Conflits environnementaux et dérèglement climatique
Cette note de lecture, extraite principalement des textes sur les guerres du climat de H. Walzer et pour une écologie des pauvres de J M Alier, tente une restitution sur les causes et les dégâts causés par ce qui peut être considéré comme conflits environnementaux.
Les conséquences du dérèglement climatique se caractérisent par des déplacements des zones habitables et religions d'agriculture, nous extensions des deserts et en pénurie d'eau, mais aussi en inondations, les équilibres existant dans le champ de tensions international en matière de politique des ressources, de celle du pouvoir et de la géopolitique seront affects, et par conséquent rien n'interdit de penser que le XXI ème siècle verra s'accroître le potentiel des tensions, avec des risques considérables de solutions violentes. (1)
Michael Mann nomme déjà quelques candidats aux prochains conflits quand il dit que "l'Indonésie ne parviendra pas à réprimer les mouvements autonomistes à Acèh et Papouasie occidentale ; l'Inde ne pourra plus assimiler ou contenir ses musulmans du Cachemire que certaines de ses populations plus petites aux frontières du subcontinent; le Sri-Lanka ne réussira ni à assimiler ni à soumettre les Tamouls, ni plus la Macédoine les Albanais , ou que la Turquie, l'Iran et l'Irak n'auront raison des Kurdes, la Chine des Tibétains et des musulmans d'Asie centrale , les russes des Tchétchènes , et le régime de Khartoum des mouvements du Soudan du sud. Etc, naturellement, Israël ne pourra pas non plus contenir à la longue les Palestiniens. " (2).
Et d'ajouter "on peut également s'attendre à des affrontements dans les pays baltes , en particulier parce que dans les régions les plus polluées vit une majorité de Russes ethniques.
Dans ces conflits de l'avenir et dans d'autres, les problèmes de survie liés au dérèglement climatique attiseront encore la dynamique de la violence, dans d'autres ils ne joueront aucun rôle, dans d'autres ils contribueront peut-être à faire baisser les tensions. En tout cas, la pratique du XX ème siècle, basée sur des États ethniquement homogènes et une violence exercée le long des frontières ethniques, sera aussi celle du XXI ème siècle, peut-être même sur une plus grande échelle.
Le changement climatique accélère les modifications dans les configurations des États , accroît les tensions et fait pression pour qu'on trouve rapidement des solutions. Il ne s'agit pas d'un pronostic pessimiste, mais de ce qui fait déjà partie de notre présent, comme le montre le tableau en annexe sur les conflits liés à l'environnement.
Naturellement, il est difficile de parler de conflits "purement" environnementaux. Plusieurs facteurs sont généralement à l'origine de conflits.
Les spécialistes des conflits arrivent à identifier quatre types régionaux :
En Amérique centrale, ce sont surtout des conflits liés à l'exploitation des terres et à la dégradation des sols.
En Amérique du Sud c'est exclusivement cette dernière qui est cause des conflits.
Au Proche-Orient , ce sont les conflits liés à l'eau qui jouent le principal rôle.
En Afrique subsaharienne prédominent les conflits liés en même temps à l'eau et à la dégradation des sols.
Dans les deux premiers cas , ce ne sont pas les incuries gouvernementales et les migrations qui aggravent les conflits, ils sont alimentés par la pauvreté, la pression démographique, et l'inégale répartition du pouvoir.
Dans le cas des conflits liés à l'eau au Proche-Orient, le scénario est marqué par la pression démographique, les migrations, la pauvreté et les tensions ethniques.
Dans le 4ème cas, ce sont des conflits violents dominés par la désétatisation, la pression démographique, les migrations et leurs conséquences dans l'exploitation de ressources en eau et en terre et tensions ethniques.
Certains de ces conflits potentiels relèvent d'événements météorologiques extrêmes. En particulier, les inondations et les sécheresses causant des milliers de morts se multiplient dans les régions où déjà des formes de conflits environnementaux sont de plus en plus fréquents.
Naturellement, la violence ne naît que rarement pour une seule raison : les phénomènes de la pression modernisatrice qu'exerce partout la mondialisation montre précisément le rapport étroit, mais non déterministe entre la violence intra- et interétatique et les disparités dans les conditions de survie et les chances de développement futur.
Exemple d'Ecocides : le Darfour
Lors de la sécheresse catastrophique de 1984, les paysans sédentaires tentèrent de protéger leurs maigres récoltes et interdirent l'accès de leurs champs au troupeaux des "Arabes", font les pâturages avaient été détruits par la sécheresse.
C'était leur interdire leurs chemins de transhumance en même temps que leurs pâturages.
Désespérés et furieux, les nomades commencèrent à s'attaquer aux paysans et à forcer leur passage à travers leurs terres. Et, quitte à se battre, ils en profitaient pour lâcher leur bétail dans les maigres champs ravagés par la sécheresse.
Ils ne supportaient même plus de voir les paysans brûler les mauvaises herbes. Ils se battaient pour quelques centaines de mètres carrés de pâturages desséchés. (3)
On voit là très clairement que ce furent des changements climatiques qui declenchèrent le conflit : le manque de pluie fit que les régions du nord devinrent impropres à l'élevage et que les éleveurs, jusque là en partie sédentaires, furent poussés vers le sud, devenant pour la première fois des nomades à part entière.
Que faire après ces constats ?
Ces constats et descriptions nous font tous poser la question : pour limiter les risques de ces conflits muti-cosaux ne faut-il pas penser une nouvelle écologie géopolitique ?
Mais l’écologie, est-ce un luxe réservé aux pays riches ?
Rien de plus faux, explique Joan Martínez Alier, qui prouve à travers son livre que justice sociale et préservation de l’environnement, loin de se concurrencer, vont de pair. (4)
À rebours de la croyance selon laquelle il faudrait avoir atteint un certain niveau de confort pour se « permettre » d’être écologiste, J M Alier montre qu’il s’agit souvent d’une question de vie ou de mort pour les plus démunis.
Ainsi, tout comme il existe un écologisme de l’abondance (le tri sélectif ne peut s’inventer que dans des endroits où les poubelles débordent !), il existe partout dans le monde un écologisme des pauvres. Car non seulement les pauvres dépendent étroitement de leur environnement pour survivre, mais c’est aussi vers eux que sont transférées les activités les plus polluantes.
Mais quels calculs possibles pour déterminer un prix « écologiquement correct » intégrant les dégâts environnementaux et sociaux.Quel prix donner à une vie humaine ? Quel prix pour une terre « sacrée » détruite par une mine de cuivre, ou pour une communauté entière exposée à des déchets toxiques ?
Aujourd’hui, petit à petit, la notion de justice environnementale fait son chemin. L’idée de dette écologique également : ceux qui utilisent le moins de ressources ne seraient-ils pas les créanciers de ceux qui les gaspillent ? Autrement dit, les riches n’auraient-ils pas une dette écologique envers les pauvres ?
(1) et (2) cités par Harald Welzer - les guerres du climat p. 198 à 203
(3) Gérard Prunier - Darfour p. 110
(4) L’écologisme des pauvres - Une étude des conflits environnementaux dans le monde Jean Martinez Alier.