Historien et politologue, patriote progressiste et mondialiste originaire du Congo-Kinshasa ; Agrégé de l'enseignement secondaire supérieur, vit à Genève (Suisse)
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Fayulu et Lamuka doivent-ils renoncer à la poursuite de leur campagne électorale ?
La campagne se résume à une polarisation des forces, selon une dialectique entre l’attrait vers Soldat du peuple et la répulsion des forces du statu quo. Les insultes et violences servent à décourager la mobilisation par des adversaires incapables de rivaliser sur terrain. Dès lors que l’essentiel du message a été distillé et adopté par sa cible, pourquoi exposer les Congolais à la boucherie ?
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Fayulu et Lamuka doivent-ils renoncer à la poursuite de la campagne électorale classique ?
La base réelle a choisi son camp et l’Est du Congo en a été la première illustration
Pour ceux qui sont en mesure d’en lire dès maintenant les tendances profondes, les débuts de la campagne électorale actuellement en cours en république à démocratiser du Congo (RDC) ont déjà révélé quelques caractéristiques à même de marquer l’histoire du pays. Les plus perspicaces en dénombreront davantage ; mais, à ma première et très superficielle appréciation, au moins trois tendances s’imposent parmi les plus apparentes :
- l’héroïsme incontestable, assidu et inébranlable du « Soldat du peuple » manifestement prêt, à l’instar de Patrice Lumumba, à affronter tous les dangers et à relever tous les défis ;
- le courage manifeste et exceptionnel de l’intraitable Directrice de Campagne du « Soldat du peuple » qui ne s’est, jusqu’alors, jamais écartée de sa posture de vaillante combattante et de sa détermination, qui ont poussé les observateurs à la surnommer, avec vive émotion et chaleureuse affection, la « Jeanne d'Arc » congolaise ;
- la banalisation par « Lamuka » de la scission de Genève, jusqu’à l’oubli, en ralliant à ses thèses les principales forces vives du pays et en poussant plus loin son avantage sur terrain par une mobilisation patriotique et citoyenne de grande proximité ; qui ne laisse plus personne indifférente et pousse dorénavant tout un chacun au dilemme de se positionner dans l’un de deux camps entre pro et contre candidat commun de l’opposition congolaise.
L’évolution de la campagne électorale réelle sur le terrain et dans les médias s’avère encore d’une cocasserie fort instructive. S’appuyant sur de pseudos études d’opinions, très discutables, certains médias évoquent le mano a mano serré ; là où les mobilisations populaires à l’Est du pays ont déjà révélé, de manière très nette, qui est le champion. De même, alors que ce sont les meetings du candidat commun de l’opposition congolaise qui sont les seuls confrontés aux tracasseries administratives, aux violences innommables et aux assassinats opérés par les forces officielles de sécurité, pourtant censées les sécuriser, ce sont, paradoxalement, les candidats de la dissidence, jouissant de l’encadrement bienveillant de la police nationale, qui annoncent, de manière confuse, l’interruption abrupte - pour cause d'insécurité - de leur campagne dans les zones jadis proclamées comme leur berceau et à considérer comme leur déjà acquises. Néanmoins, les réalités de terrain ont démontré qu'ils y ont été confrontés à des accueils populaires très mitigés, voire parfois à de véritables froides répulsions. Des pirouettes pour camoufler les déboires des certains face aux réalités de terrain ne font que commencer. Vous avez dit machiavélisme ! Rappelons qu'au plus bas de sa popularité, François Mitterrand ne s'offusqua pas à simuler, en octobre 1959, l’« attentat de l'Observatoire » pour se faire de la publicité et dans l'espoir de regagner les faveurs de l'opinion publique.
Rejetée sur la défensive, la dissidence de Genève en quête de stratégie de survie
En effet, même si la majorité des Congolais est acquise à l’idéal du changement, au sens général du terme, les divergences d’approche entre les plates-formes électorales quant à la manière de le réaliser opèrent, dans un élan de jugement de valeur, un nouveau reclassement des forces en présence. Confronté à un rejet massif affligeant sur le terrain, le Font Commun des Corrompus (FCC) navigue à vue en se forgeant un credo surréaliste sur le changement tout en s’efforçant de défendre un bilan, reconnu par tous comme catastrophique. Rejetés sur la défensive depuis leur parjure de Genève, les concordataires de Nairobi ont du mal à convaincre de conquérir le changement en « allant aux élections avec ou sans la machine à voler ! » et sans nettoyage préalable du fichier électoral corrompu. Alors que, toujours bien regimbée sur l’idéal de l’union de l’opposition comme premier facteur de conquête du changement, plus précise sur ses exigences dans cette optique et exaltée par une solide constance sur les conditionnalités posées à la tenue d’un scrutin crédible, la plate-forme électorale commune de l’opposition - « Lamuka » - jouit d’emblée d’une adhésion toujours plus extensible à ses thèses. Aussi, la campagne électorale se résume-t-elle désormais dans une polarisation des forces, selon une dialectique entre l’attrait et la mobilisation populaire vers le « Soldat du peuple » et la répulsion des forces du statu quo. D’une part, les attaques ad hominen et les insultes des concordataires de Nairobi et, d’autre part, les interdictions, les violences et le recours à des armes meurtrières pour assassiner, asphyxier et décourager la mobilisation en faveur de la campagne de « Lamuka », répondent à une logique de survie pour des adversaires, voire des ennemis, incapables de rivaliser au niveau de la mobilisation populaire. Aussi, dès lors que l’essentiel du message de campagne électoral a déjà été bien distillé et adopté par son public cible, pourquoi faut-il continuer à exposer les Congolais à la boucherie de la soldatesque de la Kanambie et risquer si tôt la vie du « Soldat du peuple » ?
Le Congo de la dignité et du progrès ne saurait se reconquérir par les urnes !
Malgré des entraves, des blocages, des intimidations et des assassinats, le « Soldat du peuple » n’a eu besoin que de quelques jours pour infirmer, démonstrations éclatantes à l’appui dans des zones présumées lui être hostiles, les thèses hasardeuses de poids politique ou d’assise populaire. On devine aisément comment cela va se poursuivre, en s’amplifiant, ailleurs, à l'Ouest du pays notamment. Mais, les malheurs, qui se sont déjà abattus sur la base du candidat commun de l’opposition congolaise à Kindu, à Lubumbashi ou encore à Kalemie nous ont fait très mal et sont déjà assez éloquents et instructifs pour appeler, voire contraindre, à une révision des stratégies de campagne. Faut-il prévenir et régir dès maintenant nos forces, ou attendre de vivre la décapitation de l’élan favorablement amorcé pour réagir ou gérer après coup la paralysie imposée par les ennemis ? Du reste, si nous ne croyons pas au changement par les élections sous l’impérium de la Kanambie, et encore moins avec la « machine à voler » et le fichier électoral corrompu, pourquoi alors prendre des risques excessifs sur une campagne électorale de témoignage dont le premier but semble déjà amplement atteint ?
Des alternatives à la campagne de terrain sont nombreuses et possibles !
En effet, avec le coltan du Congo, les techniques de communication ont sensiblement évolué. En France, pour la présidentielle de 2017, les candidats ont rivalisé d'imagination pendant la campagne électorale en utilisant de nouveaux outils. Certains, à l’instar de Jean-Luc Mélenchon, ont considérablement élargi leur public en s’appuyant sur l’innovation et le numérique. Mélenchon a notamment usé à satiété la projection de son hologramme ainsi que les réseaux sociaux pour approcher des millions de Français. Avec la vulgarisation du téléphone portable au Congo, malgré la pénurie de l’électricité, la stratégie à la Mélenchon peut s’avérer payante et réduire le risque de la décapitation que court quasi aveuglement « Lamuka ». Par ailleurs, à la projection des hologrammes ainsi qu’au recours aux éventuels échanges sur les réseaux sociaux, il y a la télévision et les médias alternatifs congolais dont l’efficacité n’est plus à démontrer.
La diaspora à la barre !
S’il y a une force vive de la Nation congolaise qui ne cesse de se jeter le plus de lauriers, c’est bien sa diaspora. Point n’est besoin, ici, de minimiser son apport au combat patriotique pour le changement et en faveur de la reconstruction du pays, ni de l’ignorer ; mais d’en appeler à plus d’illustration par des actions concrètes lorsque les difficultés de terrain et la nécessité de franchir des étapes l’exigent. Face à ce régime, qui a pris en otage le peuple congolais et massacre en masse et allègrement la population congolaise, qu’il est supposé protéger, force est de voir la diaspora congolaise, à l’instar des autres communautés lorsqu’elles sont confrontées à pareilles circonstances, se mobiliser pour interpeller la gouvernance de notre nouveau monde intégré à prendre ses responsabilités face à un peuple en danger. Le droit international et la Charte des Nations-Unies fixent les modalités d’une telle intervention. Cela devrait passer par une Force d’imposition de la paix. Nos manifestations marginales, des petits groupes invisibles et inaudibles au plan international, ne suffiraient pas. C’est par des mobilisations de masse, à même de paralyser les grandes capitales où se prennent des décisions sur la marche du monde, sur le Congo notamment. Aujourd’hui, avec des leaders tels que le Nobel Mukwege, Sindika Dokolo, Jean-Pierre Bemba, Moïse Katumbi et j’en passe, il y a lieu d’espérer une mobilisation congolaise à Bruxelles, à New York, à Genève ou à Berlin plus à même de susciter l’intérêt des grands médias internationaux et d’interpeller certaines chancelleries. Qu’attendons-nous pour le faire ? La plupart de nos discours, surtout ceux de nos leaders, sont généralement bien loin de converger avec nos actes. Mais, jusqu’à quand allons-nous nous voiler la face devant certaines réalités ? A quoi servent les comités locaux ou régionaux de « Lamuka » dans nos différents pays d’accueil ?
Eclairage, Chronique de Lwakale Mubengay Bafwa
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