Nicolas Sarkozy sur l'Europe : Pourquoi faire, et pour dire quoi ?
Réelle vision ou surpris par la qualité de la Tribune de François Hollande
« Qu'importe le temps. Qu'emporte le vent. Mieux vaut ton absence. Que ton incohérence »
Chantait Serge Gainsbourg dans l'Indifférente
Hortefeux : « Une intervention de Sarkozy sur l'Europe est espérée »
Des voix de droite réclament la parole de leur pape, attendent le vésicule et de son répons qu’ils suivront avec un suivi d'un Ave Nicolas. Une espèce d'Annonciation mystérieuse, de la conception virginale de Nicolas Sarkozy au sujet d’une Europe qu’il a fustigé par un discours anti-UE en tant que candidat à la présidentielle. Il avait annoncé son retrait de la scène politique pour revenir avec une prière néo-sarkozienne qui se terminera bien sûr par une oraison qui récapitule le chemin de salut offert par le Sarkozy ressuscité, dont la révélation est donc inaugurée par cette séquence de l'Annonciation
Intervenir, il en a le droit. Oui mais pourquoi faire et pour dire quoi de différent de son discours qui a froissé une partie de l’opinion publique française et européenne ?
Candidat à la présidentielle qui le mène à la défaite et au retrait de la scène politique, Nicolas Sarkozy a lancé dans son meeting de campagne de Villepinte, un double ultimatum à l'Union européenne. Il a exigé que les entreprises du continent soient privilégiées pour les contrats publics et a menacé de sortir la France de l'espace sans frontières Schengen s'il n'était pas possible de sanctionner un pays défaillant dans le contrôle de l'immigration clandestine.
Deux exigences qui ont fait beaucoup réagir l’Europe y compris libérale.
- Immigration et Schengen
Afin de lutter contre l'immigration clandestine qu'il estime mal contrôlée par certains pays européens, alors en cas de réélection Il menace de sortir la France des accords de Schengen sur la libre-circulation dans l'UE
«Il faut une discipline commune dans les contrôles aux frontières comme il y a une discipline commune en matière de finances publiques dans la zone euro», a déclaré le candidat, mettant en garde : «Si dans les 12 mois qui viennent, il n'y avait aucun progrès sérieux dans cette direction, alors la France suspendrait sa participation aux accords de Schengen».
Quand à Henri Guaino, la plume de Sarkozy, il déclare«On rétablit des contrôles. La France se réserve le droit de contrôler ses frontières comme elle l'entend».
Pour la porte-parole du candidat, Nathalie Kosciusko-Morizet, «on a un problème à la frontière entre la Grèce et la Turquie. Les Grecs annoncent 55.000 clandestins qui passent tous les ans. C'est probablement plutôt 160.000».
Alors que disent ils de différent du Front National ? Presque pas de différence.
- L'espace Schengen
Effectif depuis 1995, l'espace Schengen (dont la France fait partie) fonctionne comme un espace unique en matière de déplacements internationaux et de contrôles frontaliers. Les frontières internes ne sont, de fait, plus surveillées, hormis des contrôles aléatoires menés par la douane volante.
Ce que propose le FN (Programme de marine Le Pen) :
"Remise en cause des accords de Schengen sur la libre circulation des personnes : la France reprendra le contrôle de ses frontières."
Ce que dit en substance Nicolas Sarkozy relayé en 2013 par Jean-François Copé :
"Il faut un vrai contrôle aux frontières. Pour cela il faut complètement réorganiser Schengen et en exclure les pays ne contrôlant pas leurs frontières. Sinon, c'est la politique de la chaise vide pour la France."
- Que disent les partenaires européens de la France de ces positions destinée à chasser sur les terres de l’extrême droite ?
Accueil glacial en Allemagne. Alors que Angela Merkel ne cesse de prôner « plus d'Europe » auprès de ses concitoyens, les menaces de Nicolas Sarkozy ont été très mal accueillies en Allemagne. Les milieux proches de la chancelière n’on cessé de répéter que les accords de Schengen étaient un « bien précieux»
La presse allemande, qualifie la prestation de Villepinte comme annonçant « La peur d'une défaite l'a poussé à des positions eurosceptiques pour gagner des électeurs d'extrême droite », écrit le quotidien économique « Handelsblatt ».
En Italie, condamnation des parlementaires italiens ont condamné la prise de position du président français. « C'est une proposition assez choquante, estime Margherita Boniver, députée du Peuple de la liberté (droite) et présidente du comité chargé du suivi sur Schengen. C'est nier les progrès apportés sur la mobilité des Européens, c'est porter atteinte à leur liberté même. »
Mario Barbi, député du Parti démocratique italien (gauche), assène : « Il reporte sur l'Europe les échecs de son mandat. »
Ilvo Diamanti, politologue italien, préfère relativiser : « Rediscuter Schengen à l'heure actuelle voudrait dire rediscuter toute l'Europe… »
Le seul soutien lui vient de la presse libérale anglaise, En phase avec les positions de la Grande-Bretagne.
La BBC rappelle que « Sarkozy a simplement répété » les demandes anglaises de voir les accords de Schengen renforcés pour lutter contre l'immigration illégale.
Quant au « Daily Mail » (conservateur), il se félicite de ses propositions qui permettraient à la Grande-Bretagne d'avoir « moins de soucis pour lutter contre les vagues d'immigrants qui tentent d'entrer illégalement chez nous depuis Calais ».
L’UMP de Sarkozy a effectivement a fait sienne les propositions du Front national. De même, les motivations sont identiques : rendre la France moins attractive pour les immigrés.
L’ossature de son discours c’est s’attaquer avec un max d’incohérences et de populisme honteux à l’immigration et l’Europe, tels un bouc-émissaire, responsables des maux de la France.
Nicolas Sarkozy candidat en 2012, voulais renégocier voire sortir la France de Schengen en condamnant la proposition de François Hollande quand il promet de réécrire le traité sur la discipline budgétaire dans l'UE.
- Que dira le citoyen Nicolas Sarkozy en 2014, pour faire mieux que le FN au sommet des sondages ?
N’est-ce pas juste une tentative de réponse d’un retiré de la vie politique qui ne s’est jamais retiré dans les faits, pour une droite perdue sur l’Europe à l’excellente tribune de François Hollande « L’Europe que je veux », publiée dans le Journal le Monde (1).
Que dira-il de plus sur l’Europe ?
Que l’Europe c’es la paix ?
Que cette paix a amené la prospérité et la liberté ?
Que ce qui se passe aux frontières de l’Europe incite à la vigilance ?
Que l’union déçoit et que les citoyens s’éloignent ?
Que cette Europe est impuissante face au chômage et que ses institutions imposent des règles compliquées ?
Que la Sortie de l’Europe sera très coûteuse ?
Que la dévaluation de l’Euro risque de causer la hausse des prix et affaiblir encore le pouvoir d’achat?
Que sortir de l’Europe, c’est sortir de l’Histoire ?
Que se retrancher derrière les barrières, loin de la mondialisation, ne protégera pas des tempêtes ?
Que les Français gagneront en choisissant une Europe volontaire et ont intérêt à l’exprimer par le vote ?
Que cette Europe a été au Rendez-vous, à partir de la zone euro, a redonné la force à l’économie, met fin à l ‘austérité aveugle, a encadré la finance, a fait de son marché un atout dans la mondialisation, a défendu sa monnaie contre les mouvements irrationnels, qui a investit dans de grands projets grâce à de nouveaux instruments financiers ?
Que l’Europe a tout intérêt à engager la transition énergétique, comme priorité majeure ?
Que la France veut plus que le progrès de l’Europe, l’Europe du progrès ?
Dommage pour le Pape des droites perdues. Tout a été dit et avec éloquence, clarté et donnant de l’espoir, par un européen convaincu : le Président François Hollande.
Alors « Qu'importe le temps. Qu'emporte le vent. Mieux vaut ton absence. Que ton impertinence. »
(1) http://www.lemonde.fr/europe/article/2014/05/08/francois-hollande-l-europe-que-je-veux_4413580_3214.html