Sylvia Bongo vient d’achever une tournée au cours de laquelle elle a pu prendre la mesure de l’état de délabrement du système de santé gabonais. Les témoignages sont accablants. Les maternités manquent presque de tout. Beaucoup n’ont pas de sages-femmes ni d'infirmiers, d’autres sont à cours de médicaments, de lits, d’eau courante, etc. Le paysage global des maternités gabonaises ne fait honneur ni à son beau-père ni à son mari. Bien au contraire, il apparaît significatif de la gestion catastrophique du pays.
Le voyage de Mme Bongo soulève néanmoins quelques interrogations : comment le justifier quelques mois après qu’elle eut rendu à son époux un rapport d’évaluation de la pauvreté, rédigé par le cabinet McKinsey ? Sa démarche actuelle, consistant en une recension des besoins de la population, ne laisse-t-elle pas penser que ce rapport était bidon ? De la pure littérature sans aucun lien avec une réalité dont elle cherche à toucher du doigt ?
Il faut néanmoins saluer sa démarche. A moins d’être une pure opération de communication visant à la captation de l’électorat féminin dans la perspective des élections présidentielles de 2016, sa tournée apparaît salutaire à plus d’un titre :
1/elle est révélatrice d’une conception de la politique qui, sans apparat ni pompes, se préoccupe d’abord des êtres humains. Il s'agit d'une démarche altruiste, compassionnelle.
2/A moins que je me trompe, elle semble la seule personnalité gabonaise, politique ou pas, qui ait une telle approche des problèmes sociaux. Car c’est dans la rencontre avec les pauvres qu’on peut élaborer une véritable stratégie de lutte contre la pauvreté grâce à une meilleure affectation des moyens et par la mise en place des outils incitant les individus à se prendre en charge. Il s’agit là d’un stade préparatoire à l’avènement du social business.
En conclusion, si sa tournée est mue par des valeurs éthiques et non par un simple calcul électoraliste (soyons naïf), alors il convient de l’applaudir à pleines mains. Car sa tournée se situe incontestablement à contre-courant du cynisme de son mari et d’innombrables hommes politiques qui ne s’intéressent à la population que pour échanger le bulletin vote contre de faux médicaments et des boîtes de conserve périmées. Mme Bongo manifeste un peu d’humanisme dans un monde dominé par la prédation. Au final, le nihilisme constitue l'horrible visage de la politique menée au Gabon depuis l’avènement des Bongo au pouvoir, et dont toute la nouvelle clique de l’opposition est comptable. C’est aussi cela le sens de l’effroyable réalité des maternités gabonaises.
MMB