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Billet de blog 11 janvier 2017

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Arabie Saoudite : la princesse Lamia Al Saud entre tradition et modernité

[Par Clara LE QUELLEC] A l’occasion de la sortie fin décembre d’un clip intitulé « Hwages », sous forme de chanson, qui tourne en dérision la condition des femmes en Arabie Saoudite, retour sur la parole de la princesse du pays Lamia Al Saud, entre tradition et modernité.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Cet article a été précédemment publié sur le journal en ligne L'oeil de l'exilé : http://www.loeildelexile.org/arabie-saoudite-la-princesse-lamia-al-saud-entre-tradition-et-modernite/
Invitée dans le cadre de la 3e édition du Festival du Monde, la princesse Lamia Al Saud d’Arabie Saoudite s’est livrée à la mi-septembre à une conversation avec le public, animée par le journaliste Christophe Ayad. Le studio était plein pour la secrétaire générale de la Fondation Alwaleed, organisation non-gouvernementale mal connue qui s’occupe d’actions caritatives diverses dans le pays. L’occasion de revenir ainsi sur les activités de la Fondation mais également sur la question très périlleuse des droits des femmes en Arabie Saoudite.

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Christophe Ayad, journaliste au Monde et la princesse Lamia Al Saud d’Arabie Saoudite © Twitter
Alwaleed Philanthropies a été fondée en 1980 par le prince Al Waleed bin Talal, surnommé le « Bill Gates Arabe » et la princesse Ameerah. La fondation promeut des activités humanitaires, de cohésion entre les différentes communautés, de formation pour les femmes et des programmes de développement. « Vous savez nous avons encore de la pauvreté » explique Lamia Al Saud. La princesse travaille depuis une dizaine d’années dans le domaine des médias et est également romancière.

« Des progrès en matière de droits des femmes »

 Le journaliste Christophe Ayad introduit la question des droits des femmes par la problématique de la conduite des femmes en Arabie Saoudite. « C’est un obstacle dont nous nous accommodons pour le moment » répond la princesse. « Oui la voiture est importante, mais c’est plus important pour nous d’arriver à quelque chose avec nos diplômes qu’avec notre voiture ».

Lamia Al Saud explique que s’il est effectivement vrai qu’il est très difficile pour les femmes en Arabie Saoudite d’avoir une liberté de mouvement, « des progrès en matière de droits des femmes » ont été néanmoins réalisés. Par exemple, 56 % des étudiants aujourd’hui à l’université sont des filles et l’âge du mariage a reculé pour arriver à une moyenne de 25-26 ans. « Avant personne ne nous prenait au sérieux, ce n’est plus le cas, nous avons un rôle important aujourd’hui. Quand j’étais adolescente on ne comprenait pas pourquoi les femmes devaient avoir accès à l’enseignement supérieur. Aujourd’hui nous avons des architectes, des avocates… ». La princesse raconte ainsi qu’après le décès de son père, sa mère est retournée à l’université du Caire et que la petite fille de 13 ans à l’époque l’accompagnait à tous ses cours. « Si vous avez un rêve, il faut vraiment lutter. Le diplôme n’a pas été une option pour moi mais nécessaire ».

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Femme saoudienne entrant dans une voiture à Riyad le 26 octobre 2014 © 20minutes.fr

Du temps pour changer les mentalités

L’Arabie est un pays jeune qui a moins de 100 ans. « Il faut du temps pour changer les mentalités. L’honneur c’est ce qui mène toutes les tribus et la communauté saoudienne est beaucoup plus fondée sur la tradition que sur la religion ».

Que penser alors des nombreuses campagnes d’opinion réalisées à l’étranger sur la condition féminine ? « Vous savez les médias ne regardent que les points négatifs et cela m’attriste. Néanmoins, je pense qu’il est nécessaire de faire ces campagnes mais malheureusement, nous femmes saoudiennes, n’avons pas appris à comprendre l’intérêt des médias ». La question de la mixité sur le marché du travail a également été abordée. « En réalité, l’environnement au travail est beaucoup plus mélangé » mais encore une fois, pas de comparaison possible car « ce n’est pas la même mixité que chez vous. Nous avons nos propres critères, notre propre style ». Les femmes et les hommes peuvent donc cohabiter dans le même étage mais pas dans le même bureau.  

Immigration, burkini et Raif Badawi

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Etudiantes saoudiennes en chimie à l’université © geo.fr
Lamia Al Saud a été interrogée à de nombreuses reprises sur plusieurs sujets délicats. Ainsi, la question de l’interdiction de la construction d’autres lieux de cultes que ceux islamiques en Arabie Saoudite a posé débat alors que le pays attache beaucoup d’importance aux financements de mosquées à l’étranger. Pour cette question tout comme celle consacrée aux travailleurs immigrés ne pouvant pas pratiquer leur religion, Lamia Al Saud avoue « ne pas pouvoir parler au nom du gouvernement ». En revanche, son point de vue sur la polémique sur le burkini en France est clair. « Le burkini n’est pas islamique, c’est un choix politique. Il n’a rien à voir avec l’islam ». De façon générale sur les interdictions en France du voile (hijab) à l’école ou du niqab dans la rue, la princesse explique que « si l’interdiction du hijab a été pour elle une surprise » la France étant un pays de liberté de croyances, elle respecte le point de vue français sur le niqab.

« L’islam n’oblige en rien à le porter. Le fait de couvrir son visage peut être un problème pour reconnaître les identités donc si c’est interdit, nous devons le respecter ».

Illustration 4
Le bloggeur Saoudien Raif Badawi © amnestyinternational.fr

Il est bientôt l’heure, juste le temps de prendre une dernière question. Elle sera sur Raif Badawi, ce bloggeur saoudien, très soutenu par la communauté internationale. Applaudissements dans la salle. Accusé d’apostasie et d’insulte à l’islam, il est emprisonné depuis juin 2012. Il a été condamné à 1000 coups de fouet et dix années de prison. La princesse avouera alors n’avoir « pas du tout connaissance de ce cas » et « n’en avoir jamais entendu parler ».                                                                               

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