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Billet de blog 15 mai 2011

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Odilon Redon : le monstrueux intime

C'est une courte rêverie : d'un cyclope à l'autre.Au Grand Palais, devant le monstre peint par Odilon Redon vers 1914.

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C'est une courte rêverie : d'un cyclope à l'autre.

Au Grand Palais, devant le monstre peint par Odilon Redon vers 1914.

Je le connais, je le connais bien. J'y reviens : d'autres tableaux semblent m'arriver, ils tapissent ma tête, mais je ne sais lesquels. Je reviens encore : cette huile qui accroche la toile, presque une poussière d'huile.

Je cherche : le premier à venir en clair, c'est Goya. Normal, un peu plus tôt dans l'exposition j'ai vu l'hommage que Redon lui a rendu en plusieurs lithographies (Hommage à Goya, 1885)

mais aussi cet étrange jongleur, extrait de ce même hommage au maître espagnol.

L'oeil rond. Tellement de ronds, de boules, de sphères chez Redon.

Ce sont les "Noirs" de Redon, ses fantasmagories, aussi étranges que celles de Goya, mais leur domaine est celui des brumes du rêve, le cauchemar se tient tranquille : Odilon Redon ouvre les portes intérieures mais ses monstres sont emmaillotés d'étonnement. Odilon est un doux, un secret, un silencieux : l'oeil rond de son Cyclope est un oeil de ciel, celui des nuages.

Mais les Peintures noires de Goya sont là aussi pour moi, ces fresques qu'il peignit sur les murs de la Maison du sourd - je ne peux éviter son Saturne (1819)

Ce géant n'est pas le bon, pourtant j'aurais pu m'en contenter - corps en péril -

Mais Redon, ce n'est pas la cruauté.

Un autre gaillard passe devant, Goya insiste : Le colosse (1808)

Certains bleus... les brumes qui entourent le corps...

Je fais un détour par les lithographies de Goya : pas étonnant, le grotesque fait toujours signe.

Disparate d'idiots (1814)

Mais ce n'est plus un oeil, ce sont des bouches.

Non, ce n'est pas Goya qui se cache derrière mon Odilon Redon.

Je cherche cet oeil unique, peut être du bleu, sans doute aussi une touche d'enfance. Le Cyclope penche sa tête en douceur.

Qui est là ?

Rentrée chez moi, je refais le parcours du rêve. Voilà que la porte s'ouvre.

Paul Rebeyrolle, Le Cyclope - Hommage à Georges Guingouin 1987, peinture sur bois

En effet, ce n'était pas un cyclope cruel que je cherchais ! Rebeyrolle a peint cette toile pour rendre hommage à un grand ami résistant du Limousin, qui forgea une armée de 10 000 hommes pour combattre et libérer Limoges.

Enfin un détail singulier : le Cyclope de Redon et celui de Rebeyrolle sont des huiles sur bois. J'aime ces rencontres.

Odilon Redon, prince du rêve, rétrospective au Grand Palais (jusqu'au 20 juin 2011).

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