Les mots sont des choses. Et l'absence de mots est aussi une chose.
Ainsi que les noms propres - qui désignent des êtres existants ou ayant réellement existé. Ils désignent aussi des lieux désignés, des lieux dédiés à des humains sur une carte géographique et c'est seulement dès lors que ces lieux prennent existence et substance. On songera ici, si on le veut et sans jeter de l'huile à la carte de la Palestine...
L'innommé n'existe pas. Tout objet, tout être, tout lieu qui n'est pas expressément assorti d'un mot ou d'un nom qui le qualifie ou le désigne N'EXISTE PAS.
Dans la Une de Charlie signée Luz, non seulement personne ni le prophète n'est nommé ni désigné VERBALEMENT : le type qui dit "Tout est pardonné" n'est donc pas le prophète ! Et l'on mettra quiconque au défit d'affirmer qu'il s'agit de lui. Le type du dessin de Luz, c'est n'importe qui ! N'importe qui d'origine arabe certes car il est clair que ce n'est pas un viking ni un teuton. Mais eh alors ??? Un faciès arabe est un humain au même titre que toi et moi...
Très loin de notre tout petit pays, ce confetti (*) de rien du tout à la surface du globe, des masses de gens se sont massacrés entre eux, hier, incendiant aussi des églises.
Pourquoi ?
Parce-que, disent-ils, la France et tous ses ressortissants a blasphemé en représentant - via une modeste publication devenue soudain et par quasi magie "journal officiel" - une image de leur prophète : the prophet ! Celui dont il faut à tout prix s'abstenir de le représenter en image, pour laisser à chaque esprit pieux la LIBERTE de se représenter à sa guise, en son for intérieur, sa beauté selon sa convenance. On peut trouver débile cette croyance, mais il se trouve qu'elle existe...
Pourquoi ne pas respecter les fantasmes d'autrui ? me demanderai-je.
Cette croyance existe et c'est là que le bât blesse et que l'on en revient aux mots :
QUI A DIT - OU ECRIT - QUE LE PERSONNAGE FIGURANT EN UNE DU DERNIER CHARLIE ETAIT LE PROPHETE MAHOMET ???
PERSONNE ! PERSONNE POUR L'INSTANT !
Il faut donc bien que "quelqu'un" (de forcément malveillant) ait mis dans la tête et le cœur troué de tous ces pauvres gens, au Yémen, au Niger, au Pakistan et ailleurs pour qu'ils se montrent prêts à s'entretuer (c'est fait) et à mourir pour "écraser ces salauds de Français".
La manipulation est incommensurable et incommensurablement dangereuse. Comme tous les non-dits dans lesquels l'"Occident" est totalement mouillé. Faisons lui rendre gorge d'abord, à notre Monde prétendument libre.
Ce sera le prix à payer si nous voulons préserver la paix.
(*) Mince rondelle de papier coloré qu'on lance par poignées lors de certaines festivités (carnaval).