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Billet de blog 8 février 2010

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mesure d'éloignement

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le vendredi 16 octobre 2009 paraît au TGI pour la première fois un monsieur de nationalité nigériane. Deux messieurs pakistanais, MM. Ali Hussein et Ahmed Shakil, déjà présentés à leur consulat, voient la juge pour la deuxième fois. L’avocat tentera de plaider leur prolongation de cinq jours au lieu de quinze, étant donné qu’ils ne sont pour rien dans les retards de leur consulat à les reconnaître. Par ailleurs, le consulat du Pakistan ne reconnaît jamais ses ressortissants, ce qui rend encore plus absurde cette rétention prolongée. La juge ne le suivra pas, ne suivra pas sa propre jurisprudence, motivant que dans les cas où elle a prolongé de cinq jours, les personnes avaient, malgré l’absence de passeport, des documents, (des fiches de salaire par exemple) attestant de leur nom. Ce qui n’est pas le cas, et ce qui peut ou pourrait, mais elle n’est pas dupe, expliquer les retards du consulat. Elle s’interroge également sur sa compétence à requalifier ce pour quoi elle est saisie, à savoir la demande de prolongation de quinze jours de la rétention de Messieurs Hussein et Shakill.

Au juge le droit, répond Maître H. Assis, debout, assis. Aucun commentaire.

*

Monsieur Ali, dit la juge (qui confond nom et prénom), comment s’est passé votre entretien au Consulat ?

Le consul m’a dit que je n’étais pas pakistanais.

Et vous, que dites-vous ?

Que je suis pakistanais.

Et il faut vous croire sur parole ? Si moi je vous dis que je suis pakistanaise, vous allez me croire ?

Madame, pourquoi ne pas m’avoir posé ces questions la première fois que vous m’avez-vous ?

Parce que ce n’est pas ma compétence.

Donc ce n’est pas ma faute, pas ma faute si personne ne peut prouver qui je suis.

Tout étranger doit pouvoir prouver son identité. Vous n’êtes pas en conformité avec la loi.

Vous m’avez puni de quinze jours déjà. Je pense que cela suffit.

Monsieur Ali, vous n’avez pas cherché à fournir un document prouvant votre identité, vous êtes malvenu de critiquer les autorités qui tentent de pallier votre carence.

Je suis en situation irrégulière, ça, c’est une chose sûre.

*

Fin de l’audience. Messieurs Hussein et Shakill vont rentrer au Centre pour quinze longs jours. Monsieur Shakill gratte nerveusement les bords de son blouson. Son regard est perdu. C’est long, long, soupir.

*

Monsieur Doz Kings, de nationalité nigériane, est en situation régulière en Suisse. Il a eu besoin de se rendre au consulat du Niger à Madrid afin de remplacer son passeport périmé. Seul le consulat de Madrid est habilité à délivrer les passeports pour l’Afrique de l’Ouest. Il a été arrêté dans le train de retour, muni de son passeport tout neuf, alors qu’il possédait son billet pour Genève, des rendez-vous de travail et de santé. Rendez-vous manqués bien sûr puisqu’il est retenu à Hendaye. Avant d’entreprendre le voyage en Espagne, il a demandé aux autorités suisses s’il y était autorisé, muni de son titre de séjour suisse. Sans aucun problème, lui a-t-on répondu. Aujourd’hui, au TGI, personne n’en sait rien. Ce qui est certain c’est qu’il attendra, privé de liberté, au centre, qu’un avion le ramène à Genève. La juge insiste pour qu’il tente de se faire rembourser son billet de train. Elle ajoute : je souhaiterais être pédagogue, informer Monsieur de ce qu’il aurait dû faire pour aller légalement en Espagne où il devait aller pour obtenir un passeport valide, mais je ne le sais pas, je suis désolée. Et ça ne relève pas de ma compétence. Le porte-parole du Préfet répète qu’un avion conduira à Genève Monsieur Doz le 21 octobre - mesure d’éloignement, dit-il, s’obstine-t-il à dire. Non de retour , murmure Monsieur Doz.

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