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Billet de blog 10 janvier 2023

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Réquisitoire définitif contre la croissance

Son concept n‘est pas universel. Le définir d’un point de vu comptable, dans son rapport entre salaires, temps de travail, retraites, richesses et inflation afin de procéder au réquisitoire définitif de ce jeu de dupes.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Un de mes billets établissait une définition et une historicité du capitalisme. La croissance en est un corolaire depuis le « dominium » (propriété conçue par l’église catholique). Les origines de l’évolution vers des sociétés capitalistes sont inscrites dans la Bible, fondement de touts les religions monothéistes : Genèse 1 : « Croissez, multipliez et dominez toute la terre ».

 A contrario, d’autres civilisations n’ont pas la notion de profit ou de croissance ou l’on apprise.

Les coutumes et économies africaines ne sont pas fondées sur la propriété mais sur le commun, l’usage d’une collectivité et la continuité de l’être humain et du vivant.

Les inuits, peuples arrivés d’Asie (Sibérie) vers 8 000 ans av. J-C, ont traversé le détroit de Béring alors recouvert par la banquise, se sont répartis au nord du Groenland et de l’Alaska.  Ils n’intégraient pas le terme profit dans leur langage ou dialectes et ne vivaient que des ressources naturelles indispensables avant l’arrivée des concurrents puis colonisateurs européens au XIIIème siècle ayant entraîné des bouleversements sociaux,  culturels et des modes de vie.

Les amérindiens dont les origines sont plus anciennes, constitués en tribus, quand ils n’ont pas été décimés par les maladies et l’extermination par les européens conservent leur culture dans les réserves où ils ont été retranchés. Ils luttent pour conserver le vivant de leur territoire auquel ils sont fusionnels.

Il paraît à ce stade important de souligner que les missionnaires ont de tout temps, encore actuellement, tout mis en œuvre pour évangéliser les autochtones et les états de les acculturer.

Pour justifier le capitalisme au regard des thèses marxistes, les économistes occidentaux ont défini et posé les équilibres de l’économie : l’offre et la demande (Jean-Baptiste Say), la libre concurrence, la monnaie (John Maynard Keynes),  la répartition entre les revenus du capital et ceux du travail pour le prélèvement de l’impôt et la concurrence dans les marchés internationaux (David Ricardo). Leur but résidait dans l’analyse des rouages du capitalisme afin qu’il fonctionne bien (c’est ce que, d’après Michel Rocard, premier ministre de Mitterrand pendant trois ans, il fallait à la France) et demeure pérenne et acceptable par tous dans une pensée unique.

Pour les théoriciens, le libéralisme économisme s’oppose à l’interventionnisme des états jusqu’à la planification,

De quoi sont constitués le PIB et la Croissance ?

La Comptabilité nationale

Elle  est tenue selon des critères quasi universels par les états qui vont ainsi mesurer leur richesse, donc leur puissance par rapport aux autres pays. Eventuellement, elle sert à établir le contrôle, la répartition et l’usage qu’ils en feront.

Pour estimer ce qui sort du système productif, il faut ajouter les valeurs ajoutées des différentes branches d’activité, y compris non marchandes (associations, syndicats professionnels ou de salariés, administrations publiques ou institutions privées d’intérêts publics…).

Afin d’éviter les doubles emplois, pour mesurer la contribution d’une branche ou d’une entreprise au Produit Intérieur Brut, il convient de s’intéresser à la valeur de sa production, mais aussi à sa valeur ajoutée : c'est-à-dire à la différence entre sa valeur de production et la valeur des biens et services qu’elle a acheté à une autre branche ou une autre entreprise.

L’entreprise déduit de sa Taxe à la Valeur Ajoutée celle qu’elle a payée en amont à ses fournisseurs de biens ou services. Elle ne doit payer au fisc que celle qu’elle a générée elle-même.

Ainsi, le Produit Intérieur brut =  Somme des valeurs ajoutées + TVA  + droits de douane.

La croissance est le taux différentiel du PIB d’une année par rapport à une autre.

Le PIB est souvent rapporté au nombre d’habitants selon les besoins de comparaison.

On pourrait estimer que le remplacement du capital fixe usé (matériel) et le maintien en état des  travailleurs nécessaires à la reproduction du système pourraient être déduits du PIB.

Mais, que rentre-t-il dans la production marchande de biens et de services ?

Les charges sociales, les sommes engagés dans la publicité, également déductibles d’impôt sur les bénéfices, la production consommée avec bénéfice tant celle du pain que celle des yachts (la production non consommée ou non vendue est comptabilisée dans les stocks) participent au PIB. Les produits pharmaceutiques (y compris les énormes dividendes distribués dans ce secteur industriel) remboursés par la Sécurité sociale sur les cotisations patronales et salariales et les « restes à payer » des patients. Le coût des maladies et décès engendrés par la surconsommation d’aliments et boissons contenant trop de  sucres,  d’additifs, de  l’absorption par voie nasale ou buccale de produit toxiques, polluants et de microparticules, y compris de plastic de l’industrie agro-alimentaire occasionnant allergies, intoxications, obésités et cancers, sont comptabilisés dans le PIB.

L’obsolescence programmée d’objets neufs ou leur remplacement accéléré par une nouvelle technologie, provoque un nouvel achat que les publicités rendent compulsifs, donc réalimente le PIB.

Les assurances contre les aléas climatiques, catastrophes naturelles et technologiques et les risques individuels règlent les réparations effectuées par les entreprises, mais rien ne compense les pertes humaines, les deuils, les traumatismes, les souvenirs et les traces historiques à jamais perdus. Les investissements pour la prévention et la reconstruction sont souvent effectués par les états ou les collectivités locales. Les subventions aux entreprises sont déductibles d’impôts, mais entrent dans la plus-value.

Que rentre-t-il dans la production non marchande : tous les services publics gratuits. Tous leurs coûts rentrent dans le PIB.

La Répartition inégale de la valeur ajoutée

Depuis le début des années 1990, marqué par la chute du mur de Berlin et l’effondrement de l’URSS, un tournant s’est opéré dans l’économie politique des pays occidentaux. La part du travail (salaires et charges sociales) a diminué au profit du capital, en même temps que les acquis sociaux reculaient. Les syndicats de salariés ne luttaient plus pour obtenir de nouveaux  avantages par la croissance,  mais pour conserver ceux du passé.

Les inégalités de revenu n’ont cessé de s’accroître. Avant la présidence de Jacques Chirac, le salaire le plus élevé était environ de 40 fois celui du plus bas, il s’agit aujourd’hui de plusieurs centaines de fois. Il y a vingt-cinq ans, le revenu disponible moyen des 10 % les plus riches dans les pays de l’OCDE était environ sept fois plus élevé que celui des 10 % les plus pauvres ; aujourd’hui, il est environ neuf fois et demie plus élevé. Cet écart grandissant ’affecte les individus, les sociétés et même les économies puisque cette répartition augmente la demande vers des produits de luxe tandis que des besoins primaires ne sont pas satisfaits.

Croissance, emploi, coût du travail et prolongement de l‘âge de la retraite

La croissance étant un ratio de productivité (résultats/moyens), si le résultat augmente sans le coût de l’emploi, c’est que le gain de la croissance vient de la  technologie. C’est la raison pour laquelle la croissance n’est pas systématiquement créatrice d’emplois, contrairement à ce que certains économistes affirment et que les professeurs enseignent encore.

La croissance devient un objectif : « augmenter la production pour que la nation s’enrichisse »ou « travailler plus pour gagner plus ». Le patronat et les gouvernants l’affirment indispensable pour  générer de l’emploi, critère économique devenu majeur. Ils défendent haut et fort la valeur travail. Mais la précarité de celui-ci et les réformes des droits au chômage ont jeté des salariés sous le seuil de pauvreté.  En Europe, les économistes désignent par « précariat » cette nouvelle classe sociale concernant des actifs qui ont basculé d’une classe sociale à l’autre.

 La mesure  du taux d’emploi varie selon les outils employés. Néanmoins, le plein emploi est estimé à un taux de chômage de 5%, seuil permettant de mettre les salariés en concurrence et  ainsi de favoriser le « marché du travail ».

Durant les négociations pour la réforme des retraites, le patronat refuse une augmentation du taux de cotisation de 0,7% pour ne pas augmenter le coût du travail dont la part n’a cessé de diminuer par des gains de productivité malgré leur ralentissement, des baisses de charges sociales patronales dans un contexte de mondialisation des échanges commerciaux et de délocalisations . Or, la part revenant au capital s’est envolée ces dernières années.

Sachant qu’à chaque production d’un bien ou d’un service, une partie va au travail et l’autre au capital dont une partie sera au mieux réinvestie dans le système, en tout cas une partie aux propriétaires des moyens de production et/ou des rentiers, le capital vient s’accumuler au capital. C’est l’essence même du système et la véritable raison de la croissance, le moteur du capital : toujours davantage de profit, et ce, jusqu’à épuisement total des ressources.

Dans mon billet titré « Comment le capitalisme s’est-il pérennisé ? » répondait partiellement à « la croissance pour qui ? »

«  L’idéologie  s’efforce de confondre croissance et bien-être comme finalité de l’activité économique. Le pouvoir politique prétend partager avec le patronat les compétences indispensables pour lever la contrainte dominante : la création et la répartition des richesses. Les rapports marchands uniformisent les valeurs de références, les symboles, tout l’univers culturel. Ils classent hiérarchiquement les individus, égaux par principe, selon  leurs revenus et leur niveau de consommation. »  

Les perdants et les gagnants

Politiquement, les gouvernements des pays occidentaux se chargent de mettre au pouvoir dans les anciennes colonies des dictateurs acquis à la cause libérale capitaliste et, au passage, de contribuer à l’élimination de leaders susceptibles de mettre en oeuvre des politiques économiques sociales réussies. Ils prônent une forte croissance dans ces pays tout en continuant à exploiter leurs ressources. En même temps, ils anéantissent, par leurs exportations à bas prix de produits de mauvaise qualité, les cultures vivrières et  élevages locaux. Leurs aides au développement sont falsifiées par des financements publics dont les prêts avec intérêts sont conditionnés à des contrats avec les entreprises des pays prêteurs.

Les salariés, dont le bien être au travail et la liberté contrainte ne sont pas inclus dans ce calcul. Ils demeurent assujettis au patronat et en tant que consommateurs des classes défavorisées et moyennes  à l’offre des entreprises.

Une diminution de la croissance, voire une récession en cas de forte inflation non compensée par les salaires, ce qui est fort probable, provoquera une compression de la consommation de biens de première nécessité pour les classes les plus pauvres jusqu’à la moyenne.

L’inflation permet aux états de générer des sources accrues de rentrées budgétaires (TVA, impôts sur les sociétés…) et de rembourser ses dettes. Elle permet également au patronat de limiter le coût du travail tout en conservant ses taux de marge.

De 1962 à 1981, le taux d’inflation s’est élevé à 399%. Les augmentations de salaires, négociées par branches entre les syndicats de salariés et patronaux la compensaient partiellement. Pour la période de 1981 à 2001, l’inflation s‘élevant à 95%, n’était plus mensuellement à 2 chiffres. Le taux de croissance a toujours progressé.

Une économie sociale sans croissance

Mais Il ne s’agit ne s’agit que le volet des rapports de production et d’échanges mondiaux. Un autre volet s’ouvre sur une prise de conscience écologique tendant à s’amplifier quant au fait que chaque produit fabriqué et consommé constitué d‘eau, de matière extraite également de la nature, en surface ou en profondeur, et de l’énergie que l’on en a tirée. De cette évolution naît une nouvelle notion : celle de décroissance.

Afin d’éviter une baise de la consommation de produits de première nécessité et de vie sociale harmonieuse, une décroissance doit être planifiée dans le cadre d’un changement de modes de production et de mise sur le marché. Les inégalités sociales et climatiques s’en trouveront réduites.

Elle cessera de programmer l’obsolescence des biens produits et leur permettra une réparation facile. Les achats de plusieurs mains deviendront courants et le recyclage presque généralisé. Les circuits cours, les petits commerces et l’artisanat seront favorisés. Moins de produits fabriqués  c’est aussi moins de polluants dans l’atmosphère respirée, dans l’eau et les matières ingérées impactant la santé de l’ensemble du vivant et du temps de travail libéré. Sans publicité, les empires industriels, alimentaires, pharmaceutiques et médiatiques paraitront alors moins attrayants. Les valeurs travail et capital changeront de références.  La vie sera axée sur les biens communs : l’eau, l’énergie et le temps.

Déclarer qu’une croissance infinie ne peut s’exercer sur un monde fini en ressources, le détruisant et  le rendant impropre à toute vie, paraît un truisme. Suivons les scientifiques et abandonnons les vieux dogmes. Les solutions existent ; appliquons-les.

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