Vous je ne sais pas mais moi j'ai de l'urticaire.
J'appelle la CAF pour régler un problème et apprendre avec consternation que nous sommes désormais à deux à partager le même numéro d'allocataire et que, par conséquent, l'on ne me donnera pas de renseignements au téléphone, qu'il faut que je vienne dans les locaux de l'administration pour démêler leurs cafouillages. Y rêvent ? S'imaginer que je vais me déplacer, en fauteuil roulant de surcroît, car c'est le bordel dans leurs fichiers informatiques, c'est prendre leur vessie pour une lanterne. Comme si je n'avais que ça à faire. En plus, honnêtement je leur signale un trop-perçu qui va me coûter près de 2000 € à rembourser, pour ne pas avoir remis ma situation à jour, alors que normalement ils ne font que ça à longueur de temps, vous envoyer des justificatifs à remplir afin de rendre des comptes. Comme par hasard, là personne ne s'est bougé. C'est Bibi qui leur a signalé une erreur, découverte car on vire dorénavant les allocations séparément.
T'es con, pourquoi as-tu dit quelque chose, ils auraient continué à te verser indûment une APL jusqu'en 2020, s'est exclamée une personne de mon entourage. Jusqu'en 2020 ! Pour un crédit immobilier que je n'ai jamais fait ! Certes, ils auraient été suffisamment stupides pour ne pas se rendre compte de leur erreur. Mais il aurait suffi d'un fonctionnaire un peu plus malin que la moyenne pour me retrouver à devoir rembourser des milliers d'euros. Je ne suis pas fou. Je ne m'appelle pas Rotschild ou Bettencourt.
Et je refuse de me mettre au même niveau que tous ces riches qui s'empiffrent de pognon à en gerber et sans états d'âme. Ces riches dont le sport favori est d'en gagner toujours plus, avec un aplomb et un incivisme abjects ; allant jusqu'à se faire passer pour des pigeons et réussir à faire reculer le gouvernement. Avec les petites gens, il est nettement moins indulgent, moins regardant. On ne donne qu'aux riches…
Un gouvernement de couilles molles qui, par le truchement d'un Manuel Valls en pleine forme, préfère s'attaquer aux Roms et autres minorités sans défense. Il est facile d'en avoir face aux plus faibles. C'est beaucoup plus difficile face aux matamores de la finance, aux fossoyeurs de la France du bas et des soi-disant droits de l'Humain, d'une soi-disant égalité des droits, ne parlons même pas de fraternité (on sait ce que cela donne la fraternité du fric) et de politique sociale.
Je pourrais me consoler en me disant qu'ils ne l'emporteront pas au paradis leur pactole puant la souffrance, l'exploitation et la misère d'employés qui se tuent à la tâche pour de tels voleurs légaux. Solidarité, c'est quoi ça, ce mot trivial et blasphématoire ? Quant à la décence, n'en parlons même pas ? La mauvaise conscience ? Pourquoi faire ? On est entre gens du monde, de la haute, on est au-dessus de tout ça, de ces basses considérations juste bonnes pour les Français moyens, pour les moutons, et les vrais pigeons. Vous, moi, tous ceux qui s'en sortent comme ils peuvent, quand ils s'en sortent. Tous ceux qui, d'une façon ou d'une autre, engraissent cette France pourvue d'une calculette à la place du cerveau et de coffres-forts à la place du cœur. Et qui se font baiser les pieds par des politiques serviles ; on a l'oligarchie que l'on peut.
Je préfère être à ma place et rembourser une allocation indue à une administration consternante, même si je ne roule pas sur l'or.
Ce qui me fait le plus mal au ventre, et tant pis si je me fais encore une fois traité de nazi, c'est l'incurie de ce gouvernement inconsistant, à part le ministre de l'intérieur qui joue au picador sarkozyste.
On ne compte plus les mensonges électoralistes. Les promesses faites avant les présidentielles et ce qu'il en reste. En matière de fiscalité, de justice sociale, de pouvoir d'achat, et ce fameux pacte européen qu'il avait promis de ne pas signer, etc. Realpolitik me rétorquera-t-on pour se justifier. Elle a bon dos la realpolitik.
Je ne voulais plus de Sarkozy, du sarkozysme. Je ne voulais pas non plus de Hollande et du hollandisme. La gauche ne fait plus rêver. En tout cas moi. Ils ont mis 10 ans à revenir au pouvoir et quelques jours pour mettre bas les masques, étaler leur indigence, leur infantilisme, leur déliquescence et leur trivialité. Le PS est un parti de fantoches en pleine lumière. Et ce n'est pas vraiment joli à voir ni à entendre. Jaurès et Mendès-France sont bien loin. Ils font partie de l'Histoire, de la mémoire et de la nostalgie d'une gauche sociale. D'une vraie gauche.
L'essence ne cesse d'augmenter alors que le gouvernement voulait y mettre bon ordre. Les auto-entrepreneurs vont voir leur charge augmenter, alors que la plupart ont de petits boulots d'appoint pour arrondir les fins de mois, souvent dans le consulting et la formation continue. À quoi sert dans ces conditions de continuer si c'est pour crouler sous les charges et les taxes ? Comme sous Sarkozy, à quoi sert de travailler plus pour ne pas gagner un peu plus ou même moins ? Et pendant ce temps les gros, les très gros se remplissent les poches et la panse avec l'aval et sous le regard d'un gouvernement frileux, voire consentant. C'est quoi ce calcul de technocrates, sortis tout droit d'un paquet Bonux pour énarques, qui consiste à surtaxer les petits travailleurs indépendants, plutôt que de s'attaquer aux grosses fortunes, celles qui ont des comptes ouverts un peu partout et de façon plus ou moins propre ? Nous sommes vraiment dans un pays qui adore cultiver l'assistanat. On préfère surtaxer de modestes indépendants, au risque de les voir mettre la clé sous la porte et de s'inscrire au Pôle emploi. On marche sur la tête.
En fait, si François Bayrou n'avait pas foiré… Aurait-il fait mieux ? En tout cas, il aurait fait ce qu'il a dit. J'en suis sûr. Je m'illusionne ? Qu'importe. Nous sommes sur le radeau, il n'y a plus qu'à ramer et à écoper chacun sa misère. Il y en a marre de ce bipartisme à la française où deux parties périmées se partagent les pouvoirs et les casseroles. À quand un vrai parti du centre ?
Il paraît que Malraux aurait dit que le XXIe siècle sera spirituel ou ne sera pas. Vrai ou faux, j'attends. Pour le moment, en tout cas, il n'est pas très drôle. Surtout pour certains, ceux qui n'ont même plus la force d'aboyer devant les injustices qui s'accumulent. Ils sont une dizaine de millions et cinq millions de chômeurs. Une sacrée cagnotte de miséreux, une martingale gouvernementale.