Au terme de la réunion avec le président russe, l’entourage du président français faisait état de l’engagement des deux parties à « ne pas prendre de nouvelles initiatives militaires, ce qui permet d’envisager la désescalade ». La Russie aurait notamment accepté de retirer ses soldats au terme des manœuvres militaires en cours en Biélorussie (voir ici). A en croire ses zélateurs, cette rencontre aurait donc été un grand succès diplomatique et la paix en Europe serait en voie d’être sauvée grâce à M. Macron.
Voire…
Avant même que l’avion de M. Macron ne se pose à Kiev, le porte-parole de la présidence russe apportait en effet un démenti cinglant à cette belle histoire racontée par les communicants de l’Élysée. Non, il n’y avait pas eu d'accord pour une « désescalade » car ce n’est qu’avec les États-Unis, et non avec la France, qu’un tel accord pourrait être conclu. Et le porte-parole russe de mettre les points sur les i : « La France est dans l’Union Européenne et est un membre de l’OTAN. La France ne dirige pas l’OTAN. » Le même porte-parole a aussi contesté les informations données par la partie française sur l’engagement de la Russie à ne pas conduire de nouvelles manœuvres militaires à la frontière ukrainienne.
Les choses sérieuses continueront donc d’être discutées avec M. Biden et avec lui seul. Et non pas avec le responsable d’un pays membre de l’OTAN, un membre parmi d’autres, dont nul n’ignore – et certainement pas le président russe - qu’après de beaux discours, il finit toujours par s’aligner sur les États-Unis. Comme les autres. Quel intérêt avait donc M. Poutine à passer cinq heures à discuter avec M. Macron ? Miser sur l’agacement que ne manque jamais de susciter le président français chez ses partenaires, cette fois-ci en surjouant le sauveur de la paix en Europe ; mettre en lumière les divergences entre les membres de l’UE ou entre ceux de l'OTAN. En un mot, diviser pour régner.

A l'occasion de cet intermède diplomatique, M. Poutine a bien voulu consentir à flatter l’égo de M. Macron en en faisant son interlocuteur d’un jour dans la crise ukrainienne. Devant tous les micros qui leur sont tendus, les courtisans de l’Élysée ne manquent pas de souligner la « stature internationale » de leur héros. Tandis que les futurs adversaires de M. Macron à l’élection présidentielle s’affrontent dans de médiocres querelles, lui consacre tout son temps aux grandes affaires du monde. Lui joue dans la cour des grands, pas dans le bac à sable des candidats. Lui s'entretient avec Poutine, comment imaginer qu'il débattrait bientôt avec Poutou ?
L'étoile de M. Macron peut bien briller au-dessus du siège de La République en Marche, il en va toutefois différemment sous d'autres cieux. Dans un récent article publié dans La Tribune, Marc Endeweld rapporte les propos d’un haut diplomate russe : « Le président français fait de très beaux discours mais ce n'est pas suivi d'actes ». Tout est dit. Souvenons-nous : la Libye, le Liban, le Mali, les écoutes des services secrets marocains, le contrat des sous-marins australiens, on allait voir ce qu’on allait voir. On a vu. La modestie des résultats, à défaut de celle du président-candidat : c’est sans doute une fois de plus ce que l’Histoire retiendra de la réunion qui s’est tenue hier au Kremlin entre les présidents français et russe.
