Loïc Céry
Directeur du CIEEG (Centre international d'études Édouard Glissant) et du pôle numérique à l'Institut du Tout-Monde, Directeur des revues « La nouvelle anabase » et « Les Cahiers du Tout-Monde ». VOIR SITE PERSONNEL (fonctions-références-actualités) : www.loiccery.com
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Billet de blog 31 oct. 2022

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Rachmaninov par Martha Argerich, grande officiante

À propos de la version habitée du Concerto pour piano N°3 de Rachmaninov par Martha Argerich et Riccardo Chailly en 1982.

Loïc Céry
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Illustration 1

Tout comme Evgeny Kissin, Je ne crois pas du tout qu'il soit possible de décrire ce à quoi parvient Martha Argerich, qui n'a cessé de confirmer depuis le début de sa carrière qu'elle n'était pas seulement le « phénomène » dont on a si souvent parlé, mais qu'elle parvenait à communiquer un souffle indéfinissable qui se retrouve dans ses interprétations. Au-delà même de la virtuosité étourdissante, de l'énergie proverbiale de ses accents (souvent martelés), de la poésie de son phrasé, demeure dans certains enregistrements de cette pianiste un ineffable qui vous saisit immédiatement, à l'image, par excellence, de cet enregistrement « live » déjà mythique du concerto N°3 de Rachmaninov en décembre 1982, avec l'orchestre de la Radio de Berlin (RSO) dirigé par Riccardo Chailly.

Tout ce qu'on pourra dire là-dessus sera forcément impropre, il vaut peut-être mieux se taire. Car c'est un envoûtement que réussit Martha Argerich ici : seule la MAGIE d'une incantation propre à la musique de Rachmaninov peut rendre compte de ce à quoi parvient la pianiste ici. Car tout y est superlatif : tempo, envolées brusques, accélérations vertigineuses, vigueur, impulsion du touché... Pour le concerto qui est considéré comme le cauchemar de tous les pianistes étant donné sa difficulté technique, on a affaire ici à une musicienne qui se joue de tout obstacle potentiel à l'exposé vivant de quelque chose de tellurique, mais aussi d'aérien : tout le sens profond de la musique de Rachmaninov se situe dans cette capacité rare à distribuer une émotion alliée à une énergie animale. On considérait que Vladimir Horowitz avait donné à ce troisième de Rachmaninov son point d'ébullition achevé, et puis vint la force décuplée de la pianiste argentine à la jeunesse surdouée, mais surtout à la longévité et à l'activité hors du commun. Pour elle qui se bat depuis plusieurs années contre un cancer récalcitrant qui l'avait conduite à annuler tant de concerts, retrouver la base de son propre jeu a peut-être été la plus puissante thérapie.

En plus, un orchestre dirigé par un Riccardo Chailly des débuts, à la vivacité pleinement maîtrisée. Le luxe total pour ce chef-d'œuvre, avec Rachmaninov invoqué comme dans les grandes cérémonies menées par les plus fervents officiants. Martha Argerich, qui appartient déjà à la légende des plus grands pianistes de tous les temps, gravait sur le vif lors de ce concert de Berlin de 1982 la version légendaire du 3e concerto de Rachmaninov.

Rachmaninoff Piano Concerto No. 3, Argerich HQ COMPLETE © mmoynan

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