Peter Weir
Né en 1944 à Sydney. Son père un est agent immobilier surtout connu comme narrateur du feuilleton radiophonique Dr. Max. Il entreprend brièvement des études de droit, puis d'arts à l'Université de Sydney. Il y rencontre Philipp Noyce (Calme Blanc) et les membres d'un collectif de cinéma expérimental, Ubu Films.
A 20 ans, il embarque sur un bateau de croisière en direction de Londres. Un périple de plusieurs semaines qui marque le jeune Weir fasciné par les récits d'aventures que lui racontait son père étant enfant. Au cours de ce voyage il rencontre sa future femme, Wendy Stites, qui sera conseillère artistique sur une grande partie de ses films.
De retour à Sydney, Peter Weir intègre la télévision australienne. On le retrouve comme assistant de production sur différentes émissions dont, entre 1964 et 1968, le Mavis Bramston Show, une émission satirique. Il rentre ensuite au Commonwealth Film Unit. Il consacre son temps libre à la réalisation de courts métrages(Incredible Floridas) et de documentaires (notamment sur les groupes de musique pop australienne) où l'image et le son sont prétextes à expérimentation. Ses talents de cinéaste sont remarqués. Les prix qu'il reçoit lui permettent d'être repéré par ABC Australie qui lui demande de se pencher sur les quartiers pauvres de Sydney (Whatever Happened to Green Valley). Il décide d'offrir aux habitants des caméras pour qu'ils se filment. Ceux-ci constitueront progressivement différents groupes. Les communautés, l'intérêt pour l'expérimentation visuelle et sonore donnant naissance à une inquiétante étrangeté, le goût de l'aventure, tout ce qui fera la clé de voute de son oeuvre est déjà présent dans ses premiers travaux.
Il passe au grand écran en 1972 avec Homesdale où il fait jouer son ami Philipp Noyce. Grand prix de l'Australian Film Institute, ce moyen métrage lui permet de réaliser Les Voitures Qui Ont Mangé Paris. Le portrait d'une communauté australienne de la ville de Paris qui, en plein bush, s'est créée une société secrète s'organisant autour de la provocation d'accidents de voitures dont les pièces détachées se substituent ensuite a la monnaie australienne. On perçoit dans ce film une satire sur la psychologie des Australiens qui refoulent derrière leurs institutions démocratique, l'origine criminelle de leurs ancêtres britanniques bannis sur l'ile prison que fut l'Australie au 18e siècle. Loufoque, ce film est aussi l'un des premiers films financé par l'Etat australien. Ce dernier va redynamiser un secteur en crise et permettre l'éclosion d'une nouvelle génération de cinéastes dont les plus connus sont Philipp Noyce (Jeux de Guerre) et George Miller (Mad Max).
C'est avec son second long métrage que Peter Weir va accéder à la postérité. Pique-nique à Hanging Rock, adapté d'un fait divers romancé par Joan Lindsay, est en effet son premier succès et le film qui le fera connaitre en dehors de l'Australie. Centré une nouvelle fois sur une petite communauté, celle de jeunes filles d'un internat de bonnes familles, le récit entraine le spectateur dans le fantastique avec la disparition inexpliquée de certaines d'entre elles. A la description des occupations ritualisées des écolières s'opposent les mythologies des traditions aborigènes. Ce film qui sera remarqué par Stanley Kubrick deviendra un monument du cinéma fantastique. Sofia Coppola (Virgin Suicide) et Lucile Hadzihalilovic (Innocence) lui en seront à jamais reconnaissantes. En 1976, il réalise La Dernière Vague qui confronte encore une fois les institutions australiennes héritières des structures sociales occidentales avec l'organisation tribales des aborigènes bâtie sur la culture du secret et des mythologies.
Après ce magnifique conte moderne philosophique il revient à la télévision pour un téléfilm léger dans lequel une anthropologue plus à l'aise dans les bibliothèques que parmi les communautés qu'elle étudie aura bien du mal à communiquer avec son plombier. Hommage à Hitchcock, Le Plombier est un pur exercice de style. Alors qu'il a offert à Richard Chamberlain son premier rôle d'envergure dans La Dernière Vague, c'est Mel Gibson que l'on découvre dans Galipoli dont on devine l'ambition internationale. Moins singulier que ses premiers films, on remarque toujours son envie de réveiller la mauvaise conscience australienne et la volonté de faire voyager les spectateurs. Le film raconte le massacre inutile de milliers de soldats australiens à la fin de la seconde guerre mondiale en Turquie.
En 1982, Peter Weir fait son premier film américain, l'Année de tous les Dangers où Mel Gibson fera la connaissance de Sigourney Weaver dans le tumulte de l'Indonésie des années 60. Deux ans après, avec Witness, il plonge un Harrison Ford citadin dans la communauté religieuse des Amish. Il prendra un malin plaisir à retourner la situation pour son film suivant Mosquito Coast dans lequel le personnage interprété par Harrison Ford décidera d'emmener toute sa famille en Amazonie loin de la société de consommation. En 1989 Peter Weir touche le grand public du monde entier avec Le Cercle des Poètes Disparus où l'on découvre le jeune Ethan Hawke fasciné (comme ses camarades) par un professeur de littérature hors normes incarné par Robin Williams. Salué par l'académie des Oscars, ce film ne fera pas sortir Peter Weir de la dépression consécutive à l'échec de Mosquito Coast.
C'est dans cet état d'esprit qu'il tourne Green Card. Tournée comme une comédie légère, l'histoire de cet immigré (Gérard Depardieu) en but avec les institutions de l'immigration américaine est le récit à peine déguisé de Peter Weir lui-même et de ses problèmes avec les financiers d'Hollywood. Etat Second est un retour à la sobriété et à l'étrangeté qui caractérisent son cinéma. Rescapé d'un crash d'un avion de ligne, Jeff Bridges se croit invulnérable au grand désarrois de son entourage. Un film mineur qui inspirera tout de même la série de JJ Abrahams: Lost ainsi qu'Incassable de Night Shyamalan. Il renoue avec le succès public et critique avec The Truman Show. Sur un scénario d'Andrew Niccol (Bienvenue à Gattaca), Peter Weir imprègne le film de ses obsessions et y ajoute un regard sarcastique sur la société du spectacle. Alors que la collaboration avec les studios hollywoodiens avait bien démarré, l'univers particulier de Peter Weir provoque les réticences des actionnaires et dès lors le réalisateur australien aura du mal à monter ses projets. En 2003, son dernier film hollywoodien Master and Commander fait de lui un véritable paria aux yeux des studios. Pensant financer une succession de batailles navales spectaculaires, les dirigeants du studio Universal seront troublés par cette course poursuite psychanalytique privilégiant les moments intimistes et la description très crue de la communauté maritime.
A travers le récit d'évadés du Goulag, Peter Weir sept ans après Master and Commander, Peter Weir laisse entendre dans Les Chemins de la liberté qu'Hollywood offre peut être les moyens idéaux pour ses projets d'envergure mais qu'il n'est plus possible aujourd'hui de laisser un vision originale et singulière du monde s'exprimer. Comme il y a l'utopie communiste à laquelle ont crus les personnages des Chemins de la liberté et la réalité historique les purges staliniennes, il y a l'idéal hollywoodien auquel a cru Peter Weir et la réalité économique: les banquiers décident de tout. Pour réaliser Les Chemins de la Liberté, Weir a du trouver des financements loin d'Hollywood.