Si les tribunes étaient très clairsemées (16 611 spectateurs soit la plus faible affluence de l'histoire de l'équipe de France selon L’Équipe), le carré VIP était bondé pour le match France-Israël du 14 novembre dernier. Le président de la République était présent, aux côtés de l’ambassadeur d’Israël en France, sans doute pour le féliciter après l’interpellation violente et l’arrestation par la police israélienne de deux gendarmes français qui accompagnaient le ministre des Affaires Étrangères en visite dans une enceinte française située en territoire occupé à Jérusalem-Est.
Son prédécesseur François Hollande ne pouvait pas être en reste, lui qui exprimait son envie de « chanter un chant d’amour pour Israël et pour ses dirigeants » lors d’un dîner officiel avec Benyamin Netanyahou en novembre 2013. Quant au délinquant multirécidiviste à talonnettes Nicolas S., il profitait de n’avoir pas encore de bracelet électronique pour s’offrir une sortie et se trouvait donc lui aussi dans la tribune VIP aux côtés de ses deux successeurs.
Étaient également présents le Premier ministre Michel Barnier, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, le ministre des Sports Gil Avérous (sans doute pour se faire connaitre), le ministre des Affaires européennes Benjamin Haddad (tiens, Israël fait partie de l’UE maintenant…), la présidente de l’Assemblée Nationale et soutien inconditionnel d’Israël Yaël Braun-Pivet, les présidents de région Xavier Bertrand et Valérie Pécresse, l’éphémère conseiller municipal de Barcelone Manuel Valls et bien entendu le député macroniste Karl Olive qui est plus assidu dans les tribunes des stades que sur les bancs de l'Assemblée Nationale.
Bref, on se serait cru au diner annuel du CRIF où une grande partie de la classe politique vient tous les ans afficher sa proximité avec cet appendice du gouvernement israélien en France.
Que s’était-il donc passé à Amsterdam pour que tout ce beau monde vienne assister à un match sans le moindre intérêt ? Qu’est-ce qui était de nature à rappeler au président de la République « les heures les plus indignes de l’Histoire » et à François Hollande « les pires heures de l’histoire de notre continent ». Quels évènements justifiaient ces propos définitifs du spécialiste du Kärcher : « ll n’y a pas d’analyse à avoir, il faut sanctionner, il faut frapper, il faut combattre. C’est un combat contre la barbarie. » ?
Rien de moins qu’un « pogrom planifié et organisé » selon un ancien Premier ministre israélien, justifiant l’envoi d’avions de secours par Benyamin Netanyahou. Y avait-t-il eu des dizaines voire des centaines de Juifs massacrés dans les rues d’Amsterdam ? Les hôtels hébergeant les supporters du Maccabi Tel-Aviv avaient-il été bombardés comme une vulgaire école abritant femmes et enfants palestiniens à Gaza ?
La réalité est un peu différente comme l’a relaté cet article de Mediapart mais l’occasion était trop belle pour que les chaines de désinformation en continu se livrent à leurs manipulations habituelles et que les politiciens se retrouvent comme un seul homme pour apporter leur soutien - inconditionnel comme il se doit - à l’équipe d’Israël. Des agressions antisémites ont bien eu lieu mais comment ne pas voir que pendant que l’on parle sur toutes les antennes des blessés parmi les supporters du Maccabi Tel-Aviv (dont certains sont bien connus pour leur racisme et leur violence), le génocide continue à Gaza avec la complicité du président de la République et le soutien sans faille de tous les politiciens présents dans le carré VIP.
Retenons que l’équipe de France, en concédant un match nul, a su se montrer à la hauteur de l’évènement car une victoire aurait incontestablement constitué une intolérable manifestation d’antisémitisme.