C’est peu dire que vous faites pitié.
Parce que dans votre équipé de cyber-ramollis du bulbe, il y a du lourd -et surtout du lourdingue. A commencer bien sûr par Elon Musk « l’inventeur » le plus riche du monde sans avoir jamais rien inventé -on rappelle qu’il a simplement financé Tesla-, qui flexe en faisant des saluts nazis en 4K à la face du monde après avoir affirmé qu’il fallait « cesser de voir Hitler comme le mal absolu ». Mais comme la mauvaise foi est à ses soutiens ce que le conseil municipal de Pau est à François Bayrou, donc une mission sacrée, il fallait selon eux voir dans ce « sieg heil » d’une précision quasi géométrique un simple « jet de cœur à la foule » interprété par un « autiste » un peu maladroit, faisant dire très justement à l’humoriste afro-américain Josh Johnson : « Une chose que j’aime bien chez Elon, et y en a pas beaucoup, c’est qu’il arrive toujours très rapidement à faire passer les gens qui le défendent pour des crétins ».
Il y a Javier Milei, l’abruti à la tronçonneuse, dont la politique économique turbo-capitaliste aussi subtile qu’un lavement au Destop a eu pour simple conséquence de faire passer le chômage a plus de 20 % et le taux de pauvreté a plus de 50 %, bravo champion (1).
Il y a, fraîchement arrivé, Mark Zuckerberg, connu pour avoir volé l’idée du réseau social actuellement principalement composé de «photos» de gamins à trois jambes et huit doigts par main nous présentant leur sculpture de lapin géant faite en carotte, pour le plus grand plaisir de 16 k de boomers émerveillés. Le nerd tête-à-claque est passé des soirée sopalin-Pornhub dans sa chambre d’étudiant friqué aux rings de MMA -même s’il est toujours gaulé comme une tringle à rideau- au nom de la sacro-sainte « énergie masculine » : « avoir une culture qui célèbre un peu plus l’agressivité a ses avantages » a-t-il dit, et on espère que le prochain camarade qui le croisera lui collera une paire de claque bien « énergique », -plaisir d’offrir.
Sans oublier bien sûr Xavier Niel, présent en VIP à l’investiture du nouveau roi des cons juste après avoir filé 0,1 % de ses revenus quotidiens à un événement caritatif, tout ça pour voir l’agent orange envisager tranquillement la déportation des Palestiniens.
Et enfin Peter Thiel, « l’intello » de la bande, soit celui dont le QI moyen en pleine possession de ses capacités cognitives lui permet de compter deux par deux, lacer ses chaussures et faire caca au pot, et théoricien du… « capitalisme de l’apocalypse » rien que ça (2), mais le grand problème de ce monde c’est bien évidemment les gauchistes écolos, les steaks vegan et les films Netflix avec des Noires lesbiennes.
Et tous convergent (en deux mots) vers le trône flashy, surplombé d’un pygargue en plastoc et en forme de gigantesque hamburger, du nouveau suzerain, Trump le magnat débile léger, empereur grimaçant de cet univers techno-féodal qui voit ce Donald-Godefroy de Montmirail-de-coke et sa horde de Jacquouille-les-Richouilles nous préparer tranquillement à la troisième guerre mondiale avant une fin du monde bien méritée. Et d’ailleurs, pour préparer le terrain, il a relâché day 1 de son accession au pouvoir ses milices de soudards néo-nazis de la tentative de prise du Capitole, dont Keith Packer, photographié avec un un t-shirt « CAMP AUSCHWITZ » lors de l’assaut, et Nick Fuentes, qui compare la Shoah à une « opération de fabrication de biscuits », s'amuse que les médias comparent Poutine à Hitler -« comme si ce n'était pas une bonne chose ! »-, et a salué la réélection de son chef avec une vidéo à destination des femmes -il frappera une féministe quelques jours plus tard- : « Les hommes gagnent de nouveau ! Nous allons vous garder à terre pour toujours. Vous ne contrôlerez jamais vos propres corps ! »
« L’anarcho-capitalisme » c’est quoi ?
Le chercheur Quinn Slobodian, dans Le Capitalisme de l’apocalypse. Ou le rêve d’un monde sans démocratie (3), détaille ainsi le programme politique de votre palanquée de fou furieux sans camisole : « un capitalisme pur, débarrassé de toute contrainte démocratique et dominant un État minimal devenu une entreprise comme les autres », et qui apparaît déjà, en « confettis », dans « la zone », « vaste région faite de milliers d’ensembles qui permettent aux capitaux et à leurs détenteurs d’échapper aux lois qui s’appliquent aux autres citoyens » (Joseph Confavreux). Autant dire qu’on est aussi proche des principes anarchistes que la vie sexuelle de l’abbé Pierre l’était des préceptes du Christ, mais j’y reviendrai.
Le but, donc, de cette « utopie » pour le coup carrément dystopique : permette au Kapital, dans toute sa brutalité, de « faire sécession », lors par exemple des tentatives « de transformer le Ciskei, un État fantoche créé par le régime de l’apartheid, ou la Somalie des années 1990, en paradis capitaliste sans État ».
Après quoi, après les piteux échecs de ces projets, ce fut l’idée, digne du moins crédible des méchants de Power Rangers, d’un « territoire libre flottant » sur une île privée au large du Honduras, qui floppera puissamment, avant de se dire que ce serait tout de même plus simple de créer leurs » communautés libres » en ligne -et si ces lieux virtuels sont aussi moches que celui créé par Zuckerberg, autant que personne n’ira les voir pour l’apéro, par peur de rester à jamais bloqué dans l’uncanny valley.
Joseph Confavreux conclut ainsi ce tour d’horizon : « Derrière ces tentatives un peu pathétiques, on trouve les grands traits d’une idéologie qui n’est plus anecdotique : la nostalgie pour une Europe médiévale fantasmée comme un immense champ de compétition entre intérêts privés ; la volonté de remplacer la souveraineté par les intérêts personnels concurrents, la démocratie par le marché et la loi par le contrat ».
Voilà, c’est ça, votre but. Votre triste et pitoyable but. Un retour au Moyen-âge, non pas pour retrouver les Communs paysans et les cités libres, mais pour ressusciter le temps béni de la féodalité, avec vous autres bande de cons en chefs de guerre numérique exploitant leurs Uber-serfs partout dans le monde, avec vos technologies inutiles, merdiques et polluantes, qui ont pour but ultime, dans vos cerveaux pas finis d’ados mal réveillés, d’aller ensuite semer votre merde dans le cosmos, afin, comme l’a formulé le chercheur Nikos Smyrnaios (4), « de remplacer l’humanité par une espèce supérieure « post-humaine » et de coloniser l’univers ». « L'horloge de l'apocalypse », censé nous indiquer notre temps restant avant le générique de fin, affiche un horaire record : 89 secondes avant minuit. Qui s’en étonne ?
Et l’anarchisme véritable dans tout ça ?
Et j’en arrive donc, au-delà de vos minables personnes, de vos silhouettes grotesques de pantins moches qui ne s’agitent que parce qu’elles sont été remplies avec du fric, à la chose qui m’insupporte le plus dans vos théories débiles : le fait d’y avoir accolé les termes « libertaires » et « anarchistes ». Et que, donc, fréquemment, et jusque dans des médias qu’on pourrait espérer bien renseignés -je me rappelle d’une fois où j’ai du demander à Libé de corriger un chapô d’article où Musk était décrit comme « libertaire » au lieu de « libertarien »-, il faille expliquer que, non, quoique dise cet imbécile de Milei, capitalisme et anarchisme se mélangent aussi bien que le Mentos et le Coca, ou que le cinéma français et Metoo, et que « anarcho-capitalisme » est un oxymore, comme « bobo-nazi » ou « KFC-vegan ».
L’anarchisme qui nous guide, mes copaines et moi-même, c’est précisément lutter sans relâche contre tout ce qui précède, tout ce que vous représentez, ce techno-féodalisme répugnant, cette hybris de gamins pourris-gâtés.
L’anarchisme, ce n’est pas « faire ce qu’on veut quand on veut », et surtout quand on a l’argent pour le faire, contrairement à ce beaucoup -dont vous, espèce d’incultes milliardaires à deux balles- s’imaginent. C’est dire, avec Malatesta (enfin je crois), que « ensemble, notre liberté est infinie ». Que, comme ce même Malatesta l’a formulé en 1920, « puisque tous les maux dérivent de la recherche du bien-être poursuivie par chacun pour soi et contre tous, nous voulons leur donner une solution en remplaçant la haine par l’amour, la concurrence par la solidarité, la recherche exclusive du bien-être par la coopération, l’oppression par la liberté ». Ce qui, vous en conviendrez, n’a strictement rien à voir avec votre projet, avec l’autre Musk affichant son soutien enthousiaste à Alternative für Deutschland, le parti néo-nazi allemand, car il est bien connu que le national-socialisme n’a jamais posé de problème dans ce pays-là.
Ainsi que l’a rappelé le média indépendant Contre-Attaque dans son analyse du salut nazi muskien et des liens entre l’extrême-droite israélienne et l’extrême-droite antisémite de la tech’, « en 2025, il faut se rendre à l'évidence : le fascisme et le nazisme dans leur forme historique, qui ont mené à la guerre, à la Shoah et à la barbarie dans les années 1930 et 1940, font leur grand retour partout en occident, bien au delà de cercles marginaux ».
L’anarchie est la seule, je dis bien la seule, voie de sortie possible du cauchemar généré par IA -et donc bien évidemment visuellement hideux- qu’est devenu ce monde. Et cette voie ne se fera pas sans piétiner quelques visages -les vôtres en premier lieu, dans un grand éclat de rire et de révolte, en même temps que ceux de Macron et de l’intégralité de son gouvernement d’extrême-droite, de droite-extrême et de centrisme d’extrême-droite.
Comme l’a dit, encore lui, ce cher Errico Malatesta, « Il faut que nous suscitions en chacun la sympathie pour les souffrances d’autrui, et le vif désir du bien de tous. À qui a faim et froid, nous montrerons qu’il serait possible et facile d’assurer à tous la satisfaction des besoins matériels. À qui est opprimé et méprisé, nous dirons comment on peut vivre heureusement dans une société de libres et d’égaux ».
Comme l’a écrit Emma Goldman, « anarchiste la plus dangereuse d’Amérique » et figure la plus stylée de son époque, « l’anarchisme nourrit tous les domaines de l’activité humaine. La science, les arts, les lettres, le théâtre, le combat pour l’égalité économique, chaque lutte individuelle ou collective contre le désordre ambiant, en somme, est éclairée par la lumière spirituelle de l’anarchisme ».
Et comme l’a rappé mon pote Zippo dans son dernier album, Automne (à écouter absolument) : « C'est pas du brouillard c'est de la GM2L / ‘Sont tellement cons qu’ils vont cramer leur jardin d'Eden eux-mêmes / Là c'est plus les mêmes rebelles rah qu'on s'en branle de ton truc qui pique / C'est toi qui pleure quand y a nos silhouettes dans la brume chimique [...] / En face y a tout le monde qui s'en tape tout un peuple qui nahess* / Bah ouais si on s'en fichait peut être que nous on serait pas fichés S / On s'est construit en négatif on avance et y a pas de peur / Y a le numéro de la légal team sur l’avant-bras au marqueur / […] Y a de l'écho, écho, écho éco-terroriste / Remets nous deux mojitos, mets-y du kérosène aussi ».
Salutations libertaires aux camarades,
Doigt d’honneur aux leveur de bras bien droits,
Mačko Dràgàn
Journaliste punk-à-chat rédac-chef à Mouais, soutenez-nous abonnez-vous par pitié : https://mouais.org/abonnements2024/
* Qui dort, NB
(1) https://www.francetvinfo.fr/vrai-ou-fake/argentine-inflation-budget-pauvrete-quel-bilan-pour-javier-milei_6969293.html
(2) L’expression vient initialement du chercheur Quinn Slobodian, dont il sera question ici, mais il l’a tellement aimée qu’il l’a reprise, comme dit ici : https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/210125/le-reve-libertarien-du-monde-fragmente
(3) Cité dans l’excellent article précédent
(4) Trouvé dans https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/entendez-vous-l-eco/silicon-valley-la-tentation-libertarienne-7756930

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