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Billet de blog 26 septembre 2024

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Le « parti de l’ordre » sème le chaos (et c’est ça le plan en fait)

« Trois priorités : rétablir l'ordre, rétablir l'ordre, rétablir l'ordre. Je crois à l'ordre. L'ordre comme condition de la liberté » (Benito Retailleau). L’anarchie c’est l’ordre sans le pouvoir. Ici nous avons le pouvoir et le chaos. Macron a réussi l’exploit de mettre Marine Le Pen aux commandes sans qu’elle ait eu à gagner des élections. D’où cette question : WTF, qu’est-ce qu’il s’est passé ?

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Quand, le 22 septembre 2024, Michel Barnier, entre deux coups de fil de Marine le Pen lui demandant s’il veut bien lui emmener son UberEat de midi et fissa, a appelé à faire de la santé mentale « une grande cause nationale », il pensait sans doute, du moins on l’espère, à celle de notre président, que j’imagine actuellement barricadé dans son bureau de l’Élysée, Brigitte frappant désespérément à la porte pour lui demander d’au moins enfiler un slip.

Car voilà que notre Manu a choisi comme arbitre de nos destins précaires les 141 députés d'extrême-droite, au lieu des 192 députés de gauche dont la coalition est arrivée en tête aux dernières élections par lui-même sollicitées. Stupeur, tremblement, nous sommes tous choqués et déçus et non pas du tout on s’y attendait évidemment, mais il n’en demeure pas moins que le degré de servilité avec lequel notre nouveau premier ministre s’écrase misérablement devant les exigences du parti fasciste, quitte à humilier publiquement un ministre pour crime de « lèse-Le-Pen », suscite de multiples interrogations.

Étrangement, c’est sur le compte X d’un fach’, un royaliste brutalement et éphémèrement projeté sur le haut du bol de pus des réseaux asociaux à cause de sa condamnation fervente des enseignements du Planning familial, que j’ai trouvé la meilleure analyse, du point de vue de l’adversaire donc, de la séquence puante que nous n’avons pas fini de traverser. « Pourquoi Macron, chantre du progressisme, se demande le fanzouze de Philippe de Villiers, a-t-il accepté la nomination d'un gouvernement aussi conservateur ? » Car oui, vous avez bien lu, même les partisans du retour au temps bénis de Jacquouille la Fripouille trouvent ce gouvernement de rebuts démonétisés de la Manif’ pour tous un peu réac’ sur les bords.

Voici quelle est son analyse *. « En 2027, pour encore quelques élections, ce sont les retraités qui feront basculer le scrutin. Si le Rassemblement National grappille de plus en plus de terrain sur cet électorat, ce dernier a toujours été acquis aux forces de l'ordre ». Un « parti de l'ordre » qui n'est selon lui « rien d'autre que celui de la stabilité. Vous savez, le fameux grâce auquel « les marchés sont rassurés » et qui nous protège ‘’des révolutionnaires insoumis et de l'extrême droite fasciste’’ », et cette définition est… étrangement exacte, même si évidemment Godefroy de Montmirail se lamente sur « la diabolisation dont nous sommes victimes » nous », les fascisto-royalistes s’entend), puisque, dit-il... « cet extrême-centre n'a rien à envier à qui que ce soit en termes de radicalité ». Mdr, même eux s’en rendent compte. Il poursuit : « Barnier et sa clique représentent un centrisme libéral-conservateur et européiste qui nous emmène droit dans le mur. Face à cela, le RN est piégé, lui qui est favori pour 2027. Il doit lui aussi incarner le parti de l'ordre pour que l'électorat retraité lui soit favorable […] Le RN entame sa dérive nécessaire (mais est-elle souhaitable?) pour sa victoire vers le centre. Encore une fois Macron est génial (malheureusement) : en même temps qu'il s'assure le soutien de l'électorat déterminant le gagnant des présidentielles, il oblige le RN à renier ses positions historiques pour rester dans la course et, dans le même temps, il réduit la gauche à d'éternels rabat-joies ‘’qui ne veulent pas que le pays avance’’ ». Et de conclure : « Bref, ce gouvernement n'est rien d'autre qu'une mise en bouche des élections de 2027. Qui incarnera le mieux " le parti de l'ordre" ? »

Ne nous en cachons pas, le fait qu’un possesseur de marcel « Puy du Fou forever » développe ce genre d’analyse devrait nous inquiéter.

Car le chevalier de Pardaillec a raison. Tout ceci est une stratégie macroniste délirante mais bien rodée pour les prochaines présidentielles, et destinée à nous donner le « choix », pour la troisième fois, entre la droite extrême et l’extrême-droite, la quête existentielle unique du robot-Manu semblant être de satisfaire les grands patrons et le marché jusqu’à la fin des temps, quitte à ce que soit sous la forme d’un pouvoir à la Milei. C’est un fanatique en Guerre Sainte pour le capitalisme et, actuellement forcé à se réfugier dans ses derniers retranchements, prêt à mettre le pays à feu et à sang pour parvenir à ses fins.

En plein djihad pour la plus grande gloire de Dominique-Seux-au-plus-haut-des-cieux, il veut s’assurer que le Rassemblement National, son sparring-partner préféré, soit le plus présentable possible aux prochaines élections, donc rendre son idéologie majoritaire, au moins en apparence, dans notre société, et non pas celle de cette infâme gauche redistributrice. Et s’il faut que Bruno Retailleau, à côté duquel même Darmanin a l’air d’un fan de Tryo, piétine les droits des personnes exilées, des LGBT+, des pauvres et des marginalisés eh bien tant pis, on ne fait pas d’omelette pro-business sans casser quelques yeux aux passage.

Semer le chaos pour que le « parti de l’ordre » l’emporte encore et toujours. Allumer le baril de fioul pour se pointer avec un costume d’extincteur. Cajoler les affects les plus répugnants, les plus haineux, pour que la violence la plus brutale d’un État capitaliste débridé apparaisse toujours comme une forme « d’apaisement ».

C’est donc ça qui se mijote dans la tête de ce banquier pas finaud jadis présenté comme le petit prodige de la politique : un plan de méchant de Power Rangers.

Face à ça, on fait quoi ? Tenez-vous bien : je n’en ai strictement aucune idée. On tient la ligne. On manifeste, on fait-lien, on autogère, on porte-à-porte. On tracte, on s’assemble, on zbeule, on occupe, on s’occupe, on agenda-des-luttes. On demande à nos chers retraités de bien vouloir arrêter de voter à droite, et aux jeunes de bien vouloir voter tout court, même si voter n’a jamais été suffisant, et va l’être de moins en moins.

On se prépare au pire, qui est déjà en train d’avoir lieu.

On prépare les piques, les fourches. On allume nos imaginaires. On zadise tout ce qui peut l’être, on se saisit de chaque feu, chaque interstice.

Allez, ça ira. « Ils sont venus / mettre le feu à l'âge du rêve. / Ta vie est un adieu. / Mais toi tu étreins / comme la vipère folle de mouvement / qui ne se trouve qu'elle-même / parce qu'il n'y a personne » (Alejandra Pizarnik).

Salutations libertaires,

Mačko Dràgàn

* Je ne vais pas mettre son nom je ne vais pas non plus lui faire de la pub il ne faut pas déconner ; vous pourrez facilement retrouver son tweet si vous le souhaitez vraiment.

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