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Billet de blog 9 août 2014

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Retocage partiel du Pacte de Responsabilité et contre-vérités de François Fillon

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Fillon amnésique ou adepte des contre-vérités délibérées ?

François Fillon a commenté la décision du conseil constitutionnel de retoquer partiellement le pacte de responsabilité en affirmant que ce dernier a « sanctionné le caractère brouillon et improvisé de la politique économique gouvernementale et lui rappelle les principes fondamentaux de notre contrat social » (sic communiqué FF (1)).

François Fillon affirme que la « sanction du Conseil Constitutionnel » concerne les prestations contributives de sécurité sociale qui doivent correspondre à des cotisations salariales, et que le Conseil constitutionnel souligne à la fois les impératifs du financement de notre système de protection sociale et le lien entre le droit à des prestations et le versement effectif de cotisations par les intéressés.  Et il continue son propos en indiquant que « ce lien est au cœur de notre contrat social. »

François Fillon insiste en déclarant que le pacte de responsabilité « s'est dilué dans le temps », et que Le choc de compétitivité promis par François Hollande « s'est enlisé ». Et il termine par le propos sur « L'amateurisme qui fait perdre du temps à la France » !

Sur les prestations contributives

L’ineptie dans le propos de François Fillon reflète le caractère délibéré de la contre-vérité!

En tant qu'ancien Premier Ministre, il annonce délibérément une conception fausse des prestations contributives. En effet, le contrat social dont il a été porteur quand il a été Ministre de la Santé et des Affaires Sociales, spécifie bien qu’elles se financent par les cotisations sociales et des subventions de l’Etat et donc des impôts.

Le Conseil Constitutionnel tient à la distinction entre les "impositions de toute nature" et les cotisations sociales. Pour les premières, il applique le principe de prélèvement "en raison des facultés contributives" qui est énoncé par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. "En raison" veut dire (dans le langage du XVIIIe siècle) "tenir compte". Le Conseil admet donc parfaitement que certains ménages ne paient rien au titre de l'impôt sur le revenu : le fisc tient compte du fait que la capacité contributive d'une personne qui ne dispose que de 1 000 € par mois est quasiment nulle.

Pour les secondes, les cotisations, il part du fait qu'elles sont "des versements à caractère obligatoire ouvrant des droits aux prestations et avantages servis". Autrement dit, il reconnait le caractère contributif de nos assurances sociales, qui a été un peu trop vite oublié par les pouvoirs publics. Et pour lui cette contributivité justifie le respect du principe d'égalité. Non pas une égalité en montant : il ne veut pas que la personne qui gagne le smic paye autant que celle qui gagne le double ! Mais une égalité en pourcentage : tout le monde doit verser le même pourcentage de ses revenus pour obtenir la même couverture sociale.

Le Conseil constitutionnel s'est donc opposé à l’application d’un taux de cotisation, que la loi censurée voulait faire croître entre le SMIC et 1,3 SMIC de 0 % au taux normal.

La solution possible sera au pire des QPC (questions prioritaires de constitutionnalité) car il existe, au niveau des cotisations patronales, des différences de taux selon le montant du salaire, et il serait très intéressant de savoir si le Conseil leur appliquerait ou non le même principe d'égalité qu'aux cotisations salariales. Les économistes ne voient pas d’opposition, mais le Conseil constitutionnel composé de juristes serait moins sensible à cette disposition.

Sur l’amateurisme

François Fillon stigmatise l’Amateurisme de François Hollande et du gouvernement. Voyons voir!!

Un petit retour sur le quinquennat de Nicolas Sarkozy, que Fillon a passé entièrement en tant que Premier Ministre, montre le vrai amateurisme et couacs qui ont marqué le mandat Sarkozy. Ce qui fait dire à Marianne « Sarkozy le président le plus retoqué » !

Difficile de ne pas penser aux multiples "couacs" subis par Nicolas Sarkozy dès août 2007.

  • Retoquage  de la promesse de rétroactivité de la déduction des intérêts d'emprunt,
  • Retoquage des statistiques ethniques,
  • Retoquage des dispositions de la loi Hadopi,
  • Retoquage de l’amendement sur les statistiques ethniques,
  • Retoquage de la taxe carbone,
  • Retoquage du texte fixant le nombre des conseillers territoriaux,
  • Retoquage de la loi sur le "génocide arménien",
  • Retoquage de la loi sur la déchéance de nationalité pour les Français «d'origine étrangère» ayant porté atteinte à la vie de policiers ou de gendarmes,
  • En février 2008, la loi Dati sur la rétention de sûreté,
  • Mars 2008. Plusieurs articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 sont censurés par les Sages : notamment le texte qui prévoyait la suppression progressive du régime de sur-pensions des fonctionnaires retraités dans certains départements et territoires d'outre-mer,
  • 6 août 2009 : le Conseil constitutionnel censure la partie de la loi sur le travail dominical accordant un statut particulier à Paris. Motif : elle privait le maire de la capitale du pouvoir, dévolu aux maires d'autres communes, de proposer des extensions d'ouvertures,
  • 29 décembre 2009 : la loi sur la taxe carbone, annoncée avec tambour et trompettes trois mois plus tôt, est annulée par les Sages deux jour avant son entrée en vigueur prévue pour le 1er janvier 2010,
  • ...

Sur le plan compétitivité-emploi

Le 27 Juin 2014 François Fillon déclare : « La situation de la France l'exige : il faut engager les réformes structurelles dont le pays a besoin pour relever le défi de la compétitivité, moteur de la croissance et de l'emploi. La politique des petits pas a montré ses limites, l'urgence est au changement». Ce qui l'amène à faire les propositions suivantes sur la compétitivité:

  • L’accord Compétitivité-emploi:

L'accord "compétitivité emploi" proposé en 2012 par Sarkozy, c’est à 4 ans ½ après son accession au pouvoir (campagne présidentielle oblige), qui ne correspond qu'à une partie de l'accord national interprofessionnel (ANI) signé par les partenaires sociaux n’intègre aucune négociation par le gouvernement ni par la majorité, même si celle-ci en a lancé les débats, pour aboutir à une  réforme. En gros un accord hors de tout dialogue avec les partenaires sociaux

  • Que proposait Nicolas Sarkozy (et son Premier  Ministre)? : zapper les partenaires sociaux

L'idée avancée par Nicolas Sarkozy, parmi d'autres propositions choc, début janvier 2012, est de permettre aux entreprises de négocier le temps de travail de leurs salariés en fonction de l'activité économique, sans faire appel aux partenaires sociaux. En cas de charge de travail forte, les salariés pourraient travailler plus, et ils travailleraient moins lors des périodes difficiles, en échange de garanties concernant les emplois. Aux salariés et à l'entreprise de négocier les autres conséquences possibles, maintien ou non du salaire notamment.

  • Que disait François Hollande? : le dialogue

François Hollande avait critiqué la méthode et le fait que les partenaires sociaux négociaient sous la menace d'une loi en cas d'absence d'accord. "Je ne peux même pas imaginer qu'il puisse y avoir une loi sur ce sujet avant l'élection présidentielle", (François Hollande fin janvier 2012),

Il promet "Nous aurons à cœur de faire en sorte que les syndicats puissent négocier dans de bonnes conditions des accords sans avoir à remette en cause la durée légale du travail, parce qu'en l'occurrence, c'est ça qui est recherché."

Dans sa tribune du 14.06.2011 dans Le Monde, François Hollande a invoqué un intérêt à la démocratie sociale et jugé que des accords collectifs signés entre syndicats et patronat puissent le cas échéant déroger au droit du travail.

 (1) http://www.u-m-p.org/actualites/espace-presse/communique-de-francois-fillon-faisant-suite-a-la-censure-du-pacte-de-responsabilite-par-les-sages-10913708

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