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Billet de blog 8 juillet 2025

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Ah si j’étais d’extrême droite

Je suis prolo, écolo, journaliste, anarchiste, perdu en pleine fin du monde techno-féodale. C’est la galère. Alors, des fois, je me rêve en petit facho, arrosé par la thune à Bollo, éditorialiste tout-Stérin payé pour débiter des fake news. Ma vie serait tellement plus simple…

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Je suis un anonyme, simple et modeste punk à chat promenant ses Docs et sa crête dans un monde en ruines caniculaires.

Je suis un peu fatigué. Je m’emmerde, au quotidien, à faire les choses bien. Je m’échine, à mon échelle, à pouvoir léguer une planète plus ou moins vivable à mes futurs enfants. Quitte à affronter les gardes à vue et la Fiche S. Et pendant ce temps, des abrutis te disent partout que le-réchauffement-c’est-des-conneries-la-preuve-j’ai-eu-un-peu-frais-y-a-trois-jours, et s’injectent de la clim’ en intraveineuse après avoir envoyé une photo de leur barbecue à Sandrine Rousseau. Le tout, dans le confort de plus complet de leur connerie.

En tant que journaliste, j’essaye de faire le taf au mieux. Je source, l’interroge, je recoupe, j’enquête, je remets en question, je donne voix à ce qui ne le peut pas, je dubitative, je comment-pourquoi, le tout, bien évidemment, sans une once de moula. Et en face, comme l’a formulé l’ami Louis Witter, « c’est fascinant, t’as Jordan Hitler Florentin qui fait des micro-trottoirs insipides et Erik Frappeur Tegner qui joue l’éditorialiste sur CNews et ils ont tous énormément d’oseille pour en définitive ne produire aucune information ».

Alors que si j’étais d’extrême-droite...

Si j’étais d’extrême-droite, moi aussi, comme les Némésis, « féministes identitaires » (sic et mdr) bourgeoises en moccassin-serre-tête, je pourrais dire tout et n’importe quoi sur tous les plateaux, piétiner toute forme de réalité sociologique en live sur TikTok, et quand même me faire féliciter par le ministre de l’intérieur, qui me dirait « bravo pour votre combat, vous savez que j’en suis très proche » et qui m’enverrait des fleurs plutôt que ses flics.

Si j’étais d’extrême-droite, comme la bande de la revue papier Furia, lancée par des fachos ramollis du bulbe, plutôt que de récolter des procès pour diffamation et de distribuer mon journal-anar’ à la main en manif’, je pourrais me dire « anti-système » en étant diffusé dans tous les points Relay du pays grâce au soutien d’un milliardaire au beurre salé aussi éloigné du « système » que moi du chat qui dort sur mes genoux, et voir mon humour de merde, mes dessins moches et mes éditos mal branlés étalés en lettres capitales dans toutes les gares.

Si j’étais d’extrême-droite, moi aussi, comme les guignolos de Cnews, je pourrais dire que deux et deux font huit, que l’eau ça ne mouille pas, que les oiseaux font ouaf ouaf et que Zemmour est un grand politicien sans aucune contradiction, et pour six fois le salaire d’un prof’ d’école.

Si j’étais d’extrême-droite, plutôt que de m’excuser d’être au RSA, je pourrais détourner de l’argent public tout en disant qu’ils font chier tous ces chômeurs, là. Je pourrais tricher, voler, dissimuler, frauder et le faire sous les applaudissements enthousiastes des mêmes crétins égoïstes qui trouvent que filer un sandwich carré à un migrant c’est déjà bien trop.

Si j’étais d’extrême-droite, j’en aurais rien à foutre du génocide, de la Palestine, du Soudan, de la montée des eaux, des giga-incendies, des l’assèchement des sols, des cancers, des famines, des femmes frappées (sauf quand c’est un Noir), des gosses violés à Bétharram, de Trump, de Poutine, de Netanyahu, de tout qui flambe qui saigne qui meurt qui pleure, je regarderais fixement le nouveau-Moyen-Age qui vient et je me dirais, C’est bien, le beau monde que voilà.

Si j’étais d’extrême-droite, je n’aurais pas peur pour ma fille, mon fils à venir. Pour les vieux jours de ma mère.

Si j'étais d'extrême-droite, je serais déjà au gouvernement. 

Mais je ne veux pas être chauve et seul comme Ciotti, alors je reste un anarchiste crépu. Et fidèle jusqu’au bout, comme Darwich, à ce qui mérite vie : « La fin de septembre, une femme qui sort de la quarantaine, mûre de tous ses abricots, l’heure de soleil en prison, des nuages qui imitent une volée de créatures, les acclamations d’un peuple pour ceux qui montent, souriants, vers leur mort et la peur qu’inspirent les chansons aux tyrans ».

Salutations libertaires,

Mačko Dràgàn

Journaliste punk-à-chat red’ chef à Mouais.

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