Cher Malek,
Tu as déclaré lors du débat sur le texte de réforme constitutionnelle ce vendredi 5 Février:
"Énormément de Français, que l'on appelle des bionationaux, partagent à peu près dans les mêmes proportions que les autres Français des opinions sur ce texte..."
Tu as également assuré que "politiquement la situation va se durcir" :
"En réalité, il ne restera que deux positions, vous aurez d'un côté les Républicains et de l'autre côté les identitaires."
Sí je peux être d'accord avec toi sur les propos que tu as tenu auparavant, notamment sur l'ouverture d'un "vrai débat" sur la République, en "allant loin" sur les questions de "lutte contre les ghettos, d'émancipation des femmes ou pour assumer et défendre la laïcité", je demeure stupéfait sur ta prise de position citée plus haut.
"Pour aimer son pays, il faut connaitre son passé” déclare Roschdy Zem, un bi-compatriote(*)
Aimer son pays ne requiert aucune justification. Qui a jamais demandé à quiconque raison de l’amour qu’il porte à sa mère ?
Un pays, c’est une réalité politique, historique, géographique, démographique et culturelle. Cette alchimie constitue une substance charnelle et spirituelle – le corps et l’âme – où s’enracine une mystique. Cette mystique est toujours au-delà et en deçà du réel mais elle porte une promesse qui est l’énergie vitale du pays.
Cette énergie se déploie par amour, ou alors elle meurt.
PAYS de lente construction, pays de nos enracinements, de nos cultures multiples, de nos espérances et de nos rêves, la France porte par excellence cette mystique qui nous mobilise.
Tous les pays ne la portent pas de la même manière ni au même degré, certains cherchent encore la sève commune.
Français, comme nos parents et nos enfants, nous avons reçu cette sève, nous la faisons vivre et elle nous fait vivre. Je dirais que la patrie charnelle de nos destins est la permanence d’une France qui veut vivre, et qui veut vivre comme une France de tous les français sans rupture aucune de l'égalité!.
La vie convoque l’amour. Vivre la France comme une âme, une poésie, une personne, une mère, jusqu’à la sertir au cœur de son âme amoureuse, voilà une belle charité.
Mais n’oublions pas que la vocation de cette charité est de s’exercer – in fine – envers des hommes et des femmes.
Aimer la France dépasse l’abstraction, ou alors elle devient idéologie, idolâtrie.
Aimer la France, c’est aussi aimer son peuple, ou plutôt aimer « ses peuples de France».
La France se conjugue au singulier et au pluriel : un peuple et des peuples ; un pays et des pays ; une langue et des langues ; une culture et des cultures ; une tradition et des traditions ; un tempérament et des tempéraments.
La France n’est pas une nation-ethnie. Son extraordinaire capacité d’acculturation l’atteste.
La France porte en son écrin millénaire le trésor de l’universalité culturelle gravée par les lettres de sa devise Liberté - Égalité - Fraternité à laquelle s'ajoute Laïcité.
C’est le mystère particulier de La France, cette mystique qui la fait aimer par tous les continents, des frères et des amis qui attendent de la France qu’elle soit elle-même, qui la chérissent et l’appellent, parfois avec angoisse, toujours avec tendresse.
Avons-nous au cœur cet humble petit surplus d’orgueil français qui est comme l’aiguillon de notre responsabilité ?
Est-il français qui porte amoureusement en son cœur l’âme du pays et qui soit indifférent à ses tourments et démissions du moment ?
Allons-nous reprendre conscience de ce que nous sommes ?
Ni Républicains au rabais, Ni identiraires néfaste!
Le monde respectera la France, non pour la soumettre mais pour la servir, la protéger des prédations mais aussi d'elle-même, adoucir ses mœurs les plus rudes, l’éclairer, l’éduquer, la faire grandir. En un mot l’aimer.
Nos vœux de Droits Humains portés par les républicains que nous sommes, partent de notre amour de ce pays.
Nos vœux ne veulent pas d’une France qui renie sa constitution et son histoire ou le citoyen ne sert pas seulement d’applaudimètre, où le citoyen n'est plus assujetti.
Nos vœux veulent faire de la mixité une auto-énonciation du citoyen qui abolit son asservissement.
Nos vœux veulent faire de la constitution du « nous » national l’aporie du jugement de soi-même et des autres.
Nos vœux veulent porter ces mouvements contraires : devenir-citoyen du sujet et du devenir-sujet du citoyen. Le citoyen-sujet qui se constitue dans la revendication du « droit aux droits », ne peut exister sans un envers, qui le conteste et le défie. Il n’est pas seulement rapport social, mais malêtre de ce rapport.
Nos vœux veulent que l’humain ne puisse être institué qu’à la condition de se retrancher de soi-même, dans la forme des différences qui assignent normalité et identité comme conditions de l’appartenance.
Nos vœux veulent que la violence de l’universalité civique-pouvoir soit plus grande.
Nous sommes républicains de souche.
Nous sommes nationaux de souche.
Nous sommes démocrates de souche.
Et parce que nous sommes Républicains, Nationaux et Démocrates, que nous sommes opposés sans ambiguïté à la constitutionalisation de la déchéance de nationalité.
Nous ne voulons pas servir la France séculaire sur un plateau d'argent aux assassins de l'aube qui rôdent!
Et cela est notre droit. Le droit qui se fond sur l’insoumission.
Et cela est notre volonté d'émancipation. L’émancipation qui tire sa puissance de l’altérité.
(*) bi-compatriote : double appartenance commune.
Mes amitiés binationales