Hélène Mouchard-Zay, fille cadette de Jean Zay, ministre de l'Education nationale du Front Populaire, était l'invitée de l'émission À voix nue sur France Culture. Elle y évoque le souvenir familial laissé par son père, les combats aussi vains que possible menés par sa mère afin d'obtenir justice pour son mari devant les tribunaux de la Libération, et l'objet de ce billet, son propre combat pour faire connaître les deux camps du Loiret à 50 kilomètres d'Orléans, où furent internés les 4000 enfants et 8000 femmes victimes de la rafle du Vel D'hiv de juillet 1942 à Paris.
Jean Zay, socialiste, fait partie de ces hommes d'Etat, comme Léon Blum, socialiste, et Georges Mandel, plutôt conservateur, qui ont fait l'honneur de la Troisième République. Comme, plus tard, Pierre Mendes France sous la quatrième République. Ils étaient Juifs, et la cible des antisémites de l'Extrême droite. Jean Zay et Georges Mandel furent assassinés par des miliciens – des Français – à la demande des Allemands en 1944.
Ces enfants et ces femmes furent internés à Pithiviers et Beaune-la-Rolande, enfermés dans des baraquements sous la surveillance des gardes mobiles de Vichy, subissant les souffrances de la privation de liberté, loin des pères, avant d'être jetés dans des wagons à destination de Drancy d'où, mélangés à quelques hommes, ils furent expédiés sur le camp d'extermination d'Auschwitz Birkenau pour y être aussitôt gazés.
Dans son récit, Madame Mouchard-Zay revient sur le long travail de mémoire qu'elle entreprit avec une équipe dédiée pour recueillir, quand il est encore temps, tous les témoignages relatifs à ces enfants et ces femmes exterminés dans ces conditions, et laissés trop longtemps dans l'ignorance de la majorité des Français.
Quoi de plus poignant dans l'évocation des atrocités, que la découverte par Madame Mouchard-Zay de la photo de la petite Aline, au regard si grave et interrogateur, née le 31 août 1939 et gazée le 31 août 1942 ? Il vient aussitôt à l'esprit ces mots de Jean-Marie Le Pen à la télévision, dans les années 1990, quand il déclara que les chambres à gaz n'étaient qu'un point de détail de l'histoire de la Deuxième Guerre mondiale, comme le rappelle la fille de Jean Zay.
Comment accepter aujourd'hui que la fille de Jean-Marie Le Pen porte en étendard son nom de Le Pen pour prétendre accéder à l'Elysée, avec le soutien de ces Français qui ont refusé de se pencher sur ce passé de la collaboration, où la France de Vichy s'est rendue complice de l'Allemagne nazie pour exterminer les Juifs ?
Aline est le symbole de ces 4000 enfants, dont les plus petits n'avaient que 3 ans et gazés, oui gazés, pour être nés Juifs. Face à cette famille Le Pen, c'est à nous de dire que nous sommes tous des Juifs.
Remercions Madame Mouchard-Zay d'avoir conduit ce combat d'une vie sur une période des plus sombres de l'histoire de la France, où la patrie des droits de l'homme a laissé partir des enfants pour Auschwitz Birkenau.