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Billet de blog 9 avril 2014

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Brigitte bardot... Bardot/Femens phénomènes

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

J'avais presque oublié ce film de Henri-Georges Clouzot qui me fit tant pleurer lorsque je le vis à mon adolescence.

J'étais alors devant une télé en noir et blanc. Avide de cinéma, je ne ratais aucune séance de Claude-Jean Philippe ou du ciné club de la 3.

J'ai fait l'effort (pas si facile) de me confronter de nouveau à mon histoire (celle de ma mère aussi) en regardant pour une sempiternelle fois sur Arte La Vérité de H.G. Clouzot, ce pur chef d'œuvre qu'aucune féministe d'aujourd'hui ne doit louper...

L'histoire de cette toute jeune femme, démunie à tous points de vue et/mais égarée dans une histoire passionnelle ravageuse, en proie ensuite à ce procès aussi terrifiant de convenances mâles et de ce dont est capable la bourgeoise rabougrie des années 50, m'avait alors saisie au point d'en sangloter plusieurs heures durant... C'était à l'âge ado (15/16 ans), et j'avais fait de BB/Dominique Marceau ma funeste héroïne ! Cette Dominique Marceau et le Meursault de l'Etranger de Camus se confondaient pour me donner raison... Le comble, le plus douloureux de l'incompréhension humaine, me semble, encore aujourd'hui, concentré dans ces deux œuvres, même si l'on trouve hardi mon rapprochement.

Et, pour moi seule peut-être, ils se confondent encore à présent, ces personnages de fiction si pleins de vérités parmi les plus sévères, parmi les plus âpres, parmi les plus essentielles...

Brigitte Bardot, cette bonne femme vieillie, si conventionnelle et conservatrice  aujourd'hui (pour ne pas dire plus) telle que devenue ensuite, c'était elle, Brigitte Bardot, celle si belle du cinéma et de la chanson, celle qui faisait fantasmer nos pauvres papas tout en attristant nos si banales mamans ! Rions-en à l'aise à présent... Mais l'affaire n'est pas close, hélas. Et cette histoire tournera en boucle. Eternellement ? J'espère bien que non.

Nos mères nous avaient donné ce prénom, aussi incertain que marquant : comme des stigmates à apprivoiser... Elles nous l'avaient donné probablement par amour : pour nous vouer à un sort meilleur que le leur. Et Brigitte Bardot était au carrefour de nos destinées, incarnant la liberté des femmes avant même que nous ne naissions. Celle qui se brûle les ailes, dans le désespoir le plus terrible et qui finit par en mourir dans l'indifférence la plus totale, aux us et coutumes de la société virile, mâle, bourgeoise au pire sens du terme, c'est elle, moi, nous, encore...

Il a beau être en noir et blanc, ce film de Clouzot, elle a beau être devenu ce qu'elle est devenue, BB... Elle reste inoubliable et pas vraiment remplaçable, dans le rôle de la Dominique Marceau de La Vérité (celui, aussi dans une thématique relativement voisine, de la Camille du  Mépris de Godard).

Au point que j'en suis à me demander, à présent que cette dame est vielle, si le sort de la Brigitte Bardot civile, vraie, charnelle et néanmoins errante, de cette si frêle/fragile personne, et pourtant si jolie jeune femme, n'a pas été gâché, entravé par ses rôles dans ce(s) film(s)...

Nous oublierons peut-être la femme lambda mais pas sûr. Nous n'oublierons en aucune manière la femme de ces rôles-là, tenus si haut la main. Dans le plus grand mystère de la vie, et la plus réjouissante mystification du cinématographe.

Elle est devenue vieille. Elle marche avec des cannes et disparaîtra bientôt, et devient de plus en plus méchante... Je me dis pourtant que nous, ses "filles de joie" (et de tant de prénoms des années 50/60) nous lui devons tout de même un tout petit quelque chose... Les icônes, même barbares, servent à cela : la mémoire.

Ainsi que les reconnaissances, si difficiles et improbables qu'elles puissent être, qui vont avec.

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