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Billet de blog 18 juillet 2017

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L’affamée, un voyage aux confins de la folie

C’est un cri d’une violence inouïe, une douleur intolérable, une déchirure du cœur d’une rare férocité. Ce sont les sentiments vécus, ressentis par une femme aux passions sans bornes. C’est l’amour démesuré, irrationnel, que Violette Leduc porte à Simone de Beauvoir. C’est tout cela qui anime sur scène le corps de Catherine Decastel. En transe, elle incarne l’écrivaine jusqu’à la folie… Intense !

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Illustration 1
Dans un solo frénétique, Catherine Decastel est L’Affamée à l’espace Roseau © Jerôme Bessout © Jérôme Bessout

Il y a des destins uniques, extraordinaires. Celui de Violette Leduc l’est tout particulièrement. Femme auteure, elle est connue pour sa verve féministe et pour l’amour irrationnel et sans retour qu’elle porte à Simone de Beauvoir. De rage et de douleur, elle a couché sur le papier ses pensées les plus sombres et la violence des sentiments qui ont abîmé son cœur et déchiré son âme. L’Affamée, qui fit scandale à sa sortie, avant d’être reconnu comme l’un des plus beaux écrits sur l’amour saphiste, est né de ce processus libératoire.

e texte brûlant, empli d’onirisme, de mysticisme et de folie sert de matrice à la mise en scène de la comédienne Catherine Decastel. Son travail entre théâtre et ballet explore les rapports humains, leurs violences, leurs douceurs et leurs différences. En s’imprégnant des écrits auto-fictionnels de Violette Leduc, elle signe un spectacle profond et poétique où les gestes et les mouvements retranscrivent parfaitement les affres de la passion dévorante, d’un amour à sens unique. On est saisi par cette violence, cette férocité, ce besoin de reconnaissance et d’amour.

Dans un décor minimaliste, noir, Catherine Decastel joue des ombres et lumières. Un mannequin froid, impassible, incarne Simone de Beauvoir. C’est autour de cette compagne de tissu que la comédienne se lance dans une danse frénétique, brutale, salvatrice. Elle se maltraite. Elle se violente. Les troubles de l’âme à fleur de peau transpirent de ce corps en transe et touchent intensément  la corde sensible des spectateurs.

Si l’ensemble fascine, on peut être facilement décontenancé par l’étrange scène où le corps de la comédienne devient saccade, où les mots se désarticulent dans sa bouche, se détachent. La folie du personnage, paniqué à l’idée de retrouver l’objet de son amour hospitalisé, se révèle trop appuyée. Ce n’est qu’un passage qu’on oublie aisément, quand enfin, dans une dernière danse, Violette Leduc apprend que Simone de Beauvoir s’intéresse à son travail et accepte de lire son ouvrage. Le choc passé, le corps de Catherine Decastel s’enflamme et devient émotion pure. Compulsivement, elle distille sur le sol, à la craie, certaines phrases marquantes de son livre jusqu’à épuisement, les ponctue d’un « Elle lit » salutaire… Saisissez sans attendre cet onirique voyage qui mène à l‘aliénation des sentiments et laissez-vous embarquer aux frontières de la conscience…

Olivier Frégaville-Gratian d'Amore pour l'Œil d'Olivier.

L’affamée de Violette Leduc
Festival d'Avignon le OFF
Théâtre de l'Atelier 44

44, rue Thiers
84000 Avignon
jusqu’au 30 juillet 2017
tous les jours à 14h relâche le 18 juillet 2017
durée 1h00

Mise en scène de Catherine Decastel assistée d’Armelle Bossière
Chorégraphie de Fabrice Taraud
Scénographie de Léa Germain
Création lumières de Christine Mame
avec Catherine Decastel

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