J’ai atterri à Quito au début du mois d'avril 2016. Quelques temps plus tôt, j'avais postulé pour un travail bénévole dans une fondation agissant auprès des enfants pauvres des quartiers Nord de Quito, et ma demande avait été reçue favorablement ; j’ai donc passé près d’un an là-bas, au cœur de ce qui s’appelle ici les « Invasions ». Un terme étrange. Un terme, surtout, fortement évocateur, dans un pays qui, comme le reste de l’Amérique Latine, a justement vu son histoire bouleversée par une invasion, celle principielle, irréparable, des Espagnols. Mais nous parlons ici d’un tout autre type d’invasion. Les envahisseurs dont il est question ne sont plus des conquistadores avides de richesse, mais de pauvres gens ayant cherché à assurer une vie décente à leur famille, se battant pour obtenir un petit lopin de terre aride perdu dans les montagnes.
À l'Ouest de Quito une rocade, la Occidental, tranche les flancs des montagnes, joignant les quartiers populaires de Panecillo et San Roque, dans le centre historique, à Pomasqui, à l'extrême-Nord. Au-dessus de cette route, sur les versants, des quartiers pauvres se sont développés de façon anarchique au-delà de la limite de constructibilité, située à 2960 mètres. À partir des années 1970, une situation économique difficile dans les campagnes, doublée de réformes agraires maladroites, accroît de façon considérable l'exode rural. Des masses de peones, paysans sans terres et sans le sous, dont les lopins ne suffisent plus à assurer la subsistance, viennent alors gonfler les effectifs des deux principales métropoles, Quito et Guayaquil, qui s'avèrent incapables de faire face à la demande de logement de ces populations. Les nouveaux arrivants sont donc forcés d' « envahir » des terres privées ou municipales. Des organisations populaires (des cooperativas de vivienda) sont généralement créées à cette occasion, menées par des leaders plus ou moins scrupuleux, secondés par des avocats parfois véreux et bénéficiant souvent de l'appui d'un parti politique quelconque.
Il y aujourd'hui à Quito, selon un rapport de la mairie, 480 invasions, 178 dans le Nord, 154 dans le Sud, 110 dans le Valle, et 20 dans le centre. Ces espaces sont donc très étendus, et la population de ces quartiers, encore partiellement illégaux, ne cesse de croître, hébergeant des personnes souvent vulnérables et souffrant de problématiques liées à la pauvreté, au manque d'éducation, à la criminalité ou encore à l'accès aux services de bases. C’est pour cette raison que des organisations tâchent d’y travailler pour une amélioration des conditions de vie. La Fondation pour laquelle j’ai travaillé, Ecuasol, en fait partie. Elle est située tout en haut de l’Invasion de Pisulli-La Roldos[1]. Paysage de cahutes précaires fouettées par le vent, soulevant de lourde bourrasque de terre brune à la gueule des porcs attachés aux lampadaires, tandis que des feux d'ordures répandent dans l'air leur fumet âcre. Si, les samedis, dimanches et jours fériés, le terrain de football se peuple volontiers d'une foule endimanchées venue assister au match en dévorant des frites cuisinées sous des tentes montées pour l'occasion, tandis que les enfants s'amusent dans l'aire de jeux, la semaine, les rues, dont presque aucune n'est goudronnée, ne sont arpentées que par de rares passants, et par les camions des livreurs de gaz, de patates, ou les récupérateurs d'électroménager usagé. Le but de cette fondation est de s'assurer que les enfants ne traînent pas dans la rue, ne travaillent pas, aient le plus de chances possibles de finir avec leur succès leur parcours scolaire jusqu'au bachilerato (le bac), et pourquoi pas, puissent aller à l'université. Avant ou après l'école, la Fondation les accueille et les aide à faire leurs devoir ; à ceci s'ajoute un suivi psychologique, un suivi de santé, et des activités diverses menée par les volontaires-animateurs.
La Roldos, Pisulli. Deux quartiers jumeaux, aujourd’hui presque siamois, mais qui jusqu’il y a peu encore s’entre-déchiraient dans une lutte à mort pour la survie, devenant ainsi un cas extrême dans la masse des invasions équatoriennes. Je me dois cependant, avant de poursuivre, de poser le décor. Au Nord-Ouest de Quito, après le Barrio Chino de Cotocollao, un ancien village Indigène désormais intégré à la capitale et devenu une grande place commerçante où produits de contrebande et contrefaçons diverses s'échangent bruyamment sur les trottoirs, une fois passés la bibliothèque Espinosa et un couvent, une route trace vers les montagnes : la Rumihurco. Après la Occidental, elle s'enfonce entre deux rangées de murs couverts de graffitis. À droite, un grand golf jouxte la base militaire toute proche. Après une centaine de mètre, la route commence à grimper sur les flancs andins ; on pense alors avoir quitté la ville : serpentine, la route ondule dans le Bosque, une forêt de grands eucalyptus et d'agaves, propriété de l'armée. Après quelques minutes de cahots incessants sur un goudron constellé de nids de poule, cependant, des bâtiments se font apercevoir : se scindant en deux boulevards, la route se poursuit vers la zone dénommée El Consejo. Là, sur les trottoirs, de nombreux chiens errants en loque cherchent pitance ; des femmes aux traits indiens, chapeau sur la tête, tresse dans le dos, se tiennent devant leur boutique ; des jeunes gens vêtus comme à Harlem improvisent des raps dans la rue ; des adolescentes en uniforme minaudent, leur portable collé à l'oreille ; un junkie de seize ans se tripote le sexe d'une main, tenant de l'autre un sac plastique rempli de colle ; le linge sèche, multicolore, sur les toits ; des enfants jouent au football sur le pas de leur maison ; des comedores répandent, dans les rues le dernier succès de Romeo Santos, et une lourde odeur de friture ; les maisons, dont nombre sont agrémentées de fil barbelé ou de tessons de verre, sont grises, basses, compactées, reliées entre elles par une infinité de fils électriques, et aucun mur n'est pas couvert d'un graffiti quelconque (« J. te amo » ; « La vida es una puta mierda »...). L'un d'eux annonce : « La Roldos vale verga » (« la roldos c'est de la merde »), car c'est bien là que vous venez d'arriver : la Roldos.
L’histoire de cette invasion commence au début des années 80, sous l’impulsion d’une petite communauté qui commence rapidement à s’organiser, sur les collines. Des « mingas » sont instituées. Ce terme, venu du Quichua « Minkha », renvoyait, dans le système social des cultures précolombiennes, à un travail communautaire au service de la collectivité[2]. Au début de l'occupation, chaque nouvel arrivant de la zone, afin de rendre celle-ci habitable, devait donc se livrer à toute une série de mingas consistant principalement en du désherbage, l'arasage des troncs, le nettoyage de la montagne, notamment des ravines, ou encore l'aménagement de zones de cultures. Au terme de ces travaux, auxquels tout le monde, femmes, enfants, vieillards, était soumis, un lot était attribué, en échange de 5000 Sucres. Les familles s'installaient alors sur ces terrains durement obtenus, où elles se fabriquaient des huttes de fortune en attendant de pouvoir se payer la matériel nécessaire à la construction d'une véritable maison en dur. De là, peu à peu, toute la zone allant du Bosque à la route de Nono, tout au Nord, finit par être habitée. Ce système communautaire, cependant, fut dès le début parasité par des trafiquantes de tierras, les plus actifs ayant été ici Segundo Aguilar et Carlos Yacelga, qui ont considérablement influé sur la destinée du quartier. Les sommes perçues l'étaient bien souvent par ces « lotizadores », qui omettaient bien sûr de préciser que, ces terrains ne leurs appartenant pas, cette « vente » était illégale et ne les rendait en aucune façon propriétaires des lots sur lesquels ils s’installaient. De là viendront une bonne partie des problèmes à venir. La coopérative Jaime Roldós Aguilera est créée en juin 1982, et légalement établie en 1983. Elle avait eu différents propriétaires avant que le Ministère du Bien-être Social (MSP) ne la rachète, et c’est là, sous la présidence d’Osvaldo Hurtado, que les lotissements commencent à être distribués, les deux trafiquants demeurant seuls maîtres à bord de ces terres communales, se chargeant de répartir la moitié des lots, dans une complète désorganisation. Et c’est ainsi que, dans les invasions, la situation ne tarde pas à dégénérer, sur fond d'intérêts personnels, d’intrigues politique et de nécessité, pour les habitants, d'assurer la survie de leur famille.
Voici comment les choses se sont déroulées. Dans la froide nuit du 11 novembre 1983, dans les alentours de vingt heures, une centaine de personnes se rassemblent dans un lieu où depuis a été construit le centre commercial du Condado, qui rassemble un cinéma multiplexe, un KFC, un Macdonald, des banques et des boutiques de luxe. À leur tête se trouve Edgar Coral, un jeune et massif Manabita (né dans la province de Manabi) engagé au sein du parti marxiste-léniniste Movimiento Populario Démocratico et qui, quelque temps auparavant, alors qu'il militait avec ses camarades du Front Révolutionnaire Universitaire de Gauche du côté de Cangahua, avait pris connaissance de l'existence, sur les hauteurs, de cette Hacienda détenue par le MSP et encore partiellement inoccupée. Il décide rapidement de mettre en place une action, et déclarera plus tard : « Je ne crois pas que la prise de la ferme ait été une invasion, il fallait donner une fonction sociale à cette terre inculte, et c'est pour cette raison que nous avons pris possession des lieux ». Car c'est bien ce qu'il se propose de faire, cette nuit-là : monter jusqu'à la Coopérative Jaime Roldos afin d'y loger les gens qui se sont ralliés à lui, et qui s'élancent donc, en camionnette, en vélo, en motocyclette, mais surtout à pied, à l'assaut de la montagne. Ils s'emparent de 108 hectares (sur 358) de terres en amont de la Roldos, et le moins que l'on puisse dire et qu'ils ne sont pas accueillis les bras ouverts. Inquiets de se voir faire déposséder de leurs chozas (leurs huttes) par les pauvres hères ayant débarqué nuitamment, et manipulés par deux dirigeants craignant de voir leur leadership contesté par cette nouvelle communauté, les Roldosistas passent à l'attaque. Dès le 16 novembre, un groupe armé et mené par Aguilar, Yacelga, Osvaldo Solano et un étranger de nationalité Yougoslave du nom de Tomislav Invesich, qui a atterri ici à la suite d'on ne sait quel improbable hasard, dynamitent et tirent sur la toute fraîchement créée Coopérative Pisulli, tuant Jaime Vargas, un jeune enfant ; arrêtés après les événements, Invesich et quatre autres assaillants sont presque aussitôt libérés par des « ordres supérieurs ». Cette date marque le début d'une série d'agressions incessantes, auxquelles les Pisulenos répondront eux aussi par la violence : l'engrenage de la vendetta est lancé.
Le 11 avril 1984, la Coopérative Pisulli obtient une existence juridique. Un bras de fer commence alors entre les deux communautés, afin que les terres communales leurs soient équitablement réparties. Dans cette lutte, Aguilar et Yacelga, rompus aux subtilités de la basse politique, se montreront plus habiles que leurs adversaires. À la fin du gouvernement d'Hurtado, cependant, tous les espoirs étaient encore permis, le Congrès ayant reçu et ratifié un projet de loi qui, s'il avait été appliqué, aurait permis d'apporter une solution pacifique au conflit, au moyen d'une distribution raisonnables des terres entre les deux rivaux. Mais le gouvernement Démocrate Chrétien met son veto à ce projet et, quatre jours avant la fin de son mandat, dans un fumeux coup de théâtre, adjuge l'intégralité de la propriété à la Coopérative Roldós. À partir de là, il devient évident que le conflit ne pourra plus aller qu'en s'aggravant. Ce qui est désormais une véritable petite guerre civile est ainsi d'autant plus sanglante que des intérêts politiques s’y mêlent. D'un côté, les habitants de Pisulli peuvent compter sur le soutien du MPD, ce qui se retournera en partie contre lui quand des dissensions intestines pour le contrôle de la coopérative entraîneront des fusillades lors du VIIème Congrès de l'Union Générale des Travailleurs de l'Équateur (UGTE), où un affrontement par balles fait trois blessés. De l'autre, Aguilar et Yacelga, une fois Osvaldo Hurtado remplacé à la présidence par Léon Febres Cordero, se mettront sans attendre au service de ce dernier, intégrant même les « brigades de choc » de ce président qui, comme l'a écrit Hernando Calvo Ospina, « a gouverné l’Équateur d’une main de fer et le revolver à la ceinture, comme s’il se trouvait dans l’une des nombreuses haciendas dont il était propriétaire »[3]. C'est lui-même qui, quand Aguilar et Yacelgase chargeront de répartir en lots (« lotizar ») la moitié des domaines disputés, couvrira les frais.
Disciple des théories économiques de l'école de Chicago et grand ami de Reagan, Febres Cordero a appliqué au pays tous les préceptes néolibéraux professés par le FMI et la Banque Mondiale, comme la libéralisation du commerce extérieur, l’élimination des barrières aux investissements directs de l'étranger, des privatisations massives ou encore la déréglementation des marchés, notamment du travail. Ces mesures furent de plus accompagnées, au prétexte de l'apparition d’une guérilla gauchiste groupusculaire, d'une politique répressive intense, menée par une police clandestine nommée la SIC-10, pratiquant en toute impunité la torture, le meurtre et l'intimidation, si bien que ses membres supposés font aujourd'hui l'objet de poursuites, par une « commission de la vérité », pour crime contre l'Humanité. On évoque, à ce propos, une sorte de Plan Condor à l’Équatorienne. On suppose que plus d'une centaine de personnes a perdu la vie durant cette période sinistre, qui prend fin en 1988, lorsque Rodrigo Borja Cevallos, candidat de la Gauche Démocratique, remporte les élections présidentielles. Et qui donc furent amenés à comparaître devant la commission ? Segundo Aguilar et Carlos Yacelga, bien sûr.
Il faut bien dire que ceux-ci, à la tête d'un groupe paramilitaire, n'y allèrent pas avec le dos de la cuiller, mais plutôt avec la crosse du fusil-mitrailleur, pour récupérer ce qui, à leurs yeux, leur était dû. Les quelques faits suivants, sélectionnés parmi de nombreux autres, en témoignent : le 14 octobre 1984, un commando mené par un certain Aldino Bravo Cabrera attaque Pisullí avec des armes à feu de divers calibre, des explosifs et de l'essence, tuant trois personnes, faisant des dizaines de blessés et brûlant de nombreuses maisons ; le 9 juin 1985, l'école et le jardin d'enfants de Pisullí sont dynamités, alors que plus de quatre cents enfants s'y trouvent, et ce type d’attaque se reproduira très régulièrement ; le 6 avril 1983, 16 demeures appartenant aux familles des sociétaires de la Coopérative sont détruites, ce qui provoque des dizaines de blessés ; le 31 juillet de 1986, à 19h30, dans les rues 25 mayo et Cuicocha, dans le quartier de Cotocollao, un bus faisant le parcours jusqu'à Pisullí est explosé à la dynamite ; le 31 octobre 1986, à 5h30, à bord d'une camionnette, Segundo Aguilar et Carlos Yacelga eux-mêmes, selon des témoins présents, mitraillent le bus n° 6 de la ligne Mitad del Mundo, faisant un mort de plusieurs blessés ; le 25 novembre 1986, des hommes revêtus d'uniformes militaires et menés par Aguilar et Yacelga, mitraillent et dynamitent Pisullí, faisant deux morts, et blessant plusieurs dizaines de personnes ; le 27 décembre 1986, le groupe paramilitaire attaque Pisullí, dynamitant, mitraillant, incendiant et laissant Mr. Gamboa Vega les deux mains coupés et les yeux crevés ; le 6 juillet 1987, à 11h00, les membres de la bande d'Aguilar et Yacelga, armés de mitraillettes, de pistolets, de revolvers et d'explosifs, mènent une nouvelle attaque, bilan : 15 maisons brûlées, 18 personnes blessées, une petite fille gravement brûlée ; le 5 octobre de 1987, un enfant de quatre ans tombe criblé par une rafale de mitrailleuse suite à une attaque de la bande ; le 30 octobre 1987, Gloria Montes, 35 ans, mère de quatre enfants, est violée est exécutée de deux balles dans la tête sur le domaine de la Coopérative Pisulli ; le 1er février 1988, jour d'élections, une nouvelle attaque de la milice fait un mort et un blessé grave.
À ces agressions, les habitants de Pisulli répondirent eux-mêmes par d’autres agressions. La vie était rythmée par l'alternance entre attaques et représailles. Les zones les plus dangereuses étaient celles qui se situaient sur les bordures de Pisullí, un peu plus bas de l'église, là où se trouve aujourd’hui le centre communautaire. Là, les forces de La Roldós se rassemblaient pour repousser les Pisuleños, les deux assaillants étant séparés, selon certains témoignages, par une véritable tranchée. Les attaques se faisaient à pied ou par débarquement en camionnette, poussant les riverains occupés à travailler à se cacher dans des abris après avoir dissimulé leurs outils dans la terre. Pour franchir la limite entre les deux quartiers, par exemple si on désirait se rendre à Nono, au Nord, il fallait, raconte-t-on, en passer à Pisulli par un véritable check-point, où les identités de ceux qui souhaitait franchir la ligne étaient contrôlées ; on dit aussi que les gens identifiés comme roldosistas étaient tabassés, parfois même tués, et qu'il fallait donc mentir pour traverser la « frontière » sans encombres.
La lutte et la violence deviennent donc, le temps passant, une véritable façon de vivre au cœur des Invasions. Après les travaux d'aménagement du secteur, les incendies, les vols, les pillages, les bagarres, les enlèvements, les fusillades et les plasticages deviennent, une fois le dernier eucalyptus arasé, une fois arrachée toute la mauvaise herbe, les nouvelles tâches quotidiennes d'une partie des riverains. L’appel à la Minga, qui se faisait par radio et était initialement consacré aux travaux collectifs, devient alors un véritable appel au combat, prélude angoissant à la charge meurtrière de l’un ou l’autre camp. Des tours de garde étaient opérés dans les rues. La nuit, les femmes veillaient afin de garder les maisons, de peur qu'on ne les vole.Les affrontements sont d'autant plus violents que les dirigeants, plus particulièrement du côté de la Roldos, ne laissent pas de jeter de l'huile sur le feu : le fanatisme meurtrier d’Aguilar et Yacelgaapparaît ainsi clairement dans un communiqué délirant, publié dans les pages du journal Ultimas Noticias en avril 1985, et dans lequel ils «exigent du gouvernement national le retrait des forces publiques », faute de quoi ils n'hésitent pas à formuler cette menace : « Dans le cas contraire, les cadres dirigeants ne pourront être tenus responsables des pertes de biens, d'immeubles ou de vies » Durant les divers épisodes de violence, les habitants devaient fuir leurs cabanes, vivant ainsi, en plus d’une vie laborieuse difficile, avec cette peur permanente d’une attaque des « autres », par dynamitages, fusillades, coups de couteau, coups de poing. Un certain Hector se rappelle : « Quand j'étais au jardin d'enfants, nous avions une phobie des pisuleños, c'était comme dire les Péruviens contre les Équatoriens [une guerre durable a opposé les deux pays, N.B.], quand on étudiait l'Histoire à l'école on nous apprenait ça à propos des Péruviens et des Équatoriens, pisuleños et roldosistas, on ne pouvait pas se voir (…). Il y a à peu près dix ans les choses ont commencé à se calmer, et il y a environ cinq ans, peut-être sept, les choses se sont complètement calmées »[4]. Ces paroles sont dites en 2014. En octobre 1988, déjà, Aguilar et Yacelga avait été arrêtés et incarcérés. Après avoir un temps continué à diriger la coopérative depuis leur cellule, ils perdent peu à peu tous leurs partisans, et ils sont aujourd'hui considérés comme non grata dans le quartier.
De nos jours, ici, peu de monde en parle, de même de toute façon qu'on se souvent garde bien d'évoquer trop précisément les événements de l'époque. Cela fait désormais presque une décennie que les affrontements ont cessé pour de bon dans le quartier ; la seule chose qu'il en reste est le monument aux morts construit à l'entrée de Pisullí (« el Obelisco »), des cicatrices et des blessures chez les personnes mêlées de grès ou de force à ces affrontements et le désir, toujours, de légaliser les terres.
La Coopérative initiale de la Roldos, aujourd'hui, est découpée en 11 secteurs. Son objectif est de chercher à améliorer le quotidien au moyen de la planification de divers travaux, approuvés lors d'assemblées générales. Quiconque est libre désormais, partant du Consejo, suivant un asphalte sinueux, de rejoindre la Yerovi, la voie principale de Pisulli, où des enfants en uniforme se précipitent, au sortir de l'école, pour acheter des friandises dans une tienda, ignorants de l'histoire du quartier où ils sont nés, ignorants des morts, des blessés, des cadavres reposant sous le goudron. Grand bien leur fasse : comme le dit Hector, « ceux qui sont venus après ont été plus heureux, parce qu'ils ont oublié » (« Los que vinieron después vivieron felices porque no recuerdan »)[5]. Et effectivement, quand je parle de tout cela à mon amie G., âgée de 18 ans, elle me dit que oui, sa mère lui en parlé ; elle me dit qu'avant, ici, il n'y avait qu'une montagne, des arbres, et rien d’autre ; elle me dit qu'elle sait qu'il y a eu des morts, à la Roldos comme à Pisulli ; mais tout ceci lui semble lointain, un peu abstrait. Seuls les anciens entretiennent une certaine nostalgie vis-à-vis de ce passé pourtant douloureux, tout en ayant bien conscience du chemin parcouru, même s’il fut long, depuis les débuts, quand tout n’était que cahutes précaires de plastique et de branchages, sans eau, sans électricité. Le secteur a dû attendre longtemps avant de pouvoir disposer des services basiques. Jusqu'à il y a peu, il n'y avait pas même de service de transport. Les riverains devaient rentrer chez eux à pied, les taxis refusaient de monter (c'est encore souvent le cas aujourd'hui), et les masses de passants agglutinés dans les rues les rendraient impraticables pour les voitures. Les gens se lavaient et faisaient leur lessive dans les rivières. Toutes les infrastructures sont apparues très progressivement. La première école de la Roldos a été la Manuel Abad, non loin des limites avec Pisullí ; ces établissements sont désormais en nombre suffisant pour accueillir tous les enfants du quartier, jusqu'à leurs 18 ans, bien que la qualité d'enseignement, dans des classes surchargées d'enfants indisciplinés, demeure médiocre. Le premier dispensaire du quartier existe depuis le début des années 90. À ses débuts, on devait y attendre son tours dès à partir de trois heures du matin. Le quartier dispose également désormais d'un Centre de Développement Communautaire, ou CDC, symbole de l'unification des deux quartiers. Massif, le bâtiment s'élève près de l’Église, sur ce qui fut l'une des zones de conflit les plus intense ; c'est désormais un lieu de rendez-vous, dans le parc duquel viennent souvent jouer des enfants, et où les amoureux se retrouvent. Deux Unités de Police Communautaires, ou UPC, ont été construites dans le secteur ; cependant, comme me l’a souligné un jour un ami du quartier, bon nombre de policiers envoyés dans la zone sont des débutants.L'implantation de la police n'a donc dans un premier temps pas eu une grande influence sur la baisse de l'insécurité, qui s'est surtout faite grâce à l'auto-organisation de la communauté. Le secteur commence à disposer de l'électricité et du téléphone à partir de 1992 et, à partir de 1997, d'un réseau d'assainissement et d'eau courante, encore inachevé. Certaines rues ont été pavées, bien que peu d'entre elles aient un nom, seulement un numéro, et les huttes de planches ont laissé place à des habitations en parpaings.
Les anciens ayant grandi dans le quartier se rappellent encore avec émotion de leurs jeunes années, malgré la guerre, malgré les violences. Bon nombre ne comprennent pas les nouvelles générations, que les politiques sociales menées par Rafael Correa ont permis d'accéder à un confort minimum, notamment aux nouvelles technologies, et qui se désintéressent du passé trouble du secteur où sans doute, pour la plupart, ils passeront leur vie. La plupart sont bien décidés à laisser le passé là où il est. Les anciens leaders ont laissé place, les temps ayant changé. Aguilar et Yacelga retourneront peut-être très prochainement en prison, au motif de crime contre l'humanité. Edgar Coral, quant à lui, est toujours en activité dans la communauté, mais plus discrètement. Son nom fut brièvement remis sur le devant de la scène en janvier 2011, quand Correa, venu faire une allocution dans le quartier, s'est exclamé à son propos : « On m'a dit que ce trafiquant de terres s’appelait Edgar Coral. Ces trafiquants, plus jamais nous ne les laisserons rentrer », s'attirant des huées tandis qu'une partie de la foule criait : « Coral ! Coral ! », ce qui a poussé le président à menacer de déloger les adeptes du leader. Depuis, ce dernier envisage de porter plainte pour injure publique et diffamation. Encore populaire ici, il n'a cependant pas que des admirateurs ; comme le souligne un article d’El Comercio, de nombreux riverains sont fatigués de son omniprésence, et pointent du doigt les travers de sa gérance : à peine 260 certificats établis en 10 ans, en échange, dit-on, de sommes d’argent et de participations à des marches électorales.
Il reste aujourd’hui au secteur à sortir de la pauvreté, et à faire oublier aux autres habitants de Quito sa sinistre réputation, ce qui ne sera guère facile, dans la mesure où certaines statistiques ne sont pas encourageantes ; ainsi que le rapporte la revue Valor Agregado[6], « selon Hernández, Maldonado et Calderon (2010), le secteur atteint un taux moyen de pauvreté de 95 % (…). Les données relatives à la sécurité ne sont pas non plus optimistes : les informations mises à disposition par le Ministère de l'Intérieur rendent compte de faits délictueux permanents dans cette zone ». Vivre ici est difficile, plus encore que dans une bonne partie du pays qui, malgré les succès indéniables de la « Révolution Citoyenne », souffre encore de nombreux problèmes sociaux, du reste souvent propres à la culture latino-américaine en son entier, une culture encore en souffrance, minée par la violence et les inégalités. Et ces plaies apparaissent d'une manière d'autant plus douloureuse dans un quartier populaire comme la Roldos.
La situation des femmes, qu’elles soient filles ou mère, est sans doute la le domaine où ces problèmes s’expriment de la façon la plus criante. L’interdiction de l’avortement, notamment, crée de nombreux cas de maternité problématique. Elles sont légions, dans le quartier, les adolescentes-mères que l'on voir monter dans le bus, encore jolies et frêles, leur bambin emmitouflés dans une couverture thermique. Elles ont seize, dix-sept ans, et doivent s'occuper du devenir d'un enfant dont, bien souvent, elles n’ont pas souhaité la venue au monde. Et le futur qui les attend n’est pas rose. D., seize ans, et son bébé, presque mort faute de soins. C. et son deuil –son enfant est mort alors qu’elle n’avait que quatorze ans. Mère de F., vendue par sa famille à son mari, alors qu'elle n'avait que treize ans. Mère de K., que son époux a voulu immoler à l'essence avant, bien sûr, de se répandre en excuses, tel un enfant capricieux. Mère de K., qui a du élever, en plus de ses fils, la petite N., sa petite-fille, abandonnée par ses parents. Mère de G., qui a dû et doit encore élever douze enfants, les siens, celui de son mari, et ceux de sa sœur décédée, en plus de son emploi de domestique.
La tâche de ces mères est d'autant plus dure qu'à la Roldos, de graves dangers pèsent sur les destinées des enfants. Parmi ces dangers, les deux principaux sont sans doute la drogue et la criminalité,qui minent le quotidien des classes pauvres équatoriennes.
La drogue, tout d'abord. Elle provient de différents réseaux, qui la plupart s'approvisionnent à la Ofelia ou à Comité del Pueblo. La marijuana, (hierba, mota…) est très répandue. Plus grave, le polvo, du crack, qu'il est très facile de se procurer à bas prix, constitue une véritable plaie. Dans les parcs, les terrains vagues, à la quebrada, on le consomme ici grâce à des patates ou des pommes, qui font office de pipe, et en l'espace de quelques mois, quelques années, il transforme ses adeptes en véritables légumes. Une fois tout son argent dépensé en polvo, il ne reste plus au drogué qu'à inhaler de la colle dans un sac plastique, se détruisant ainsi à jamais les dernières cellules grises qu'il aurait pu conserver.
La délinquance, ensuite. La criminalité, à la Roldos, est un phénomène relativement quotidien. Sans noircir le tableau, ce que hélas beaucoup font à Quito, les délits de toute sorte, des coups et blessures à l'homicide en passant par le trafic, la détention d'arme, le crime en bande organisé, le braquage ou le cambriolage, constituent ici une réalité à laquelle les riverains se sont habitués, adoptant seulement quelques précautions élémentaires, comme ne pas sortir la nuit dans les rues désertes. Voici le type d'anecdotes que l'on est susceptible d’étendre ici : un soir, un jeune type est entré dans l'immeuble d'H., une amie du quartier. Il venait de voler un potable, et voulait se réfugier dans sa cour intérieure, poursuivi par ses victimes ; effrayé, il s'est caché dans les toilettes des voisins du dessous. Un homme est venu sonner, avec sa bande ; il a montré le pistolet qu'il avait dans sa ceinture, et les voisins l'ont donc laissé récupérer le voleur, qui a été découvert le lendemain, dans une ruelle et un triste état. Un autre jour encore, un homme a été retrouvé mort dans la quebrada, tué de cinq coups de couteaux dans la tête. Dans la rue du gymnase, à partir de minuit, les cris, bruits de bagarres et de sirène de police sont plus que fréquents.
Une partie de ces faits délictueux sont imputables à des pandillas. Elles comportent une dizaine de membres, qui arborent des tatouages et des vêtements spécifiques, signalent leur territoire grâce à des graffitis, énigmatiques aux yeux des giles (ceux n'appartenant pas à une pandilla) et se livrent à des formes diverses de criminalité et de violence : racket, trafic, vols, « droits de passage ». L'une des pandillas de la Roldos, démantelée il y a quelques années lors d'une descente de la police dans tous les quartiers Nord et dénommée Los Perajos, possédait, selon le document mis en ligne par le ministère de l'intérieur à cette occasion, de fortes sommes en liquide ainsi que des armes de très gros calibre. Ce phénomène met en fait en lumière les déviances et manquements d'une culture violente, celle du Continent Latino-américain, et celle d'une société elle aussi violente, mais d'une façon plus insidieuse, celle mise en place par l'Occident capitaliste, qui s'est ici durement imposée. Au sein de leur bande, les pandilleros tendent à simplement exprimer de façon dédoublée la violence dans laquelle ils baignent au quotidien, trouvant de la sorte dans ce processus une fonction sociale qui leur est refusée par leur statut inférieur au sein des sociétés consuméristes, dans lesquelles la course à la réussite, et la manifestation des apparences de cette réussite, est tenue pour primordiale[7].
Tout ces éléments rendent difficile la vie dans les invasions. Prenons une famille de la Roldos ou de Pisulli faisant partie des couches les plus pauvres. Elle comporte jusqu'à une dizaine de membres, des grands-parents jusqu'aux petits-enfants, et tout ce petit monde vit dans une maison plus ou moins salubre, plus ou moins grande. Parfois une simple baraque de planches isolées avec du papier journal. Si la famille est plus réduite, il arrive bien souvent que tout le monde dorme dans le même lit, les parents avec leurs enfants. Si le père n'est pas parti il y a longtemps, s'il n'est pas mort assassiné, et s'il travaille, il est payé le salaire minimum, soit 370 dollars par mois, pour un emploi de garagiste, de maçon, de gardien de parking, de chauffeur. S'il est Noir, il aura eu encore plus de mal à trouver cet emploi. La mère, quant à elle, à qui il revient de s'occuper des enfants, des repas, de la lessive et de tout le reste, tient une boutique, ou travaille à mi-temps, donc pour 160 dollars ou moins, comme domestique, couturière dans une usine textile, ou vendeuse à la sauvette. Dans ce dernier cas, elle rejoint chaque matin, très tôt, la horde de pauvres gens qui, grimpant dans les bus, s'installant dans les rues commerciales et touristiques ou se postant aux feux rouges des grand axes routiers, crient tout le jour durant : « cañas cañas cañas ! », « mandarinas ! », « esfumillas ! », « a dollar, a dollar ! », leur marchandise à bout de bras. Il arrive souvent que leurs enfants les accompagnent, le travail des mineurs étant ici une pratique difficile à éradiquer, quoique interdite. Ces emplois informels, parfois plus semblables à une sorte de semi-mendicité, rapportent peu. Ni le père, ni la mère n'ont un niveau d'éducation très élevé. Si la famille comprend une adolescente, celle-ci est peut-être déjà enceinte et a quitté le lycée ; le jeune homme quant à lui, qui n'a que très peu de chances d'aller un jour à l'université, est peut-être tombé dans la petite délinquance, et consomme du polvo. Le père rentre souvent ivre. Peut-être fera-t-il un jour un séjour de quelques mois en prison. Les parents battent souvent leurs enfants. Les gamins sont fréquemment laissés à eux-mêmes dans la maison ou dans la rue, quand leurs parents sont au travail, et doivent se débrouiller seul pour aller à l'école, pour s'habiller, pour se faire à manger. Il peut arriver qu'un vol, dans la rue ou lors d'un cambriolage, prive la famille de précieuses ressources financière, la mettant en difficulté pendant plusieurs mois. Les enfants souffrent de malnutrition, en plus de divers problèmes, notamment de peau, dus à une hygiène défaillante. Et ainsi va la vie.
Pendant ce temps-là, à Cumbaya, le ghetto des pelucones (bourgeois), de jeunes gens de bonne famille se pavanent dans des voitures de luxe avant de se rendre dans leur université privée, où il étudient le droit ou le commerce, tandis qu'à quelques pas de là, dans leur villa, leurs parents se font apporter le dîner par leur bonne de Pisulli ou de Comité del Pueblo. La politique sociale de Correa a certes réduit les inégalités, et a apporté à la Roldos des dispensaires, des commissariats, des routes, des parcs, mais elle n'a pas fait de miracles.
La vie quotidienne à la Roldos, malgré tout, est agréable. Une atmosphère de quartier chaleureuse règne ici. Tout le monde se connaît, se salue, discute à l'entrée des tiendas. Principalement peuplé pat des gens venus de la campagne, le secteur fait parfois plus penser à un petit pueblo perché sur les montagnes qu'à une ville, avec ses petites baraques, ses cochons, et ses cris du coq au matin. Les gens d'ici, surtout les plus âgés, par leurs manières de faire, sont plus des sortes de paysans urbains que de véritables citadins, comme ceux du centre. Les fêtes rassemblent tout le monde ; et le dimanche, on se retrouve à l'église. Les Invasions des collines du Nord sont ainsi comme un bout de campagne aménagé à l'écart de la ville. Un village andin, dont la relative bonhomie vient compenser ce que sa part urbaine comporte de dangers et de désagréments. Peu à peu, tous les visages m’étaient devenus familiers. Giovanna, pimpante quinquagénaire riante et aimable, chez qui nous devions régler les factures d’électivité et de téléphone. Juanita, Indienne Quichua au beau visage constamment coiffée du chapeau traditionnel, qui tient son magasin avec l'ensemble de sa famille. Le vendeur de riz qui, assis à l'entrée de sa boutique, les deux bras nonchalamment posés sur une batte de base-ball, vend des cigarettes colombiennes de contrebande. Le coiffeur d'en face, qui a un temps quitté le quartier pour vivre aux États-Unis, supposément pour éviter les problèmes que lui attirait son homosexualité. Andrés et son frère, les Gemelos, deux mauvais garçons en tous points similaires, qui venaient en bas de notre fenêtre pour me taxer des cigarettes. La vendeuse de boisson miracle, un verre de sang, un autre de décoction d'aloé vera, le plus sûr moyen de vomir toutes ses tripes dans les deux minutes qui suivent. Le prédicateur fou, qui arpente le quartier en psalmodiant ses discours délirants sur la dégénérescence morale et la fin du monde, coiffé de son Panama.
Tout ce petit monde se croise, le soir, dans des rues qui deviennent très animées à l'heure de la merienda, le repas du soir, souvent des frites ou du riz accompagnés de viande. Devenu adepte de la malbouffe équatorienne, j’étais connu de l'ensemble des vendeuses des comedores du coin, avec lesquelles je devisais de choses diverses, souvent relative à ma condition d'immigré français, attablé au coude-à-coude avec des ouvriers dévorant leur cuisse de poulet. Puis, après 22 heures, les rues se vident, laissant la place aux rôdeurs mal intentionnés et aux chiens errants. Seul le finde voit le quartier s'agiter jusqu'à un peu plus tard, l'unique boîte de nuit du coin, le Doble Via, un rade surveillé par un vigile unijambiste ressemblant à Dany Trejo, accueillant des pochards, jeunes gens du quartier et couple avides de salsa jusqu'à une heure avancée de la nuit. Il n'est pas rare que des gens se fassent dépouiller en en sortant, après sa fermeture, lors de laquelle les bagarres sont courantes. La vie reprend vers cinq, six heures du matin, au son du camion des vendeurs ambulants qui, à coup de klaxon ou grâce à un mégaphone, appâtent le chaland. Les premières chansons de reggaeton, de bachata, ou un quelconque tube kitsh exhumé des archives de l’Eurovision, se font entendre dans les cours intérieures, ou par les fenêtres ; une nouvelle journée commence.
Perpétuel recommencent du même –et tous, désormais, sont heureux, dit l’ancien, parce qu’ils ont oublié.
M. D.
P.S. : un gran saludo à tous les enfants d'Ecuasol, ainsi qu'aux professeurs, et bien sûr à mes amis volontaires.
[1] Pisulli qu’il est possible d’orthographier indifféremment avec un ou deux « l ».
[2] Les Incas, quant à eux, instituèrent la mita, plus comparable à une corvée au sens féodal.
[3] Hernando Calvo Ospina, En Équateur, fin de la politique de l'amnésie, le Monde diplomatique, Blog Américas, février 2012
[4] Citation tirée du mémoire de psychologie sociale de Emma Carolina Torres Moreira intitulé « Aproximaciones desde el psicoanalisis a la comprension de los procesos de construccion de la memoria en la historia de la conformacion del barrio ''la roldos'' », soutenu auprès de la Universidad politecnica salesiana sede Quito en décembre 2014, et disponible en ligne
[5] Ibid.
[6] Valor Agregado, Revista para la Docencia de Ciencias Económicas y Administrativas en el Ecuador N° 2, diciembre de 2014 , Quito, Ecuador
[7] Sur ce sujet, voir : Maura Cerbino, Pandillas juveniles : cultura y conflicto de la calle, ed. El Conejo, ed. Abya Yala, Quito, Ecuador, 2004. Disponible en ligne.