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Billet de blog 25 juillet 2014

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et secouer, secouer longtemps (8)

 on m'a donné trois adresses différentes, pour l'organisation non gouvernementale AITHMA. 11 rue Rizakos : trouvée nulle part. Meidani 13-15, non plus. Enfin, après un appel téléphonique, descendre au métro Syngron Fix, prendre un tram et chercher la rue Tripou 6. A côté de la place Paidiki Chaira, le plaisir des enfants. Le plan que l'on déplie, dans le café, près de la place.  La rue ne figure pas sur mon plan. Le patron du bar va chercher le sien et on compte les rues, s'oriente, se réoriente. Se tromper entre Tripou et Tripoli. Au 6 rue Tripoli trouver quelqu'un qui m'accompagne au 6 rue de Tripoudu monde, des mamans avec enfants dans les poussettes. Les personnes à l'accueil sont jeunes, empressées. L'interprète du farsi. Arabic ? No arabic. Un monsieur qui attendait dehors entend, s'improvise interprète d'arabe. Retourne attendre dehors. Une sorte de sévérité, autour

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on m'a donné trois adresses différentes, pour l'organisation non gouvernementale AITHMA. 11 rue Rizakos : trouvée nulle part. Meidani 13-15, non plus. Enfin, après un appel téléphonique, descendre au métro Syngron Fix, prendre un tram et chercher la rue Tripou 6. A côté de la place Paidiki Chaira, le plaisir des enfants. Le plan que l'on déplie, dans le café, près de la place.  La rue ne figure pas sur mon plan. Le patron du bar va chercher le sien et on compte les rues, s'oriente, se réoriente. Se tromper entre Tripou et Tripoli. Au 6 rue Tripoli trouver quelqu'un qui m'accompagne au 6 rue de Tripou

du monde, des mamans avec enfants dans les poussettes. Les personnes à l'accueil sont jeunes, empressées. L'interprète du farsi. Arabic ? No arabic. Un monsieur qui attendait dehors entend, s'improvise interprète d'arabe. Retourne attendre dehors. Une sorte de sévérité, autour

le jeune homme, ses papiers pliés déplié repliés dans un petit sac plastique et tous les regards dans le vague

la jeune femme qui parle français, à qui on dit qu'on ne trouve pas trace de sa demande, c'est trop tôt. Il fait chaud. Un petit courant d'air, on tient la porte ouverte par le dossier d'une chaise

les cigales assourdissantes parfois font une pause et on entend des bouts de dialogue  en français : un mois c'est court encore. Ils t'ont appelée ? Non. Si tu veux, reviens dans un mois. Un enfant pleure

cette sorte de rocade qui rivalise avec les cigales, le long long trajet

le lendemain à la mer, les infrastructures abandonnées, les hommes qui arpentent la plage vendant de mauvaises lunettes de soleil de toutes les couleurs et d'énormes montres roses ou vertes. Le monsieur sénégalais : son frère est à Bilbao, sa sœur à Bordeaux, il dit  : ils sont militants, là-bas. Et : rendez-vous sur la place d'Exarchia - Exarchia, c'est bon, dit le monsieur sénégalais

hier après-midi dans un café librairie à Exarchia, les étudiants étudiaient et fumaient, au mur des collages inspirés des peintures de Frida Khalo et j'achetais Une nuit de chien, d'Onetti

E explique que Médecin du Monde ne va plus dans les centres depuis le mois de mars. C'est à peu près la date du décret prolongeant la rétention. A la place, on fait appel à des généralistes, ils sont sur place, accompagnés d'un psychologue. Je voudrais savoir comment ça se passe à présent, dit E, les gens ont des pathologies graves, très graves. On donnait des doses normales, anxiolytiques et anti dépresseurs, des doses pour hommes forts et ça ne suffisait pas

quand tu as traversé le monde ainsi et qu'à chaque situation il a fallu t'adapter. On le sait bien que là tu vas tomber

les mois de juin et de juillet en Méditerranée, le nombre de morts en Méditerranée

le grand enfermement, le grand enfermement, le plus stupide des empêchements : à notre âge on ne part plus, on n'émigre plus, on aurait dix ans de moins mais là non. Et on ne fait pas d'enfant, non plus

il faut aller voir dans les camps de rétention, dit E. Elle dit camp

cette femme, le lendemain, Elfi, à la gare où j'attendrai le Proastikos en direction de Corinthe : si j'ai des enfants, mais comment veux-tu, no job

les dents, l'estomac, les maladies de peau, dit E. Médecin du monde avaient des psychiatres, des dermatologues, des dentistes. Les gens ont besoin d'aller à l'hôpital mais le problème c'est qu'il n'y a pas de gardiens pour les y conduire, il y a très peu de gardiens et ce sont des gardiens qui n'y connaissent rien. Corinthe c'est un camp militaire, un dortoir pour cinquante personnes où dorment soixante-douze personnes, sur des matelas ou sans matelas, avec conflits et bagarres. Il n'y a plus aucun travail social. Médecin du monde y allait tous les jours. C'était un programme aidé par des fonds européens, c'est peut-être ça le problème, ça coûtait de l'argent. On ne sait pas, on n'a pas eu une explication, on n'a pas de recours. Pour l'asile, pour t'indiquer tes droits, c'est la police qui le fait. Il n'y a pas de traducteurs. En français, en anglais, oui, mais en ourdou

pour aller à l'hôpital, dira T le lendemain, tu dois t'accrocher aux grillages et secouer longtemps, longtemps

le jour où E, de Médecin du monde, me parle, est ce jour où Cécilia Malmström visite le camp d'Amygdalesa  et trouve que tout est très au point

on leur donnait des chaussures, des chaussettes, ils n'avaient rien, arrêtés en été ils passaient l'hiver

30% des Grecs n'ont plus droit à la sécurité sociale, les employeurs te disent : je te prends pour 500 euros par mois mais je paye pas la sécu et t'es fichu parce que tu dis oui. D'un salaire de 1200 euros par mois, tu passes à 700. Tu deviens vite délinquant économique quand tu peux plus payer tes emprunts, quel est le nom du ministre grec qui voulait faire des prisons pour délinquants économiques ?

non, l'Aube dorée ce n'est pas tout à fait comme votre Front National, parce que chez vous le vote FN est souvent imaginaire, dans des régions où on n'a jamais vu un étranger on vote FN. Ici, à Kypséli, quand les étrangers sont arrivés et qu'ils dormaient dehors et qu'ils désorganisaient la vie des gens, il y a eu des rassemblements spontanés. Racistes. En tout cas des rassemblements contre cette présence qui effrayait. L'Aube dorée est arrivée. Elle a rassemblé les inquiets, elle les a politisés. Et puis l'extrême gauche est arrivée. Elle est arrivée avec les associations des droits de l'homme et elle a polarisé. Tu étais pour les immigrés, tu manifestais avec la gauche et les associations. Tu étais gêné par la présence des immigrés, tu étais Aube dorée

on en est à soixante militants emprisonnés et tous les députés, maintenant, ou presque, quatorze peut-être

ici tu parles pour parler, pas pour dire quelque chose mais pour parler. C'est essentiel. Bien sûr ça ne suffit pas, il faudrait faire tomber les antennes TV. Les repas de famille : tu parles, tu parles, tu passes des heures à savoir qui va préparer ceci, cela, qui va acheter ceci, cela. Et si ça ne suffit pas c'est important

sur la plage, je pense à ce que disait l'ami : c'est le temps de la démerde et des petits boulots. Cette institutrice rencontrée qui vend des souvenirs au pied de l'Acropole. Sur la plage le vieux monsieur en noir porte sur son dos un sac poubelle. Il marche au bord, où l'eau dentelle, moins bleue qu'au loin. Sa femme le suit. Elle hisse au-dessus d'elle trois robes pailletées, on comprend que c'est ce qu'il y a dans le sac poubelle, des robes, ils les vendent tous les deux, vêtus de noir, chaussettes et chaussures d'hiver, sur le bord de la plage

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