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Encore une idée lumineuse venue d’en haut. Pour faire des économies, François Bayrou propose de supprimer deux jours fériés. Voilà. Deux petits jours de repos dans l’année, arrachés à celles et ceux qui n’ont déjà pas grand-chose. Pas touche aux grandes fortunes, aux dividendes, aux avantages fiscaux. Non. Ce sont les jours fériés qu’on va ponctionner. Les jours de famille, les ponts respirables, les week-ends rallongés à savourer sans courir. Ce sont eux, les nouveaux coupables du déficit public.
Il faut dire que c’est plus simple. Plus discret. Plus silencieux. On rogne là où ça râle, mais où ça casse rarement. On cible ceux qui n’ont ni tribune, ni lobby. On ne touche surtout pas aux milliards planqués, aux évasions fiscales, aux niches qui coûtent plus cher que tous les jours fériés réunis. La logique est bien rodée : quand il faut "faire des efforts", ce sont toujours les mêmes qui s’y collent. Le salarié au SMIC, l’infirmière de nuit, l’instit en fin de course, le retraité modeste. Ceux pour qui un jour de repos, ce n’est pas un luxe, mais un souffle.
Pas un euro de moins pour les puissants
Et pendant ce temps-là, dans les palais de la République, les ministres touchent jusqu’à 10 000 euros brut par mois. Ils bénéficient de chauffeurs, de logements de fonction, de frais assumés par l’État. Sans parler des cumuls, des réseaux, des postes bien placés en sortie de mandat. Qui parle de faire des économies là-dedans ?
Personne. L’austérité, c’est toujours pour les autres.
Supprimer des jours fériés n’est pas une mesure technique. C’est un symbole. Celui d’un modèle de société qui ne sait plus où sont ses priorités. Celui d’un pouvoir déconnecté, qui prétend réformer mais ne fait que racler les fonds de tiroir sur le dos des plus précaires. Et puis il y a cette idée sous-jacente, insidieuse, presque gênante : comme si le travail était la seule valeur. Comme si le repos était suspect. Comme s’il fallait mériter chaque minute d’oisiveté, comme s’il n’était plus légitime de ralentir. Travailler plus, pour produire plus, pour gagner quoi, au juste ? Une place dans un monde toujours plus injuste ?
On pourrait, à la place, parler de justice fiscale, de taxation des super-profits, de fin des privilèges politiques.
On pourrait. Mais non.
On préfère enlever deux jours à la "France d’en bas". Alors non, ce n’est pas un détail. Ce n’est pas symbolique. C’est une gifle. Une de plus. Et franchement, on commence à en avoir la joue rouge.