EIl y a trois mois, j'ai reçu pour trois semaines un être cher en fin de vie mais totalement, bien que pour peu de temps, encore vaillant et encore un peu au sommet de sa vigilance.
Une femme qui aimait tout autant la littérature (avec jugements fermes et tranchés jusqu'à l'injustice mauvaise) que les aventures cinématographiques. Forcément.
C'est alors que j'ai entrepris de lui faire découvrir une cinématographie que j'aimais et qu'elle ne connaissait pas, celle de Aki Kaurismaki.
Après les séances de radiothérapie de mes couilles, aussi vaines qu'éprouvantes, on rigolait quand même ensemble toutes deux, dans nos vases ouvertes...
Puis j'allumais la télé... pour acheter chez orange.
Et nous regardions alors les films de Aki Kaurismaki. Tous. Tous ceux disponibles et, curieusement, même chez les marchands de soupe, on en trouve ! Pas besoin d'aller chez la FNAC acheter d'improbables Dvd/matière - qui encombrent aussi bien nos mémoires inutiles que les espaces de poussière dans ces tiroirs-tombeaux que sont nos maisons...
Le + "strange" étant qu'ils étaient en catalogue... Je n'en reviens toujours pas.
Je les avais (donc) tous commandés : un par jour ! Et je les lui ai tous montrés, à un ou deux près, et jusqu'au bout.
Elle avait dit tout d'abord, après le premier :
- Ça me rassure sur la créativité et l'engagement, sur l'intelligence et la tendresse humaine, ainsi que sur le "style" !
Ah ah ah ! Je suis enchantée d'avoir vu ça ! Ça m'en bouche un coin ! Génial - merci. Vivement demain avec un autre.
Au fil de nos séances, elles aimait toujours de plus en plus ce cinéaste, cet homme étrange, mais pas si étrange que ça puisqu'il nous ressemblait, nous disions-nous....
Comme nous. Du même âge que nous, aussi...
Le mieux est ici , longue et remarquable itv, impossible à importer (grrrrrrr). On y entend une voix rare, le cœur d'un cinéaste dans sa terrible humanité et dans son immense culture, aussi cultivée qu'intuitive et charnelle, celle du grand cinéma. Ne pas rater ça, remarquable, autant par ses questions que par ses cadrages, et par son temps long... :
http://www.allocine.fr/article/fichearticle_gen_carticle=18609542.html
Après, au terme d'une bonne dizaine de films (presque tous) elle m'a dit tout sourire :
- Ben merde alors ! J'aurais jamais imaginé que, peu de temps avant de passer l'arme à gauche, y'aurait un type qui me plairait à ce point, tiens !!! Tout me plaît, tous les films que tu m'as montrés ! Je suis contente de ça.
La mélancolie et l'humour dont se réclame notre homme étaient ici au rendez-vous.
Le meilleurs papier (aussi génial que talentueux) sur le dernier film (Le Havre/2011) est ici, en soi un régal :
http://next.liberation.fr/cinema/01012378782-braves-de-comptoir
Bref, ma mienne,
elle sera partie sur ce qu'il y a de mieux, me dis-je !
Me dis-je, histoire de me consoler juste un petit peu, et de quoi de garder encore- un petit peu aussi - quelques bribes de nos complicités artistiques, politiques et morales, de si longue haleine...