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Billet de blog 29 novembre 2013

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Gros Câlin au Théâtre de L'Oeuvre

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Emile Ajar en écrivant Gros Câlin , en 1974, cessait brutalement d'être Romain Gary pour devenir un autre, un autre écrivain. Ou l'inverse. Une mue en quelque sorte comme le python pourrait laisser sa vieille peau pour une autre.

Mais c'est une autre histoire..

Parlons plutôt python.  Ce python qui est toute l'affection, toute l'obsession de Monsieur Cousin, statisticien  presque sans histoires, sauf la sienneOu plutôt parlons  de Monsieur Cousin. Et autre métamorphose, parlons donc de Jean-Quentin Châtelain car à la sortie du théâtre de L'Oeuvre , ils ne font plus qu'un, Monsieur Cousin et le comédien - et le python , bien entendu. Et Romain Gary/Emile Ajar.

Rares sont les comédiens capables de faire déguster ainsi une langue, d'en détacher chaque mot, de jouer avec la diversité du ton, cocasse, banal, absurde,   presque roublard et toujours gourmand. Jouant d'une voix particulière, agrémentée quand cela lui sied d'accent suisse, d'un physique balzacien comme pourrait l'évoquer la grande chemise sombre qu'il porte  entre l'Afrique et la robe de chambre, Jean-Quentin Châtelain est en majesté sur la scène de L'Oeuvre.

 La metteuse en scène Bérangère Bonvoisin que l'on sent elle-même amoureuse du texte fait évoluer le comédien dans un cadre sobre, stylisé, tout en lignes droites comme opposées aux gestes sinueux du corps et des bras de l'acteur, parois de céramiques aux couleurs d'écailles, tubes d'acier, banc noir, dans une lumière violente de vivarium qui laisse la place aux ombres, à l'obscurité.

 Voilà donc Monsieur Cousin,  pythomane. Sa solitude extrême, dans une grande ville comme Paris, son excentricité, sa timidité, font de lui un inadapté, un objet de railleries, et un rêveur.L'acquisition du python a bouleversé sa vie.

Il découvre la compagnie, s'inquiète pour la nourriture de l'animal qui ne veut manger que d'autres êtres vivants, prend des notes marquées par l'absurde, Jean Moulin et Pierre Brossollete  et enhardi par la nouvelle réputation que lui ont fait ses collègues (forcément sarcastiques)  parvient  à entretenir une conversation d'ascenseur avec la jeune collègue dont il est amoureux, Mademoiselle Dreyfus, guyanaise,  avant d'avoir  avec elle une relation tarifée un soir où il cherchait un peu de tendresse auprès des "bonnes putes".

 Entre humour et désespoir qui vont si souvent ensemble,  le voilà en route pour la dernière mue, la dernière métamorphose. Quand il n'a plus besoin du python car il se sent enfin "bien dans sa peau", il sera à la manière de l'axolotl qui fascinait Julio Cortazar au Jardin des Plantes, devenu lui-même l'animal, en toute humanité.

 Photos: Dunnara Meas

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