Lugosi, un monstre sacré en bande dessinée

Partagé entre les biographies (Gary Gygax, Rod Serling) les récits de science-fiction aux traits très inspirés par Moebius, et les chroniques sociales souvent relevées par l’intérêt qu’il voue aux relations sentimentales ; Koren Shadmi propose aujourd’hui de se plonger dans l’histoire de Bela Lugosi. Lugosi se concentre sur ce monstre sacré de la culture populaire, figure du fantastique à la vie amoureuse tumultueuse et à ses addictions (alcool et morphine). Bref à travers l’acteur, le dessinateur avait tout ce qu’il semble lui plaire. Sur une petite dizaine d’œuvres, Shadmi a retenu l’attention plus pour son travail d’illustrateur de presse que pour ses romans graphiques (Abaddon mis à part). Lugosi fait échos à L'homme de la quatrième dimension son précédent livre édité par la Boite à Bulle. Il s’agit là encore de placer dans la lumière sur les zones d’ombres d’un visage mondialement connu, une mission louable. Pour autant si l’idée était originale pour Rod Serling, c’est beaucoup plus compliqué par Bela Lugosi. Si vous avez vu les films de l’acteur et avez toujours en mémoire l’Ed Wood de Tim Burton… Vous n’aurez à vous mettre sous les dents que les quelques pages sur l’enfance du comédien, vite expédiée et surtout l’incroyable défilé de femmes plus ou moins jeunes qui vont parcourir la vie de Lugosi. Ne vous attendez pas non plus à des scènes olé olé… Lugosi est une bande dessinée qui s’adresse essentiellement aux adolescents et aux petits, ce qui est sans doute sa qualité principale. Paradoxalement si le récit et les illustrations sont assez basiques, on se demande si ce public ne va pas se perdre dans le lettrage qui compose les bulles. Il faut dire que Koren Shadmi nous fait voyager entre la Hongrie natale de l’acteur, des personnages roumains, l’exil de l’artiste en Autriche, puis aux USA. La B.D., très bavardes alterne les différents langages (Hongrois, Autrichien, Allemand, Anglais, Français) et accents (autrichien, hongrois, anglais, français, Brooklyn) en utilisant pour se démarquer (tout est en français), un simple signe topographique et une note de bas de case précisant la langue ou la prononciation. Déconcertant. L’ensemble n’est pas honteux, mais sans vraiment prise de risque. Bela Lugosi, en tout cas méritait mieux.