Sachez reconnaître un bot sur Mediapart
(Les quarante marches)
Avertissement rédigé un bon mois plus tard : ce billet doit être lu d'un œil critique : c'est surtout un avertissement. Comme on me l'a rappelé de plusieurs côtés, les trolls humains (partisans d'un camp dans un conflit donné fonctionnant plus à la conviction qu'à la réflexion – ou cherchant surtout à plastronner – et parasitant les fils de discussion) ne datent pas d'hier, et certains de leurs comportements peuvent être trop rapidement interprétés comme automatiques. Par ailleurs, des protestations venant d'abonnés que je soupçonnais de relever d'un programme me conduisent à recommander (y compris à moi-même) une certaine prudence dans l'évaluation. Il est à craindre que ce billet soit surtout prémonitoire...
On ne s’intéressera ici qu’à un type de troll, le troll automatique, relevant de l’IA et brièvement nommé « bot ». Leur recrudescence sur certains fils amène à tenter, sinon une typologie, du moins une description rapide — et je mesure en y repensant la distance qui me sépare de mon premier et lointain billet sur Mediapart, et la dégradation mesurable qui me ferait presque regretter les idiots et vieux staliniens tannés d’autrefois…
Le bot, sur Mediapart, est assez monofonctionnel : il surgit comme un diable de sa boîte lorsque la Russie de Vlad-le-missile est mise sur la sellette. Sans cependant s’interdire de commenter l’actualité relative à Arturo Trump, puisque ces deux-là ont depuis longtemps partie liée… Des terrains comme le Proche-Orient ou l’Afrique sont aussi, parfois, des territoires de chasse, puisque la Russie de Vlad y sévit. et on peut aussi s’y faire décerner à peu de frais un brevet d’anti-impérialisme, ce qui pourra toujours resservir.
Cependant, il lui arrivera de faire une incursion sur d’autres thèmes, les marches de femmes, les révélations sur les crimes pédophiles, etc. Il s’agit là de faire diversion : vous voyez, je suis comme vous, demandez le programme.
Dans le même ordre d’idées, nos bots peuvent être bien tenir un blog. Il est en général très pauvre, les billets sont absolument plats et impersonnels, les données directement collectées sur Wikipedia, notamment. On sait que l’IA excelle en la matière.
On peut remarquer des erreurs typiques chez les bots : ils répondent à côté, font des fautes d’orthographe assez stéréotypées, et manquent le plus souvent d’humour. Ils ressassent leurs antiennes, mais peuvent aussi se lancer dans des divagations relevant, chez l’humain, de la mythomanie. Il arrive même qu’ils vous menacent, je l’ai déjà vu, mais c’est assez rare, ils affectent plutôt une rondeur cauteleuse et vous alignent trois kilomètres de données pour noyer le poisson.
Les quelques tentatives d'humour que j'ai pu observer sont assez laborieuses. On peut également noter la grande absence de curiosité de nos automates : là où un humain est capable, pour en avoir le cœur net, de fouiner en profondeur, un bot fonctionne au mot-clé, qui lancera chez lui une recherche, sans creuser davantage. Il se contentera parfois de recopier ce qu'un de ses collègues aura écrit ailleurs. J'ai pu le vérifier récemment (ajouté le 24/03) en discutant sur Mediapart avec quelques exemplaires de bots...
Rajoutons que nos automates sont capables de se congratuler et de se recommander les uns les autres. Il y a là de quoi être admiratif...
Ces quelques remarques ne permettent pas de repérer aussitôt et sans erreur possible, dans un fil, les bots qui y traînent leurs guêtres. Mais avec un peu d’habitude, on peut exercer sa sagacité, prendre ses marques et éviter de perdre du temps à discuter gravement avec un automate… Bonne chance !
Complément technique que j'ai demandé à un connaisseur :
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