C'est ce que j'aurais aimé pouvoir dire à l'enfant reçu ce jour pour lui annoncer qu'il ne verra plus son père... Il sait qu'il n'a pas été confronté à des ennemis sur un terrain belliqueux mais à une machine agricole qui l'a soudainement trahi. Ce serait tellement plus réconfortant de pouvoir évoquer l'hommage solennel de la République rendu aux combattants et qui donne lieu ce jour, à une magnifique cérémonie. « Ils ont l'esprit de sacrifice, le dévouement, le courage le sens du devoir »... nous dit le Président de la République.
N'avait-il pas ces qualités ce père... à échelle humaine ?
Et cet autre enfant d'instituteur à qui j'ai dû communiquer cette même nouvelle.... il ne se passe pas un mois sans que je sois confrontée à cette pénible mission en tant que Psychologue d'enfant.
Il n'est pas soldat en Afghanistan mais il s'est tué en voiture en allant à son travail, un autre s'est suicidé rongé par la souffrance morale au travail, et je pense aussi à ces enfants de gardiens de prison suicidés, à ce médecin mort du sida après avoir soigné de nombreux patients, à cet ouvrier non pas massacré brutalement par des talibans mais tué à petit feu par des substances toxiques.
Et je rêve d'un 14 juillet qui rendrait aussi un hommage solennel à tous ces morts pour le devoir, tous ces citoyens qui font la France sans se battre pour elle et qui ne sont jamais célébrés, parce qu'ils font tout simplement leur travail indispensable à chacun d'entre nous à travers la collectivité.
Le président continue en évoquant « la flamme de la fierté nationale pour nos soldats, la flamme de la France éternelle »... cet hommage qui fédère et qui solidarise, ne le devons-nous pas aussi à toute les femmes et tous les hommes morts, tués pour et par le travail ?