Nuit, silence et solitude : pour un espace de vie
« Si je me fais sauvage et muette quand je ne suis pas heureuse, c’est que je trouve mes ressources dans le silence et l’insociabilité. »
Colette
Lettres au Petit Corsaire (1963)
« Souffrir de la solitude, c’est là aussi une objection. Pour ma part je n’ai jamais souffert que de la multitude. »
Friedrich Nietzsche – Ecce Homo (1888)
" Ô Nuit obscure, est ce qu'en toi aussi, battrait un cœur humain ? "
Novalis, Hymnes à la Nuit (1800)
La nuit, espace intense, espace sauvage, espace d’effroi aussi, pour beaucoup. Pour ma part, j’aime la nuit pour la sensation de liberté, d’intense liberté qu’elle offre, l’impression de grande solitude aussi, et le bienheureux silence qu’elle offre à mes oreilles.
L’été, quand je suis à la campagne, je me lève très tôt, vers 3 ou 4h du matin, j’ouvre la fenêtre et installe mon fauteuil face à la nuit étoilée, et je reste ainsi plusieurs heures, dans le calme et le recueillement.
Et là, quand tout est tranquille et que tout le monde dort, je me sens enfin apaisée et heureuse, enfin délivrée de tout soucis et de toute crainte. Je me sens libre aussi, profondément libre, enfin débarrassée tout ce commerce humain, de toute cette agitation et de tout ce vacarme diurne qui me pèse profondément. Dans ces heures nocturnes, il n’y a que la nature et moi, et l’attente de l’aube et du lever de soleil, dans la seule compagnie de fleurs et arbres du jardin, ainsi que des oiseaux de nuit.
Face à ce ciel constellé de milliers d’étoiles, à ce silence nocturne, à peine troublé de temps en temps par le hululement d’une chouette au loin, je me sens enfin moi- même, infiniment reliée à tout l’ensemble du vivant, dont je ne suis qu’un maillon. Et tandis que j’assiste au lever du jour, qui se fait peu à peu, mon âme se remplit de joie et de bonheur intense, joie d’assister, une fois encore, à la renaissance de la nature et du soleil, joie de participer à ce cycle naturel et cosmique que sont l’aube et l’aurore, joie d’entendre les oiseaux saluant, comme moi, l’arrivée de l’astre solaire.
Et alors, je me sens faire profondément partie de la communauté des vivants, je ne suis plus une monade, errant triste et solitaire dans un ciel déserté de vie, je suis au contraire profondément vivante et en communion avec toutes les espèces vivantes, avec l’ensemble du cosmos. Mon âme n’est plus limitée à mon corps propre, je fais corps avec l’immensité de la Création, je suis le vent qui souffle, je suis l’étoile au firmament, je suis l’oiseau qui rend grâce au soleil naissant, je suis vivante, infiniment et intensément vivante.
C’est tout cela que symbolise et que représente la nuit pour moi, promesse de vie et de lumière, joie et bonheur de vivre, plaisir de jouir, pour une fois encore, de l’espace, du silence et de la solitude.