"Je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites, mais je me battrai pour que vous ayez le droit de le dire"
Voltaire
L'interdiction de Dieudonné heurte la démocratie et rompt avec la liberté
Le dérapage de Manuel Valls
Manuel Valls base sa circulaire sur l'arrêt du conseil d'Etat Benjamin de 1933. Cet arrêt a pour fondement “la liberté est la règle, la restriction de police l’exception.”
M. Benjamin devait donner une conférence sur le thème “Deux auteurs comiques : Courteline et Sacha Guitry.” Devant les nombreuses protestations de syndicats d’instituteurs, qui reprochaient au conférencier de les ridiculiser à l’occasion de chacune de ses interventions, le maire de Nevers décida finalement d’interdire la réunion. Cette décision fut annulée par le Conseil d’État au motif que les risques de troubles à l’ordre public allégués par le maire pour interdire cette réunion n’étaient pas tels qu’ils aient pu justifier légalement l’interdiction de cette réunion, alors que la liberté de réunion est garantie par les lois du 30 juin 1881 et du 28 mars 1907.
Depuis lors, le Conseil d’État a toujours maintenu le principe de cette jurisprudence, suivant laquelle le souci du maintien de l’ordre public doit être mis en balance avec le nécessaire respect de la liberté de réunion. Il a appliqué ce principe en faisant preuve de réalisme, s’attachant aux circonstances de l’espèce, au rapport des forces en présence, au climat politique du moment. Cela l’a conduit à exercer, sur les mesures de police en général, un contrôle très poussé, notamment, le Conseil d’État vérifie si la mesure de police prise, non seulement est justifiée par rapport aux circonstances, mais également est adaptée et proportionnée à la menace pesant effectivement sur l’ordre public. Le Conseil d’État exerce donc un véritable contrôle de proportionnalité sur les mesures de police administrative.
1. Quelles sont les circonstances et leur gravité qui justifient cette décision ?
Nul n’est sans savoir que les circonstances en question sont celles de Manuel Valls. Nul n’est sans savoir qu’il reprend la main pour son auto-publicité après une série d’interventions ou d’actes qui entachent son bilan. En parlant de Dieudonné on ne parle plus des problèmes de violence dans la société. En parlant de Dieudonné, on ne parle plus des SMS des agents de la SNCF. En parlant de Dieudonné, on ne parle plus des voitures brulées à la Saint-Sylvestre.
Manuel Valls, a stigmatisé les Roms, il a fait plus d’expulsions que Claude Guéant, il s’est confronté à Taubira sur la récidive et a échoué.
L’affaire Dieudonné lui donne une occasion inespérée de reprendre la main au moment ou François Hollande essaye de reprendre sa communication et son cap.
2. Quel menace de l’ordre public qui nécessite une telle mesure ?
En droit administratif français, l'ordre public est l'état social idéal caractérisé par « le bon ordre, la sécurité, la salubrité et la tranquillité publique. » . Le but de la police administrative est d'en prévenir les troubles. Il existe deux types d'ordre public :
- l'ordre public de direction, qui protège l'intérêt général,
- l'ordre public de protection, qui protège les plus faibles.
Il s’agit donc d’une norme d'ordre public et une règle impérative que les parties ne peuvent écarter.
De quoi a peur la France qui laisse Dieudonné se reproduire ?
A-t-elle peur pour sa sécurité ? Si tel est le cas, est-ce par là un aveu d’échec de la politique menée par Manuel Valls ? La proclamation par lui même de son bilan depuis 18 mois, dit le contraire.
A-t-elle peur pour sa salubrité ? Dieudonné par ses propos, certes condamnable atteint l’hygiène ambiant de nos villes à tel point qu’il faut interdire ses représentations ? Ou n’y a-t-il par la une référence dissimulée aux « odeurs de Chirac » ?
A-t-elle peur pour sa tranquillité publique ? L’humoriste Dieudonné est il par ses propos rendu responsable de troubles de toute nature et de bruits susceptibles de porter atteinte au repos des habitants ?
A-t-il mit la France dans une situation de paix et d'ordre qui existe dans la société en péril ?
La société française, installée dans un confort démocratique, reste tout de même gangrenée par des maux nettement plus graves et qui atteignent l’ordre public social, dans sa jouissance d'une sorte de tranquillité de tendance, connaît le relâchement et vis à vis de la corruption, et les effets de mœurs fort douces
Dieudonné est plus dangereux pour la France qu’un Dassault ou qu’un Tapie? Pauvre France qui le croit !!
3. Dieudonné menace-t-il l’intérêt général ?
Lequel ? Celui du pacte de responsabilité ? Celui du rôle de la France dans le monde ? Celui de la place de la France en Europe ? Celui de la France dans les négociations de libre échange ? Celui de la place des étrangers dans le tissu social ? Celui de la dissuasion nucléaire de la France ?
Rien de tout ça ! La France est un Etat stable, une puissance économique, qui intervient dans les quatre coins de la planète pour ramener la stabilité et l’ordre chez les autres. Serait-elle d’un coup d’un seul devenue vulnérable au point qu’elle oublie que la liberté c’est la règle ? Aurait-elle oublié un fondement de la nation qui est la garantie de cette liberté ?
4. Dieudonné menace-t-il la protection des plus faibles ?
La quenelle représente-t-elle une menace pour les Florange, les Fralibs, les Goodyear, les Abattoirs bretons.. ?
La quenelle de Dieudonné est elle créatrice de pauvreté dans ce pays quand elle touche des millions de personnes public favoris des restos du cœur ?
La quenelle de Dieudonné représente-elle une menace pour les impôts des bas salaires ?
La quenelle de Dieudonné est elle celle de qui vient l’inégalité homme femme dans ce pays ?
5. Dérapage de Manuel VALLS
La circulaire de Manuel Valls dit : "l'interdiction d'un spectacle au titre du pouvoir de police générale du Maire ne saurait ainsi avoir un caractère tout à fait exceptionnel. Elle peut être toutefois justifiée lorsqu'il apparaît que c'est la seule solution pour mettre fin aux troubles à l'ordre public causé par une représentation présentant un ensemble de caractéristiques:
- ..
- Les infractions en cause sont liées à des propos ou à des scènes susceptibles d'affecter le respect du à la dignité de la personne humaine, qui est une composante de l'ordre public. .."
Ce paragraphe est une véritable atteinte aux fondements de liberté du pacte républicain. Manuel Valls demande aux préfets et maires d'interdire sur la base d’une suspicion?
En droit français on ne condamne pas à priori un propos qui n’est pas encore tenu.
Et là il y’a le dérapage flagrant du Ministre.
6. En guise de fin
Manuel Valls s’offre une séquence d’auto-publicité en se défaussant sur les préfets et les Maires.
Madame Taubira a rappelé la citation de Levinas "Penser autrui relève de l'irréductible inquiétude pour l'autre ».
Manuel Valls devrait s’en inspirer !
Car Dieudonné est aussi l’autre, tous les autres envers qui il a la charge de mener une politique de deux poids deux mesures. Les autres sont musulmans stigmatisés par les islamophobes ou les maghrébins et les africains stigmatisés par les racistes de tout bord !
L’intransigeance consiste à refuser des moyens pour rejoindre une fin, quand ils ne sont pas adéquats à cette fin ou de nature étrangère à cette fin » disait Gramsci dans Pourquoi je hais l’indifférence.
On comprend alors que l’intransigeance dans l’action, a comme présupposé naturel et nécessaire la tolérance dans la discussion qui précède la délibération et le jugement.
Qui n’a pas pu se convaincre d’une vérité, qui ne s’est pas libéré d’une fausse image, qui n’a pas été aidé à comprendre la nécessité d’une action, flanchera au premier choc brutal contre ses devoirs et la discipline en souffrira et l’action aboutira à l’échec.
C’est pourquoi, continue à dire Gramsci, qu’il faut faire le rapprochement intransigeant-tolérant, intolérant-transigeant