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Historien de la musique - Producteur à Radio France (1985-2014) - Conférencier, auteur et dramaturge.

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Billet de blog 24 septembre 2017

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La rue s’est fait entendre. Il fallait s'y attendre.

La mobilisation a été exceptionnelle. Le pari politique de la France Insoumise est une vraie réussite. Par un soleil radieux, nous étions des dizaines et des dizaines de milliers.Pour dire NON aux ordonnances Macron et au nouvel ordonnancement libéral accéléré qui tente de se mettre en place sous nos yeux. La rue s’est fait entendre hier. Il fallait s'y attendre.

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Illustration 1


Tous les âges étaient là, dans une marche très populaire et bon enfant mais très déterminée, combattive. 

Une réussite aussi massive et visible ? Impossible à nier dans les médias.

Aucune dégradation ? Pas d’images croustillantes à attiser la peur.

Un vrai discours politique pointant la catastrophe sociale que vont entraîner ces ordonnances ? Il faut d’urgence détourner l’attention.

Car puisque la rue s’est fait entendre hier, il fallait s'y attendre : le contrefeu de la diversion fut tout trouvé par les médias macronistes. Afin de ne pas parler du fond, à savoir ce coup d’état social dénoncé haut et fort. 

Aussitôt dit, aussitôt fait : tous (oui tous, n’est-ce pas étrange ?) ont extrait une même phrase, en lui faisant dire ce qu’elle ne dit pas, par amalgame ou trop souvent la pure manipulation et malhonnêteté intellectuelle remplace l’argumentaire politique.
Cela s’est propagé immédiatement, tous les marcheurs, de Pénicaud à Castaner ou Valls, s’en sont donné à coeur joie. Le porte parole du Gouvernement prétend même que dans son discours, Jean-Luc Mélenchon aurait mis sur le même plan les nazis et les démocrates… Pourquoi ont-ils tous perdu la mesure ? Pourquoi tant de simplification et d'amalgames ? 

Car enfin, la Résistance française n’a rien d’un mythe. Ce fut grâce à elle que le débarquement du 6 juin a pu réussir - à quel prix ! Ce fut grâce à elle si les convois nazis étaient sabotés par les cheminots, comme l’étaient un tiers des chars qui sortaient des usines Renault par les ouvriers (dont certains l’ont payé au prix de leur vie) ; ce fut grâce à elle si Paris fut libéré, « par son peuple, avec le concours des alliés de la France, avec l'appui et le concours de la France toute entière - c'est à dire de la France qui se bat, de la vraie France, de la seule France, de la France éternelle… » Et ce n'est pas Mélenchon qui le disait, mais bien de Gaulle. La Résistance, ce ne sont pas les cabinets ministériels feutrés et collaborationnistes d’alors, ce ne sont pas les élites politiques et les milieux d’affaires occupés à la collaboration (« Messieurs, je ne vous ai pas beaucoup vu… » dit en préambule de Gaulle aux dirigeants des grandes banques françaises lorsqu’il les rencontra juste après la libération de Paris). La Résistance, c’est la rue. Les FTP, et les FTP-MOI en premier, qui venaient du mouvement populaire et syndical. Et communiste bien sûr. La résistance armée et les insurrections viennent toujours de la rue. 

La polémique, virulente, violente et insultante sur les réseaux sociaux, comme dans les médias, autour d’une phrase du discours révèle bien la façon de procéder. 

La réponse de Mélenchon est limpide et ne fait que reprendre l’intégralité de ce qu’il disait au cours d’un discours très largement improvisé - et qui montre bien qu’en matière d’Histoire, il n’a aucune leçon à recevoir : « J’ai répliqué au président qui affirmait « la démocratie, ce n’est pas la rue », en lui demandant d’apprendre son histoire de France. Il y aurait vu que la démocratie vint par la rue quand celle-ci abattit les rois, chassa les nazis, créa le droit à la section syndicale, la quatrième semaine de congés payés en 1968. Puis je lus une liste de reculs gouvernementaux obtenus par la rue depuis 1986 : retrait de la loi Devaquet sur la sélection à l’entrée de l’université ; 1995 : retrait du plan Juppé ; 1998 : abandon de l’accord multilatéral sur l’investissement 2006 : retrait du CPE après la promulgation de la loi ; 2007 : droit au logement opposable (DALO) suite notamment à la mobilisation des sans-abris par l’association Les Enfants de Don Quichotte (campement au canal Saint-Martin) ; 2008 : retrait du plan Darcos sur la réforme du lycée ; 2009 : suite à la grève générale dans les Antilles françaises, prime de 200 euros sur les bas salaires dans les DOM ; 2016 : accord plus avantageux pour l’assurance chômage des intermittents du spectacle ; 2016 : maintien de la sur-rémunération des heures supplémentaires pour les routiers. Je n’ai pas allongé la liste. Cela suffisait à ma démonstration. Et c’est bien cela qui pose problème à ces gens. La preuve est là non seulement du rôle de « la rue » dans l’histoire, mais surtout de ce qu’elle a pu obtenir déjà ! »

Le vrai sujet de notre journée du 23 est bien là.

Ne nous soumettons pas à ce coup d'état social, à cette déroute écologique gouvernementale devant le Ceta et tant de défis, à cette mise en scène trumpiste permanente (la signature à la télé !), au fait que la Loi de la République devient annexe, que ce soit dans le cadre des accords de branche que la nouvelle loi travail voudrait faire primer ou que ce soit avec l'ex-territorialité des multi-nationales que "légalise" désormais le Ceta - dont Mr Hulot dénonçait il y a peu la nocivité intrinsèque et qu'il approuve désormais puisque toujours membre de ce Gouvernement libéral à tout crin. Oui, plus que jamais, résistance.

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