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Billet de blog 14 novembre 2023

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Le pendule de Macron

Le président de la République a été surnommé le « pendule » par les Ukrainiens, parce que ses positions balancent d’un côté, puis de l’autre. Ses déclarations publiques sur la guerre menée par Israël à Gaza en fournissent une nouvelle illustration.

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Le 24 octobre, à Tel-Aviv, après que M. Netanyahou eut expliqué qu’Israël menait « la guerre de la civilisation contre la barbarie », M. Macron remercia son « cher Bibi pour ses mots » et exprima son « soutien aujourd’hui et demain dans tous les aspects de cette guerre contre le terrorisme » avant d’ajouter : « La France est prête à ce que la coalition internationale contre Daech […] puisse lutter aussi contre le Hamas. »

Le 27 octobre, à l’issue du Conseil Européen, le président français annonçait à Bruxelles un projet de « corridor humanitaire maritime » que devrait mettre en place une « coalition humanitaire avec plusieurs pays européens ». Début de la première oscillation, passant en l'espace de trois jours d’une coalition militaire pour bombarder Gaza à une coalition humanitaire pour venir en aide à sa population.

Le 9 novembre, M. Macron présidait à Paris une « conférence humanitaire » pour Gaza. Alors qu’Amnesty International dénonçait une crise « d’une intensité jamais vue depuis la Seconde Guerre mondiale », le président de la République se limitait à demander « une pause humanitaire très rapide » mais se refusait à exiger un cessez-le-feu.

Le 10 novembre, dans un entretien à la BBC, le président de la République affirmait cette fois qu’un cessez-le-feu était la seule option. Alors que le nombre des victimes des bombardements israéliens sur Gaza dépassait les 10 000, il déclarait : « De facto, aujourd’hui, des civils sont bombardés. Ces bébés, ces femmes, ces personnes âgées sont bombardés et tués.  Il n’y a aucune justification et aucune légitimité à cela. Nous exhortons donc Israël à arrêter. » Fin de la première oscillation du pendule.

Le 11 novembre, le Premier ministre israélien réagissait vigoureusement à ces propos : « [Emmanuel Macron] a fait une erreur grave sur le plan factuel et sur le plan moral ». Et d’ajouter qu’Israël n’avait « pas besoin de ces leçons de morale ».

Le 12 novembre, après ce rappel à l'ordre du « cher Bibi », le président israélien rendait compte d’un entretien téléphonique avec le président français lors duquel ce dernier avait « clarifié » sa position et qu’il « avait clairement indiqué qu’il n'avait pas l’intention d’accuser Israël de porter atteinte intentionnellement aux civils ». Selon la présidence israélienne, M. Macron « a également souligné qu’il soutenait sans équivoque le droit et le devoir d’Israël à se défendre et a exprimé son soutien à la guerre menée par Israël contre le Hamas ». Fin de la deuxième oscillation et retour du pendule à sa position initiale.

L’Élysée s'est alors fendu d'un communiqué précisant que lors de son appel téléphonique avec le président Herzog, le président Macron avait rappelé que « le combat contre le terrorisme à Gaza devait être conduit dans le respect du droit international humanitaire et en prenant en compte la protection des populations civiles ».

A force de dire tout, son contraire et le contraire du contraire, on finit par s’embrouiller. Faut-il à présent s'attendre à un entretien du président français sur Al-Jazeera pour « clarifier la clarification » et faire état de sa solidarité avec la population de Gaza suivi d’un autre sur i24news pour réaffirmer son soutien indéfectible à Israël ?

Le pendule de Foucault est passé à la postérité en physique. Le pendule de Macron est-il promis à un aussi brillant avenir en diplomatie ?

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