Dans la vie, il y a des moments de pause.
Du coup, on se relie au meilleur. On se replie donc sur ce qui nous a plu jadis...
Eu l'on relit d'anciennes pages, des récits qui valent, que l'on eut pu oublier.
En 2001, voici donc 12 années, voilà que mon libraire m'invite, non sans une insistance quasi déplacée, à lui acheter un livre. C'était un tout petit livre pas cher du tout, et à "l'air de rien", qui l'avait ébloui... Merci à lui, encore aujourd'hui, d'avoir risqué de partager ses foudres...
C'était dans la collection Rivage poche. Un petit livre pas cher (moins de 10 euros et moins de cent pages ! dis-je) Mais si cher depuis lors, au fond !
"Maison des autres"/ Casa d'altri : quel drôle de titre - qui dit si peu tout en disant tant ! Bref, Maison des autres de Silvio d'Arzo, un "obscur" italien néanmoins éblouissant, disparu si jeune (trente ans et des poussières), dans les années 50, peu après ce livre et avant d'avoir pu produire une "œuvre", est bien l'auteur d'un chef d'œuvre, mais d'un chef d'œuvre minuscule, discret. Minuscule mais aussi dense que parfait.
Maison des autres est : ébouriffant, surprenant, consternant... RENVERSANT comme seuls quelques rares livres le sont.
Soit une très vieille femme. Soit, par ailleurs un pauvre prêtre, le narrateur de ce récit. Soit, en plus, des paysages de monts et de hameaux italiens du début du XXe, âpres, glaciaux et désolés jusqu'à la peur. Soit quelques gens peu amènes. Mais tout de même amènes puisque...
C'est, finalement, une sorte de "thriller" à l'envers, pour autant que j'ose ainsi le cataloguer. Un thriller éblouissant, d'une centaine de pages à peine et lisable en une heure. Un "thriller" ? Mais pas du tout comme on s'y attend, mais alors pas du tout ! Le suspense n'est pas dans l'action mais dans la tension, pas dans la peur mais dans la frayeur étalée : dans le secret d'une confession rare.
Chut !
Le droit de mourir comme on l'entend est à ce prix dans ce monde-là, et, à cette époque-là, dans cet univers-là, cela se passe ainsi. Ce "droit" entre guillemets que demande à ce prêtre cette si vieille dame, aussi pauvre et obstinément seule et tourmentée que culottée, bouleversera l'humain de ce prêtre. Bref, une affaire qui met le bordel dans des interstices aussi insoupçonnés qu'insouçonnables. Et, suivra, après le dilemme et l'aveu si pénible et scandaleux, la beauté du geste, insaisissable bien sûr, comme tous les gestes qui importent...
N'en disons pas davantage mais sachons que ce qui compte le plus ici, comme toujours, c'est l'écriture ! Et, au-delà, cet objet rare qu'est ce texte : un véritable cadeau, une grâce ! Le ton et l'écriture de cet auteur, bien trop tôt disparu, en sont la précieuse et décisive escorte. Disons l'essence. Ou l'essentiel.
Allez ! Foncez !
Vous me remercierez ensuite... Et, plus tard sinon rien !
<<< C'était vrai, et je respirai. Les mots me font honte, voilà la vérité. Et les adieux n'ont jamais été pour moi.>>>
<<<Si ton métier est de t'intéresser à tous, commence par t'intéresser à l'un d'eux, rien qu'un seul. Mais jusqu'au bout, au bas mot, jusqu'à la racine. Il n'est pas de meilleurs moyens de t'intéresser alors à tous les autres>>>
<<< Dieu pourrait bien me faire un plaisir, parce-que je ne lui ai jamais rien demandé. Je ne l'ai jamais dérangé, jamais...>>>