Les partis européens se réjouissent de l'avancée démocratique inscrite dans le traité de Lisbonne en 2009 : "pour la première fois dans l’histoire de l’Union, les électeurs vont désigner directement leur futur président de la Commission, qui sera issu du parti européen arrivé en tête des élections." Pourtant rien n'a vraiment changé et il est même possible de faire face à un blocage institutionnel.
L’article 17 du traité de Lisbonne prévoit en vérité que le président de la Commission européenne doit être désigné par le Conseil européen (c’est-à-dire les chefs d’Etat) à la majorité qualifiée « en tenant compte des élections au Parlement européen ». Ledit président de la Commission doit ensuite recevoir l’approbation du Parlement européen à la majorité absolue.
La logique serait que le Conseil propose naturellement au Parlement le candidat désigné par le groupe parlementaire européen arrivé en tête des élections. Mais à condition qu'il puisse rassembler une majorité de consensus car ce choix doit être approuvé par le Parlement. C'était déjà le cas avant le Traité de Lisbonne (on se rappelle que Baroso a pu être approuvé grâce à une accord entre les conservateurs de droite du PPE et les sociaux-démocrates du PSE), donc cela ne change pas vraiment la donne si ce n'est de faire croire à plus de démocratie, comme l'a très bien noté Xipetotec sur son blog Mediapart.
Et malgré cette nouveauté rien n'oblige le Conseil à désigner un de ces candidats. Il se murmure d'ailleurs dans les couloirs de la Commission que Christine Lagarde, actuellement directrice générale du FMI, serait la favorite ! De plus dans une lettre envoyée aux dirigeants européens, Herman Van Rompuy juge que le Conseil ne sera pas en mesure de désigner un président de la Commission à sa prochaine réunion du 27 mai 2014, ce qui décalerait sa désignation à la séance plénière de mi-juillet.
La désignation d'un candidat autre que ceux proposés par les partis européens serait vécue par les députés eurpéens comme un camouflet et ils ont menacé de ne pas l'approuver dans ce cas.
Un article du Monde analyse la situation : ni Jean-Claude Juncker ni Martin Schulz ne sont en mesure de garantir autour d'eux une majorité. Ils risquent donc de ne pas être approuvés par le Parlement même si est proposé celui qui arrive en tête. Une coalition sera probablement nécessaire.
La simulation de sièges à partir des sondages PollWatch donnent ce résultat par groupe parlementaire : le PPE en courte tête avec 212 ièges (Jean-Claude Junker) s suivi de près par le PSD (ex PSE) à 209 (Martin Schulz), puis les centristes démocrates libéraux ALDE avec 63 sièges (Guy Verhofstadt).
Selon les dernières estimations, la droite pourrait ainsi obtenir 29 % des sièges. Même le soutien du centre (8 %) ne permettrait pas à Jean-Claude Juncker d’obtenir la majorité des 50 % nécessaire à son élection. Idem pour la gauche. Il faudra sans doute rassembler au centre en rassemblant centre-droit et centre-gauche (même si les eurosceptiques, gauche plus radicale et droite plus radicale sont laissés de côté) pour obtenir cette majorité.
Si Jean-Claude Juncker et Martin Schulz échouent à obtenir une coalition majoritaire, le troisième Guy Verhofstadt pourrait donc représenter une meilleure solution de consensus.
Tant qu'il n'y a pas cet accord, cela peut bloquer et paralyser l'Union européenne ...

