, fragile derrière son image de macho, il donne à son personnage une belle intensité.

Emporté dans ce tourbillon passionnel, le public, fasciné par cette jolie fable musicale, s’amuse de ces tranches de vie, rit aux éclats avant de verser sa petite larme dans un final magique mais peut être un peu trop timide, convenu …

Olivier Frégaville-Gratian d'Amore pour l'Œil d'Olivier

31 de Gaétan Borg et Stéphane Laporte. Studio des Champs-Elysées. Jusqu'au 30 juillet 2017. 

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