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Billet de blog 11 septembre 2014

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Métamorphoses : d'Ovide à Christophe Honoré

Je n'ai pas résisté à la tentation : m'enfermer dans une salle obscure pour suivre la métamorphose cinématographique des Métamorphoses.

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Je n'ai pas résisté à la tentation : m'enfermer dans une salle obscure pour suivre la métamorphose cinématographique des Métamorphoses.

Ce flot ovidien m'a toujours passionnée et malgré mes réticences vis à vis du travail de Christophe Honoré, je me suis aventurée.

Le fil rouge est séduisant : une jeune lycéenne, Europe (Amira Akili), après sa rencontre avec un certain Jupiter (Sébastien Hirel), va découvrir, en s’enfonçant dans la nature de l'Hérault, des histoires qui la changeront à jamais. Organisé en trois étapes, le film s’articule autour de rencontres pivots : Jupiter, Bacchus (Damien Chapelle) et Orphée (George Babluani) seront les trois figures masculines auxquelles Europe sera confrontée. Tout se déroule dans la France mi-urbaine (Lodève), mi-nature (les bords de l'Hérault), de notre époque. C'était bien là, l'enjeu rare et stimulant.

Mais  à l'arrivée, peu de stimulation, peu de vibration, peu de désir, peu d'enchantement. Pourtant Honoré n'hésite pas à filmer le grain de la peau, la battement d'une veine, l'eau rapide, les herbes et les roches. Comment faire des Métamorphoses une suite plate de "petites" histoires assaisonnées de sauce fade, comment désamorcer le feu sacré des mythes, comment mener l'imagination dans l'impasse ? Pour ce programme, suivre Honoré le long de l'Hérault.

Nous assistons à une salade russe (même pas grecque) qui combine la hauteur vertigineuse du sujet à un défi cinématographique (vouloir réaliser une transposition contemporaine de récits antiques) qui devient prétention  : suffit-il de faire jouer des amateurs, de filmer en vidéo, de faire de Dianne chasseresse une transexuelle qui se rafraîchit avec l'eau tirée d'un bidon en plastique, de Jupiter un camionneur et  de Tyrésias un médecin de quartier, pour faire venir à nous les sublimes Métamorphoses ? Hélas non.

Ovide s'adresse ainsi au lecteur  : "Je me propose de dire les métamorphoses des formes en des corps nouveaux."

"Métamoprohoses des formes" : on comprend que ce projet chatouille un créateur qui fait écho aux grands "anciens" (Truffaut, Demy, Godard) tout en essayant de s'en affranchir, on comprend qu'il y ait là du grain à moudre pour un cinéma qui cherche, se questionne. Mais en bout de chemin, les "corps nouveaux" ne sont qu'abstractions fabriquées dans le refus de tout plaisir romanesque : les peaux ne sont que des peaux, même si la lumière cherche à les animer ; désir et tremblements ont fui, et nous restons orphelins d'Ovide.

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