m satouri (avatar)

m satouri

Député européen écologiste, membre des Commissions Droits humains, Affaires Etrangères, et Développement

Abonné·e de Mediapart

30 Billets

0 Édition

Billet de blog 25 avril 2023

m satouri (avatar)

m satouri

Député européen écologiste, membre des Commissions Droits humains, Affaires Etrangères, et Développement

Abonné·e de Mediapart

Quand le Président égyptien voulait envoyer des armes à Poutine

Le Président égyptien a envisagé d’envoyer des armes à la Russie. 40 000 roquettes, et pourquoi pas des obus d'artillerie, en pleine guerre d'agression en Ukraine. L'Europe doit clairement réévaluer ce "partenaire de sécurité"...

m satouri (avatar)

m satouri

Député européen écologiste, membre des Commissions Droits humains, Affaires Etrangères, et Développement

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

 Alors que le régime égyptien est décrit comme un partenaire de sécurité par Paris et Bruxelles, au prix de fermer les yeux sur les violations de droits humains dans le pays, ces révélations publiées par le Washington Post sur la base de documents fuités des services secrets des États-Unis soulignent une évidence: la confiance placée en des dictateurs pour assurer les intérêts de la paix et de la sécurité est infondée. 

La France en avait déjà fait l'expérience: le régime égyptien n'est pas un partenaire de sécurité fiable. À l’époque déjà, le régime égyptien détournait les informations fournies par l'opération de contre-terrorisme française Sirli pour abattre de simples contrebandiers. Et pourtant, nos dirigeants ont accepté de fermer les yeux devant la duplicité d’al-Sissi et de se compromettre davantage, rendant certains décideurs gouvernementaux potentiellement complices de crimes contre l'humanité.

Dans le domaine de la sécurité, le Président égyptien n’hésite pas à manipuler ses alliés occidentaux pour arriver à ses fins. Aussi ne sommes-nous pas surpris d'apprendre qu’il a cherché à tromper ses alliés européens et à produire et exporter des armes à la Russie, en pleine guerre d'agression en Ukraine. Selon certains, le but recherché était de faire chanter les États-Unis, afin d'obtenir le retrait des restrictions imposées à l'aide américaine sanctionnant la situation dramatique des droits humains dans le pays. Qu’il s’agisse de chantage ou de véritablement renforcer l'arsenal de guerre de Poutine en Ukraine, ces agissements sont inacceptables. Rappelons ici que le régime égyptien bénéficie d'aide directe au Trésor de la part du budget européen.

Si la France n'est pas un exemple en la matière, puisqu'elle a elle-même exporté des armes à la Russie jusqu'en 2020 (malgré un embargo européen et des critères européens universels d'exportations qu'il est urgent de renforcer), le machiavélisme sans limite du Président égyptien en pleine guerre en Ukraine mérite une réaction forte de l'Union européenne et de la France, et en premier lieu dans le domaine de la sécurité. Par exemple, prenons des précautions dans nos exportations d’armes. L’Égypte était le premier client des armes françaises en 2021. Quelle assurance avons-nous que ces armes ne seront pas envoyées à la Russie ?

Notre réponse ne peut se passer d’un front uni sur la défense des droits humains en Égypte. Dans un pays où la COP 27 s’est déroulée sans aucune amélioration réelle sur la situation des droits humains, où même la libération de prisonniers politique emblématiques comme Alaa Abdel Fattah n'a pu être accordée, où les journalistes sont emprisonnés ou subissent un harcèlement judiciaire kafkaïen, Al-Sissi ne recule devant rien pour faire taire les critiques, y-compris à l'international. En, l'espèce, le chantage fait aux États-Unis, prenant en otage des vies ukrainiennes, est particulièrement déloyal. 

Devant cette realpolitik et ce langage des armes, nous devons fournir un front uni. Le manque de mesures européennes à l'égard de l'Égypte, pour compléter les restrictions américaines, est une brèche qui galvanise un régime autoritaire prêt à tout pour se maintenir au pouvoir et le consolider. Alors, allons-nous fermer les yeux, comme pour le détournement de l’opération Sirli, ou agirons-nous face à la duplicité du « partenaire de sécurité » égyptien ?

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.